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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Eprouvante lecture que ce récit sur le vif, entre 1941 et 1943 alors qu'il était correspondant de guerre pour le Corriere de la Sierra, avec ce pas de côté du journaliste qui s'offre la liberté de la littérature pour raconter sa guerre, telle qu'il l'a vécue et ressentie.
Même si la lecture est parfois fastidieuse, j'ai beaucoup aimé la focale choisie qui m'a apporté un nouvel éclairage sur la deuxième guerre : à travers une suite de tableaux situés d'ailleurs dans des pays auxquels je suis peu habituée sur cette période (Laponie, Ukraine, Pologne, Italie), Malaparte pose sa "caméra" du côté du gotha des puissants, dignitaires nazis, diplomates, familles royales exilées, et donc essentiellement du côté de ceux que la guerre n'atteint pas. Il écoute leur babillage ahurissant, contemple leur morgue et parfois "passe derrière la caméra" pour leur donner la réplique en déroulant son autre film, celui douloureux fait de ces scènes de misère, de violence et d'abjections qu'il a vues et vécues sur les différents terrains d'opérations qu'ii a couvert.
Malgré la sensation que l'auteur se donne souvent le beau rôle, j'ai trouvé fascinant et enrichissant cet angle de vue sur la deuxième guerre mondiale qui apparait comme une sinistre farce, dont la désespérante dérision est étonnamment amoindrie par la scène finale sous les bombes tombant sur Naples, d'une humanité douloureuse mais chargée d'espoir.
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Depuis déjà quelque temps dans ma bibliothèque, je me suis enfin décidée à lire Kaputt de Malaparte. Missionné en tant que correspondant de guerre en 1941auprès des allemands, des finlandais et des roumains, Curzio Malaparte est envoyé sur les différents fronts de l'est, sous l'uniforme italien. La personnalité de Malaparte est telle qu'il s'était déjà fait distingué de façon assez sévère pour son franc-parler, ecopant de sanctions allant du renvoi de la Storia où il travaillait, à des emprisonnements pour subversion, il écrivit donc Kaputt à l'insu de ses supérieurs. L'histoire du livre est déjà un roman à lui seul, et la liberté de ton qui va de l'humour grinçant à la critique acerbe s'accommode magistralement avec ses récits.


Malaparte a recueilli ses notes en six parties dont les titres sont des animaux : les chevaux, les rats, les chiens, les oiseaux, les rennes et les mouches, correspondant à des séjours différents. Les récits vont de la Finlande, l'Ukraine, la Roumanie, l'Allemagne à la Pologne. Passant des salons mondains où il est reçu de façon très officielle, aux tables du Reichsminister de Pologne, il décrit ce milieu aristocratique un peu décalé, émaillant ce récit d'anecdotes burlesques et de descriptions d'une violence inouïe. Il raconte entre autre le Pogrom de Lasi en Roumanie, le ghetto de Varsovie et un kolkhoze ukrainien. Pourquoi ces animaux ?Les chevaux sont ceux qui prisonniers de la glace, sont morts laissant leur tête à la discrétion des soldats russes, qui jouaient avec comme dans un manège. Les rats sont les juifs qui creusaient sous l'enceinte du ghetto de Varsovie, pour trouver quelque chose à manger. Les chiens étaient ceux qui étaient utilisés par les ukrainiens, qui les chargeaient d'explosifs pour aller au devant des lignes de front... Beaucoup de choses donc sont racontées, qu'on ne connait pas toujours, avec des descriptions de paysages splendides, des silences, des peurs, des odeurs mêlant terreur et émerveillement dans une réalité tragique.

Le critique contemporain Gianni Grana note : " On pourrait se demander si un autre livre européen a pu conjuguer à ce point autant de reportage vécu, de métier littéraire et d'ampleur d'invention ; autant de génie évocateur, de sens poétique complexe, dans la conscience de la crise et de la défaite de l'Europe, dans le massacre de ses peuples et la chute définitive de la civilisation chrétienne et moderne, - européocentrique "

Il y a des parentés d'écorchés vifs entre les vies et les oeuvres de Louis-Ferdinand Céline et de Curzio Malaparte car ils ont une même fascination face a l'horreur du monde, on penserait même quelque fois à une certaine forme de complaisance dans la description de la mort. le parcours idéologique de Malaparte est étonnant, partant du fascisme italien à la demande d'adhésion au parti communiste. Et il détestait les italiens qui en échange ont rangé ses oeuvres au purgatoire.

