Ce tome fait suite à X-Men: Reload (Uncanny X-Men 437 à 443, New
X-Men 155 & 156,
X-Men 157 à 164) écrits par
Chuck Austen qu'il n'est pas nécessaire d'avoir lu avant. Il comprend les épisodes 166 à 176 de la série X-Men, initialement parus en 2005, écrits par
Peter Milligan, dessinés par
Salvador Larroca, encrés par
Danny Miki, avec l'aide d'Allen Martinez pour les épisodes 169 à 176, avec une mise en couleurs réalisée par le studio Liquid!, sauf l'épisode 174 mis en couleurs par Matt Mila. Il contient également les épisodes 8 & 9 de la série Black Panther, écrits par
Reginald Hudlin, dessinés par
David Yardin, encrés par Jay Leisten, et mis en couleurs par
Dean White &
Matt Milla.
L'équipe des X-Men a posé son vaisseau en Antarctique, à côté d'un grand complexe habité par des mutants qui ont essayé d'y construire l'utopie parfaite. L'équipe se compose de Havok (Alex Summers), Gambit (Remy LeBeau), Iceman (Bobby Drake), Polaris (Lorna Dane), Rogue (Anna Marie). Ils découvrent un charnier, certains mutants ayant donné la mort à d'autres, et certains s'étant donné la mort eux-mêmes. Emma Frost les guide à distance avec l'aide de Cerebra. Ils découvrent une inscription en lettres de sang sur le mur : Golgotha. Frost leur indique qu'il est en train de se produire une émeute à Los Angeles, avec des mutants et des êtres humains semblant atteints de folie. Un mutant encore vivant se relève s'accusant d'être un pécheur, et se donnant la mort sous les yeux des X-Men ce qui affecte fortement Lorna Dane. Elle va trouver du réconfort dans les bras d'Iceman ce qui a le don d'irriter Alex Summers. Un autre mutant reprend ses esprits et attaque Polaris, mais Iceman la protège avec un bouclier de glace. Polaris enserre son assaillant dans des débris métalliques, mais ressert trop fort. Elle s'en excuse après coup, s'étant laissé emporter. Trois autres mutants se tiennent immobiles dans un coin sombre. Havok et Iceman essayent de les faire parler, mais ils semblent plongés en catatonie. Rogue décide de toucher l'un d'entre eux pour absorber ses souvenirs. Alors qu'elle y procède, Emma Frost la contacte télépathiquement pour l'avertir du danger qu'elle court.
Une fois cette première crise passée, cette équipe de X-Men est de retour à l'établissement de Westchester et les cours reprennent pour un groupe de jeunes mutants. Une nuit, une nouvelle mutante s'introduit dans la propriété : Foxx. le lendemain, Emma Frost et Alex Summers discutent de l'affectation de la nouvelle venue. Frost décide de l'intégrer dans l'équipe de Gambit. Sa classe se compose d'Onyxx (Sydney Green), Bling! (Roxanne Washington), Flubber (Nick Shelley), Rain Boy (Carl Aalston). Un peu plus tard, Remy LeBeau se détend au bord de l'eau en contant fleurette à Anna Marie. Une fois encore, ils tentent de se toucher en espérant que le résultat sera différent de d'habitude. Une fois encore, Remy LeBeau perd conscience. À la cantine, Bobby Drake et Lorna Dane sont en train de papoter gentiment. À l'extérieur, Foxx fait une forte impression à Onyxx. le pays africain de Niganda est en pleine guerre civile suite à la destitution de son dictateur M'Butu, et en plus une créature monstrueuse happe un journaliste juste devant son caméraman pendant un point de situation au journal télévisé. Cerebra ayant permis de détecter que ce monstre est un mutant, les X-Men interviennent. L'équipe de Havok est complétée par Storm (Ororo Munroe) qui impose sa présence, ainsi que par
Wolverine (Logan).
Étrange :
Peter Milligan est de retour sur une série mutante. En 2001, il avait été recruté par
Joe Quesada pour en écrire une : il n'avait accepté que sous réserve d'être libéré de toute continuité. le résultat : X-Statix. Acoquiné avec
Michael Allred, un artiste à la forte personnalité, il avait écrit une série dépourvue des membres habituels des X-Men, pour une équipe servant de métaphore à la célébrité, surtout celle des individus connus pour être célèbres, et sachant faire fructifier ladite célébrité au maximum. Il est donc un peu inattendu de le retrouver sur une série principale dédiée aux mutants. D'un autre côté, le lecteur qui a lu les épisodes précédents, voit plutôt d'un bon oeil, l'arrivée d'un scénariste aguerri, avec une forte personnalité. Cependant, le passage de Milligan sur la série n'a rétrospectivement pas laissé un grand souvenir. Bien sûr, certains lecteurs ne se seraient satisfait que du retour de
Chris Claremont (et encore, en trouvant qu'il avait beaucoup baissé), ou de
Scott Lobdell, ou même du retour de
Grant Morrison. le début est tout de suite intriguant : une colonie inconnue de mutants. Il s'avère que son espérance de vie est encore plus réduite que celle d'un membre de X-Statix puisqu'ils sont quasiment tous morts avant même que les X-Men (et donc le lecteur) ne fassent connaissance avec eux. On reconnait bien
Peter Milligan. Il faut ensuite un peu de temps pour comprendre à quoi fait allusion ce mot Golgotha, les X-Men n'excluant pas un lien avec le Mont Goglotha, aussi connu sous le nom de Mont du Calvaire, le lieu où fut crucifié Jésus-Christ.
