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sur 365 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
L'oeil du léopard/ Henning Mankell
Hans Olofson à la mort de sa femme Janine dont il se sent indirectement responsable décide de réaliser le voyage qu'elle rêvait de faire vers l'Afrique, parvenir à Mutshatsha en Zambie sur les traces d'un missionnaire suédois nommé Harry Johanson.
Nous sommes en 1969. L'Afrique est un continent meurtri et blessé que Hans bien que fasciné va avoir bien du mal à comprendre au travers de la Zambie indépendante depuis 1964 avec pour seul bagage un drapeau et une monnaie, et abandonnée par la majorité des Européens qui y vivaient durant la colonisation. Ceux qui sont restés sont emprisonnés dans leur racisme à l'égard de Noirs obéissants mais qui cultivent en sourdine la haine du Blanc
C'est la peur qui étreint en permanence Hans dans ce pays où l'insécurité, la violence et le chaos sont omniprésents. Il se souvient de la parole de son voisin Werner : « La première chose à faire quand on prend possession d'une ferme dans ce pays, est de choisir l'endroit où on veut être enterré… »
Hans est quelque peu idéaliste et les paroles de Joseph, l'employé zambien de Werner lui rappelle la réalité de l'action des missionnaires chrétiens : « Nous voulons bien croire en un dieu étranger si on nous donne des vêtements et de la nourriture…Nous avons nos vrais dieux qui ne voient pas d'inconvénient à ce que nous joignions nos mains deux à trois fois par jour… » Hans va découvrir aussi le chant de la corruption dans toute sa splendeur dès qu'une démarche administrative est requise pour obtenir son droit de séjour.
D'aventure en aventure, Hans rencontre Judith, une fermière qui , veuve, a bien du mal à s'en sortir pour diriger sa trop grande entreprise pour elle seule. Il accepte de l'aider et va tenter de mettre en oeuvre ses idéaux de justice avec les Noirs. de fait, il ne comprend pas pourquoi il a accepté de se lancer dans une si grande aventure avec Judith, un véritable défi, alors qu'il éprouve une envie intense de rentrer dans son pays et laisser derrière lui ce continent qui lui paraît insaisissable, un continent qui n'est pas une entité dans laquelle on peut pénétrer avec des idées toutes faites. Difficile d'affronter les dieux et les ancêtres qui ont autant d ‘importance que les vivants, avec des vérités européennes. Il est un voyageur de l'angoisse dans sa solitude.
le récit débute en Afrique avec un chapitre sur deux évoquant son enfance puis son adolescence en Suède et l'autre son arrivée et son installation en Zambie. On apprend comment de façon incroyable il a connu Janine en 1957, joueuse de trombone, une personne d'une humanité étonnante qui va le faire rêver de l'Afrique tout en lui apprenant à danser et lui faire connaître la mémoire de Harry Johanson le missionnaire enterré à Mutshatsha .
Après le départ de Judith, il veut révolutionner le fonctionnement de la ferme avec des rêves idéalistes comme bases de réflexion, mais il comprend vite qu'il n'arrivera jamais à transformer sa ferme en un exemple politique. Il réalise qu'il s'est perdu dans des illusions et qu'un Blanc qui se trouve en position de supériorité ne peut pas aider les Africains à développer leur pays. Finalement il juge qu'il est juste bon à réaliser le rêve de quelqu'un d'autre, celui de Janine : aller à Mutshatsha alors devient une idée sacrée à laquelle il s'accroche, la plus fragile des finalités.
Hans, en Afrique depuis dix huit ans à présent, est sujet à de terribles crises de paludisme qui lui donnent des hallucinations et lui font voir un oeil de léopard qui veille sur lui. Ou bien c'est l'oeil de Janine qui le regarde du fond du fleuve où elle fut engloutie il y a vingt cinq ans. Il se sent encerclé par des hordes de bandits qui l'attendent dans la nuit, et son second, Luka, a coupé l'électricité et la ligne téléphonique. Hans reste éveillé la nuit, ses armes près du lit. Prémonitoires hallucinations en cette année 1987 ?
C'est son ami journaliste Peter Motombwane qui lui fait réaliser qu'il n'a rien compris : « Tu as tort quand tu affirmes que je ne suis pas superstitieux. Je le suis. Ma raison me détourne de la superstition mais elle est enfouie en moi. On peut s'installer dans un pays étranger, comme toi, on peut y gagner sa vie et donner une forme à son existence, mais on ne pourra jamais se défaire entièrement de ses origines. » Hans comprend que l'homme blanc en Afrique participe à une pièce de théâtre dont il ignore tout. Les Noirs sont les seuls à connaître les répliques.
Combien de temps Hans va-t-il tenir, lui qui est parti en Afrique porté par le rêve de quelqu'un d'autre, puis s'est retrouvé à gérer une ferme et noie sa solitude dans l'alcool et titube dans le vide des pièces de sa ferme. Et alors il crie pour personne dans un éclair de lucidité : « Il faut que je parte d'ici. Je vais vendre la ferme ou la brûler, il faut que je m'en aille. » Mais le pourra t-il ? N'est-ce pas trop tard déjà ?
Ce magnifique roman au climat anxiogène et au style direct a été publié en 1990. Henning Mankell (1948-2015), champion du roman policier à ses heures, est un écrivain suédois engagé et il partagea sa vie entre la Suède et le Mozambique.