« Napoléon s'appelait Bonaparte, et il a mal fini : je m'appelle Malaparte et je finirai bien "
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Curzio Malaparte fut, durant la seconde guerre mondiale, correspondant de guerre sur le front de l'est. Il nous retranscrit donc, entre fiction et réalité, toute l'horreur barbare de la guerre.


Le narrateur parsème différents dîners mondains auxquels il a été convié, (les autres invités étant hauts dirigeants nazis et des aristocrates) d'anecdotes fameuses souvent cruelles ou parfois étranges.
On passe d'une visite du ghetto de Varsovie au massacre d'enfants lettrés dans un kolkhoze en Ukraine.

L'image la plus marquante demeure celle de ces chevaux morts piégés dans un lac gelé.
« Le lac était comme une immense plaque de marbre blanc sur laquelle étaient posées des centaines et des centaines de têtes de chevaux. Les têtes semblaient coupés net au couperet. Seules, elles émergeaient de la croûte de glace. » On dirait le tableau d'un peintre vaguement surréaliste, d'ailleurs un certain nombre sont cités dans le livre.

Toute l'histoire se déroule débute en 1941 et se termine en 1943 à Naples.

C'est une façon originale de traiter de la guerre et de la monstruosité qu'elle engendre que de se faire le témoin direct plutôt que de romancer d'une façon plus classique et aussi de se garder de toute autocensure. La seule question que l'on peut se poser est la suivante : où se situe la frontière entre la réalité et la fiction. Les descriptions nous semblent si vraisemblables qu'il est impossible de répondre à cette question. Kaputt est en fin de compte l'exact opposé du « Petit prince » de St Exupery, ils nous parlent tous les deux de la même chose; de l'humanité s'écroulant dans une violence insensée. Sauf que le premier choisi une manière plus poétique tandis que le second s'est fait le chantre d'une réalité crue.
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Kaputt est tout à la fois un récit, un témoignage autobiographique mais également un recueil de réflexions, écrit par Curzio Malaparte, alors qu'il est correspondant de guerre, mandaté par le ''Corriere della Serra'' durant la Seconde Guerre mondiale.

Cet ouvrage qui mêle les genres, oscille entre la description froide, voire clinique de situations et de personnages terrifiants, et les témoignages emplis de compassion pour des victimes que l'ordre nazi va broyer impitoyablement, laissant émerger une émotion tangible chez le narrateur.

Document précieux et incontournable pour qui s'intéresse au second conflit mondial, Kaputt met également en lumière la complexité de l'auteur dont le talent littéraire indéniable n'exclut pas une ambiguité sous-jacente.