Alors que le lecteur se perd en conjectures sur ce mystérieux Golgotha, la relation d'équipe entre les X-Men part en cacahuètes. C'est très surprenant : les uns et les autres semblent à cran, incapables de se contenir pour faire des remarques blessantes sur un coéquipier ou un autre, en sa présence, et met souvent directement en face de lui. le lecteur éprouve l'impression de regarder des adultes immatures, en proie à une insécurité émotionnelle ou affective qui les incite à se rabaisser les uns les autres. Dans le même temps, la mise en couleurs assez sombre installe un climat pesant, propre à la défiance, pouvant s'interroger sur l'influence pernicieuse d'une entité dissimulée.
Salvador Larroca dessine dans un mode descriptif détaillé, mêlant un détourage des formes précis avec un trait de contour très fin, et l'inclusion d'éléments dessinés à l'infographie, en particulier pour les textures. Chaque page et presque chaque case donnent une impression quasi photographique. Une partie des arrière-plans est réalisée avec un logiciel de modélisation 3D, donnant une impression parfois un peu artificielle, mais généralement complètement compensée par l'habillage des couleurs, ou par l'incrustation de textures venant rendre chaque matériau plus organique. Il n'y a que de temps à autre que l'équilibre entre les différentes composantes n'est pas atteint, ce qui peut faire sortir le lecteur d'une image le temps d'une case Avec ce mode de narration graphique, l'état émotionnel exacerbé des personnages apparaît plus réaliste, moins caricatural, et incite le lecteur à prendre les piques et les reproches au premier degré, accentuant leur portée et souvent leur méchanceté, leur manque d'égard ou d'empathie.
La conjonction de la précision quasi clinique des dessins et de la mise en couleurs très travaillée génère une forte sensation d'immersion. Alors même qu'il ne voit pas énormément de parties de la base en Antarctique, le lecteur éprouve la sensation de se trouver dans cette endroit métallique, froid et sombre, provoquant un bon niveau de stress et d'inquiétude. Il se dit qu'il peut quasiment toucher la pierre des ruines du Mont Calvaire et sentir leur granulosité. Il respire presque la poussière soulevée par l'atterrissage du Blackbird des X-Men. Il se sent confiné avec les X-Men pendant 24 heures dans l'école de Westchester, profitant de visiter des endroits où ils ne vont que rarement. le contraste avec la sortie dans l'espace dans l'épisode suivant n'en est que plus marquant. Dans les quatre épisodes suivants, les auteurs jouent sur un autre contraste : celui entre les séquences dans les locaux de l'école, et entre les séances d'entraînement ou de détente à l'extérieur. Les 2 épisodes dessinés par
David Yardin ne déparent pas beaucoup avec ceux de
Salvador Larroca. Il dessine de manière aussi réaliste, et Jay Leistein effectue un encrage très précis. Ils utilisent plus des aplats de noir pour faire ressortir les ombres et les reliefs, et la mise en couleurs est moins sombre que celle du studio Liquid!.
Il faut donc un peu de temps pour commencer à rentrer dans l'écriture de la première partie. Les personnages semblent se comporter de façon un peu égoïste, sans réel souci de l'esprit d'équipe, avec une vision égocentrée des choses, alors que dans le même temps, ils continuent de se mettre en danger pour combattre une menace mortelle, donc pour sauver la vie de potentielles victimes. le scénariste emmène ses personnages au Mont Calvaire pour une raison pas claire, par forcément importante pour l'intrigue, comme pour semer de la confusion dans l'esprit du lecteur. Puis, petit à petit, la véritable nature de l'ennemi se révèle, et le comportement des X-Men, leur état émotionnel fait sens. le lecteur regagne confiance dans le scénariste et profite pleinement des dessins. La deuxième partie, avec l'arrivée de Foxx parmi les élèves, déstabilise à nouveau le lecteur qui ne sait plus trop si la menace précédente a été éliminée, ou si ce qu'a vu Lorna Dane a des répercussions sur le comportement de ses coéquipiers. En fonction de ce pour quoi le lecteur opte, son plaisir de lecture est très différent. Il vaut mieux supposer que la menace de la première histoire a laissé des traces, sinon c'est une version affadie et peu convaincante de X-Statix, et un psychodrame lourdingue. La troisième histoire relève plus d'une aventure traditionnelle, même si là encore les tensions entre les X-Men et Black Panther semblent forcées, exagérées.
Ce premier recueil consacré aux X-Men écrits par
Peter Milligan laisse une impression mitigée.
Salvador Larroca et le studio Liquid! réalisent une mise en images prenante par sa précision et ses ambiances. L'intrigue est très accrocheuse au début, bien que le lecteur tique fortement sur l'expression des émotions des personnages. Il fait confiance au scénariste pour la première intrigue et effectivement elle forme un tout cohérent. Il a l'impression de devoir apporter quelques éléments absents dans l'histoire suivante pour qu'elle puisse être prise au premier degré. Sous cette réserve, elle s'avère agréable, ainsi que la troisième.