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Apprivoiser l'Afrique est une bien lourde tâche pour un Suèdois à la recherche de sa propre identité. Mankell réussit avec brio à poser le problème du colonialisme autant dans sa dimension sociologique que psychologique. L'alternance entre la période africaine de Hans Olofson et le cheminement qui l'a précédé en Suède aide le lecteur à comprendre la valse hésitation de la première à l'aide des clés fournies par le deuxième. L'auteur connait bien l'Afrique pour y avoir oeuvré et demeuré, aime de toute évidence ce continent tout en restant implacablement lucide quant aux tensions auxquelles il est soumis. Sous le couvert d'un roman, il pose des questions fondamentales qui incitent à moult réflexions. Une lecture enrichissante!
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1987. Dans sa maison, à Mutshatscha en Zambie, Hans Olafson est en proie à une violente crise de paludisme. La forte fièvre ranime ses souvenirs.
Il revoit son arrivée en 1969 dans ce continent dont il ignorait presque tout, sa rencontre avec un couple de fermiers racistes puis celle avec Judith, une Anglaise à la tête d'une exploitation avicole qui avait sollicité son aide. Il avait accepté sa proposition, pensant ne rester que quelques mois, mais 18 ans plus tard, il a repris la ferme à son compte et il est toujours là. Mais y restera-t-il encore longtemps ?
Ses souvenirs d'enfance remontent à la surface : dans leur maison en bois, après le départ de sa mère, la vie avec son père, ancien marin devenu bûcheron ; l'amitié qui le liait à Sturge, le fils du juge ; la Femme sans Nez, cette femme mutilée par un chirurgien ivre, et les soirées inoubliables qu'ils passaient tous les trois, ensemble.
C'est pour Henning Mankell l'occasion d'établir un état des lieux peu réjouissant de ces pays qui venaient d'accéder à l'autonomie : animaux en voie de disparition, économie dégradée, misère, sorcellerie et superstitions, corruption, haine, racismes, violences, meurtres, guerres ; les colons blancs, riches et puissants, méprisent les Noirs, main d'oeuvre bon marché qu'ils exploitent et réduisent quasiment en esclavage, et les Noirs détestent les Blancs, ces hommes venus du Nord chez eux leur imposer leurs lois… Et avec Hans il se pose la question du droit que peut représenter l'antériorité d'un peuple sur un autre : les Africains sur les Blancs, les Indiens sur les colons européens…

Peinture sans concession de la société africaine. Roman noir mais roman superbe qui ne laisse pas indifférent. Quand le livre est fermé, ses mots résonnent encore.

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Connaissant assez peu l'oeuvre de Henning Mankell, c'est plutôt l'Afrique qui m'a attiré dans ce livre et ce fut une très belle découverte. Au départ, la Suède et l'indécision du héros pour entreprendre ce grand voyage vers la Zambie. A son arrivée, il se rend compte de la pérennité du mal à travers le monde : racisme, exploitation de l'homme par l'homme, rivalités, assassinats. Et puis il y a l'Afrique dont on perçoit sans cesse la lourde atmosphère, envoûtante et dangereuse. Un livre assez noir et plein de désillusion.
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Quel livre !
Quel coup de coeur !
Comment ne pas faire le parallèle entre la vie d'Henning et celle de son personnage Hans !