Ceci rend difficile le jugement à porter non pas sur ce livre aux qualités évidentes (cf. les descriptions tout à fait saisissantes de personnages et de situations vécues par le narrateur), mais sur un écrivain qui provoqua des réactions très diverses, et dont le parcours ne cessa de susciter des interrogations, sur sa personnalité et ses opinions.
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" Gege1968" nous dit que c'est livre référence sur la seconde guerre mondiale.. Je confirme (presque) : c'est un livre fort (mais l'Oiseau Bariolé, de Kosinski, lu trop jeune sans doute, m'avait presque plus impressionné). Passant de Tendre Stocks de Morand ( cité p.274) et La mésaventure espagnole, de Lucien Bodard à Kaputt, j'ai eu quelques agacements , au début du livre, à relire des scènes avec des têtes + ou - couronnées dans des palais ornés de références culturelles qui m'étaient, pour l'immense majorité d'entre elles, inconnues, mais heureusement ( si je peux dire..) assez vite le récit change de propos pour des "scènes de guerre" - ou plutôt des scènes de bas-côtés de la guerre - qui relatent, avec à la fois pudeur et froideur, quelques atrocités de celle-ci. le livre alterne récits de soirées, ou nuits, de dîners, avec des officiels, chefs allemands ou diplomates, de Ministres ou secrétaires d'ambassade ( et leurs femmes) de tous pays et descriptions de faits que je qualifierais " d'égoûts.". Il (le livre) aurait gagné si les récits "élégants" eussent été moins longs et fréquents (d'où 4 * et non 5), mais Malaparte alternaient sur le terrain entre les 2 et c'est le précieux moyen d'avoir une idée des réalités des "chefs de guerre" et de la périlleuse crête sur laquelle l'écrivain-journaliste-diplomate se trouvait lors de ces échanges avec, par exemple, "le roi allemand de Pologne", entre être assez courageux pour faire comprendre ce qu'il pense des actes commis et assez prudent pour ne pas à nouveau s'attirer des ennuis (expulsion, arrestation ou emprisonnement (Malaparte avait déjà fait 5 ans de prison avant la guerre). Les descriptions, habilement écrites, d'épisodes allant de la cruauté à l'horreur, sont nombreuses et font souvent référence à des animaux (d'où le titre des parties), de manière à la fois réelle (les chiens) et métaphoriques (les mouches). Autant de scènes qui feraient de puissantes scènes de film..Pour l'analogie avec le cinéma, un lecteur ( Woland) a évoqué Coppola et Fellini. D'accord à la rigueur, pour, peut-être Fellini pour la fin du livre à Naples ( mais il y a du burlesque chez Fellini, pas chez Malaparte) et pour Apocalypse Now par l'importance du mot "horreur", mais c'est davantage au Visconti des Damnés par exemple, ou encore plus au Tambour de Schlöndorff ( sorti la même année qu'Apocalypse) que m'a fait penser ce livre ou encore le Pianiste de Polanski (pour le ghetto)..
L'écriture : Malaparte use souvent de répétitions sans que cela soit gênant et la manière dont il décrit la nature, les paysages, les ciels, les fleuves.. est assez surprenante je trouve, utilisant des images dans des domaines a priori éloignés (il compare souvent, par exemple, le ciel a des tissus), le tout donnant un effet assez original mais qui, selon moi, épaissit trop le livre).
L'impression qui me reste est - outre les horreurs de la guerre - que Curzio Malaparte était un sacré bonhomme et la sorte de Bunker-villa épurée, minimaliste dans la démesure, qu'il s'était faite construire au bord d'une falaise à Capri (celle que Godard a utilisé dans le Mépris) est bien à cette image que j'aie de lui et prend tout son sens à la lecture de ce puissant (par moments) récit : le bout du monde d'un homme de grande culture, intelligence, lucidité et courage, qui a vu trop d'horreurs et qui désire se retirer dans un paysage rugueux, tourmenté, tragique et grandiose, à l'écart tout au bord d'un abîme face à la mer, pour que sa contemplation le distrait de ses souvenirs ou pour s'y laisser chuter..
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Ce n'est pas seulement un livre de témoignage sur la seconde guerre mondiale. C'est un témoignage écrit par un écrivain, journaliste et diplomate.
Malaparte est correspondant de guerre sur le Front de l'Est et écrit des articles polémiques sur son expérience du front. Il cache le manuscrit de Kaputt chez des amis sûrs et finit par le publier dès 1943. On retrouve, comme chez Marc Bloch, les impressions de l'auteur sans recul temporel sur les événements.
J'ai vraiment aimé ces chapitres plein de d'images cauchemardesques décrites par l'auteur avec de plus en plus de détachement au fur et à mesure de l'avancée dans la guerre. Outre les informations historiques (comme par exemple la place de la langue française dans les sphères diplomatiques avant guerre), le style recherché, plein de tournures surannées et de jeux de construction a ajouté un réel plaisir à ma lecture.
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"Kaputt" ça veut dire la fin, la fin inéluctable de la politique nazi qui dans une violence barbaresque au nom d'une ideologie insensé ne pouvait que se terminer dans le chaos, et ne se raconter que dans l'absurde tant toute cette horreur semble irréelle.

