li s'est répandu bien des idées fausses sur Gérard; mais, à mon avis, la moins exacte de toutes est celle qu'on s'est faite de cet artiste comme peintre de portrait. Je ne parle pas tant ici du mérite des nombreux ouvrages qu'il a produits en ce genre que du parti qu'il prit de s'y adonner et du rapport dans lequel il se maintint avec ses modèles. Tant que sa vogue subsista, on jugea sévèrement son caractère, et quand la mode eut adopté d'autres favoris, on traita son talent sans indulgence.
Vers le milieu du dernier siècle, le goût et la pratique de la peinture étaient tombés en France dans un état singulier. Une société qui s'amoindrissait chaque jour refusait de voir tout ce qui pouvait rappeler sa précédente grandeur. La recherche d'une vie de plus en plus commode et voluptueuse prescrivait aux arts une direction analogue: la familiarité ou même l'inconvenance des sujets étaient, aux yeux des puissants du jour, une cause de recommandation. On ne voulait plus que de petits tableaux pour les petites maisons et les petits appartements.
Quand des hommes consciencieux en sont venus à ce degré d'aveuglement, il ne faut plus chercher dans les détails et les accidents du goût les vraies causes de la décadence de la peinture: c'est à la peinture elle-même qu'il faut demander raison de sa chute.