Ses parents ont divorcé quand il avait un an. Il nous propose au début du roman une analyse de ce qu'a pu vivre son père abandonné par sa femme, et comment lui, le petit garçon a essayé de comprendre pourquoi sa mère est partie un soir, l'abandonnant lui aussi ...
Ce départ, pourquoi ? Hans n'aura pas non plus la réponse et passera une partie de sa vie à essayer de comprendre ce qui n'est pas compréhensible pour un petit garçon.

Il me semble que ce livre est le premier écrit par Henning sur l'Afrique....
"Leopardens öga" a été publié en Suède en 1990, Henning a découvert l'Afrique en 1972. Dans "l'oeil du léopard", Hans part découvrir l'afrique la Zambie en 1969.
Peut on supposer que nous lisons la ou les premières réflexions qu'Henning a pu se faire en découvrant ce continent ?
Hans nous fait partager la découverte de ce lieu avec ce que cela peut traduire de bouleversements dans sa vie.
Les motivations d'un jeune homme qui a besoin de se confronter à un tout autre monde que celui qu'il connaît. C'est une façon comme une autre de remonter le temps et de retrouver l'origine du monde, revenir aux valeurs essentielles et choisir son chemin de vie.

"L'oeil du léopard", ce léopard que jamais nous ne rencontrerons que dans nos rêves ou dans nos cauchemars, l'oeil de la conscience des valeurs qui nous tiennent debout.
Pour moi le Must de ses romans traitant de l'Afrique et de notre rapport avec ce continent.
L'Afrique et les africains avec des façons de vivre différentes des nôtres. Les blancs colonisateurs, découvreurs d'un nouveau monde, ont voulu façonner une autre société pour que leurs réalités ressemblent à leurs rêves mais c'est du grand n'importe quoi ... que des blancs obligent les noirs à accomplir des travaux incongrus ... ils ont transformé l'Afrique et les africains !
Il est malheureux qu'Henning ne puisse plus répondre à nos questions ?

Laissons le nous rappeler,
"Je sais que je suis blanc et beaucoup trop visible. "
"Je suis seulement de passage, je ne suis ni complice ni coupable "
"Il y a une chose que j'ai comprise au bout de toutes ces années, c'est que l'Afrique a été sacrifiée sur l'autel occidental, qu'elle a été dépossédée de son avenir pendant une ou deux générations. Mais pas pour plus longtemps. Ça aussi je l'ai compris...."
Puisses tu cher Henning avoir raison !
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Quel plaisir de retrouver la plume d'Henning Menkel ! Il possède l'art de nous entrainer avec lui dans son univers, qu'il soit quelque part dans les brumes des lacs suédois ou dans les plaines chauffées à blanc de l'Afrique. "L'oeil du léopard" nous plonge dans ces deux atmosphères à la fois, dans un étonnant chaud-froid littéraire. le roman raconte la vie de Hans Olofson qui, en février 1956, a douze ans. Sa mère a quitté le foyer et il vit seul avec son père dans un village du nord de la Suède. Son père Erik a été marin sur différentes mers du globe et en garde une forte nostalgie. En attendant de pouvoir retrouver un emploi de marin, il exerce le métier de bucheron.

Hans un jour réalisera le rêve de voyager à son tour et il atterrira à Lusaka, la capitale de la Zambie. de là, pour accomplir un voeu, il se rendra en pleine brousse dans une mission fondée jadis par un suédois. Puis les circonstances le feront rester et s'installer dans ce pays, à la tête d'une ferme de production d'oeufs où travaillent deux cents noirs.

Toute la magie de ce livre tient dans l'art de conter de son auteur. Alternant les chapitres sur la jeunesse de Hans avec ceux décrivant sa vie africaine, on est soumis à ce roulis de babord à tribord et emporté en haute mer sur quelque splendide goélette. Au fil du livre, les chapitres concernant l'Afrique se font plus prégnants car les événements s'y précipitent et la tension y est de plus en plus forte. Bien-sûr on repense à la ferme africaine de Karen Blixen qui se situait un peu plus au nord, au Kenya. Mais si la baronne Blixen a dû faire face à d'importants problèmes matériels, climatiques et économiques, son récit présente une situation presque idyllique en comparaison de ce que va affronter Hans Olofson dans sa ferme de Mutshatsha, non loin de Kitwe, vers la fin des années 80, quand les fermiers blancs deviendront la cible de groupes de rebelles noirs.