Le narrateur dès 1941 avait déjà saisi cet inévitable déclin, correspondant pour un journal Italien, il obtient les accréditations pour assister a cet tragédie en nous offrant un point de vue inédit sur l'Europe en guerre.
Il assiste a des diners mondains avec de hauts dignitaires nazis ou il démontre les contradictions de la politique nazi avec ironie comme ce passage a propos des conditions de vie dans le ghetto de Varsovie :

"-Pour ce qui est de la saleté, continua Frank, il est indéniable qu'ils vivent dans des conditions déplorables. Un Allemand n'accepterait jamais de vivre dans cet état là ! Même pas pour plaisanter ! Et il répéta en riant assez fort : même pas pour plaisanter !
- Ce serait, fis-je, une plaisanterie amusante.
- Un Allemand ne serait pas capable de vivre dans ces conditions, dit Wächter.
- le peuple Allemand est un peuple civilisé, déclarai-je.
- Ja natürlich, dit Wächter."

Il assiste impuissant au déchainement de haine comme lorsqu'il décrit le pogrom de Jassy en Roumanie, il peint des tableaux terribles contrastant avec son écriture élégante comme lorsqu'il découvert ce lac rempli de chevaux que le froid a emprisonné et qui ont encore dans leurd regards la lueur glaçante de la terreur, les terribles chiens mines Russes, dressés pour exploser sous les chars Allemands, l'étrange "panier d'huîtres" du chef des ustachis Croates, la pêche au saumon au dénouement absurde d'un haut gradé nazi, le destin tragique et injuste des jeunes Juives de Soroca, ou encore l'histoire de l'oeil de verre ou le face a face entre un officier nazi et un enfant partisan russe :

L'officier Allemand :
"- Écoute j'ai un oeil de verre. Il est difficile de le reconnaitre du bon. Si tu peux me dire tout de suite, sans réfléchir, lequel des deux est l'oeil de verre, je te laisse partir, je te laisse en liberté.
- L'oeil gauche, répond aussitôt le garçon.
- Comment as-tu fait pour t'en apercevoir ?
- Parce que des deux, c'est le seul qui ait une expression humaine.


Kaputt est le témoignage a chaud d'une barbarie en cours et d'une tragédie a venir ou la fiction est souvent difficile a discerner de la realité tant les évenements qui y sont racontés semble sortir d'un improbable cauchemar, et ou se dégage l'impuissance de l'homme a comprendre l'engrenage infernal qu'il a crée, car devenu simple rouage d'une machine impossible a arrêter.

Quelques défauts tout de même mais totalement subjectif, j'ai trouvé la lecture en dents de scie, des passages mémorables comme ceux que j'ai cités plus haut et des passages qui m'ont parfois beaucoup ennuyé comme le récit de la vie mondaine Italienne a travers le chapitre "golf Handicaps" et certaines description un peu longue mais rien qui ne nui a l'ensemble du récit.

Bonne lecture !
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Livre qui traite de la 2e guerre mondiale. L'auteur y a travaillé comme reporter. Dans ce livre, il accumule une série de constats. Il se présente comme le compte-rendu de tout ce que Malaparte a constaté et vécu sur le front de l'Est, aux côtés des forces armées engagées contre l'Union soviétique, et dans les pays envahis par l'Allemagne nazie. Il ne s'agit pas de mémoires, ou de souvenirs quelconques. Malaparte évoque à hauteur d'épaules la guerre en Europe, puis en fait le cadre des multiples scènes et situations parfois invraisemblables.
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Ce livre n'a pas d'histoire à proprement parlé mais regroupe dans 6 thèmes aux titres d'animaux (les chevaux, les rats, les chiens, les oiseaux, les rennes et les mouches) des scènes de la seconde guerre mondiale. Poétiques, surréalistes ou exagérés les récits ne reflètent pas l'exacte vérité mais peu importe, ce livre contient des pages d'une rare beauté. Certains passages moins intenses (notamment les dialogues dans les salons ou les diners) alourdissent quand même sa lecture mais d'autres sont si mémorables que l'on pardonne facilement à l'auteur. A lire plusieurs fois pour en découvrir toutes les subtilités.
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