On sort de ce livre étourdi, envoûté, on se prend à redouter la prochaine crise de paludisme, à écouter le soupir de l'hippopotame, à surveiller l'oeil du léopard, à se demander si l'on ne devrait pas plutôt retourner au pays, dans les frimas du nord de la Suède. Henning Mankel, sacré sorcier !
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C'est un voyage dans le temps que nous propose ici Mankell. On découvre la vie de Hans Olofson depuis son jeune âge.
Bien que sa vie ne semble être qu'une accumulation de hasard, il se fait une vie d'abord en Suède puis en Afrique.
Véritable critique sociale, c'est un face à face terrible, racial, politique qui nous est exposé avec force de sensations, de psychologie ...

A lire
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Henning Mankell nous offre ici une magnifique immersion dans les résidus du colonialisme en Afrique et tente de dresser un tableau de ce pays où s'exerce la violence, la corruption, l'incompréhension entre deux cultures, la noire et la blanche. Pris dès le départ entre l'enfance du héros en Suède et sa vie en Zambie, on plonge dans son passé tourmenté au gré de ses crises de paludisme dans lesquelles les hallucinations côtoient les souvenirs. Un roman sombre, profond et violent où l'ambiance pesante et moite colle parfaitement avec le récit et où l'auteur réussit à ne pas porter de jugement sur les graves problématiques exposées au fil des pages. Forte en émotion, intense, enrichissante et engagée, cette lecture fait partie de celles qu'on n'oublie pas!
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Magnifique immersion dans les résidus de colonialisme en Afrique noire. Nous accompagnons un jeune suédois ne sachant que faire de sa vie mais qui s'est donné un point d'honneur à accomplir le rêve d'une jeune femme qu'il a aimé : voir l'Afrique. Parti pour quelques jours, il y passera des années et va nous permettre de tenter de comprendre les relations entre blancs et noirs au coeur du Zambie en pleine période de prise de son indépendance.
L'auteur parvient à merveille à nous faire ressentir toute la difficulté de communication entre anciens colons blancs et le peuple africain.
Livre magnifique
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Ce mois-ci j'ai lu ce livre car il m'a été proposé par une amie et je n'ai pas été déçue bien au contraire. Dès les premières lignes du roman l'auteur nous fait rentrer dans le vif du sujet. Son personnage Hans Olofson nous fait partager son univers plein d'angoisse en nous décrivant une crise de paludisme. On entre instantanément dans l'ambiance africaine en partageant ses frissons.
Tout d'abord il a été balloté par la vie, sa mère est partie lorsqu'il était très jeune, il a été élevé par son père, ancien marin devenu alcoolique. Il veut d'une autre vie, il désire devenir l'avocat des circonstances atténuantes.
Après avoir perdu ses deux amis les plus chers, Hans décidera de partir sur les traces d'un missionnaire en Zambie. Il part donc pour quelques semaines à Mutshatsha sur les traces du fameux missionnaire tant aimé par son amie de coeur Janine (qui n'a pas eu une vie facile elle non plus), finalement il restera en Afrique 19 ans après avoir accepté de reprendre la ferme de Judith Fillington.
Mankell nous peint une Afrique post-coloniale malade où règne la peur, la violence, la haine et les tensions se montrent de plus en plus fortes entre les fermiers blancs et les noirs.
C'est un roman fort en émotion, profond, violent, on partage les souffrances de Hans à travers ce pays qui est l'Afrique et qui souffre aussi bien économiquement qu'humainement.
Nous passons d'un pays à un autre avec aisance tout au long des différents chapitres sans aucune gêne, (de la suède à l'Afrique). Malgré le désordre et le chaos indescriptible de l'Afrique, ce continent m'a attirée car Mankell le connaît bien par conséquent il sait en parler et le faire aimer.
C'est un très beau roman réaliste que nous livre ici Mankell sans aucun jugement de sa part.
A lire absolument
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