Réflexions sur la mort, le dérisoire de la vie,
le sang versé, la religion qui sert et ne sert,
le tout avec un souffle certain, un lyrisme
souvent coloré de noir.
L'angoisse existentielle affleure,
et saigne abondamment chez ce
poète.
André MARISSEL, plonge, replonge
et nous plonge " au fond de ça ",
nous donnant à connaître de ses
tourments les plus profonds, ceux
des profondeurs de l'âme.
Ainsi :
" PLONGER…
Plonger, plonger encore et plonger au fond de ça,
Au plus profond de ça, c'est là ton aventure
Plonger encore et creuser jusqu'au nerf
Jusqu'à la foudre sans cassure,
Cette mie des morts qu'on bêche et tasse
Plonger, plonger, tant que ta vie
Au plus profond suivra la trace
Du sang rongé qui te menace,
Et des termites de l'outrage
Sous les cadavres des murs gras ;
" PLONGER… encore
— Plonger, creuser et coudre à vif
La plaie brûlante des viscères,
Naître à la terre, la graver
Dans cette main qu'elle a forgée ;
— Plonger, plonger, boire à longs traits
Le lait sévère des squelettes,
Baiser la bouche et les yeux fous
En bas, au plus profond des fours
Vers le martyre et l'au-delà ;
— Briser le sexe d'un dieu sec,
D'une momie qui ne respire
Que d'autres corps incarcérés,
Derniers fagots qu'on a jetés
Sur le bûcher immense du néant…
— Plonger, creuser : tu es dedans,
L'enfer referme son cratère,
En bas, plus bas, serre les dents ;
Ta tête tourne, poudrière
À la racine des prisons !
PLONGER : toujours
Plonger, plonger encore et plonger au fond de ça,
Plonger encore au plus profond,
Puisqu'au-dessus les hommes clouent
Le Christ aux poutres des casernes,
Puisque tes doigts sont écrasés.
" ADIEU
…
Je m'élance et je m'enlise.
Adieu ! les cieux n'ont pas d'échelles,
Mains écrasées que l'aube scie
Aux poignets comme à l'horizon ;
Mais les forêts, sans illusion,
Pourchassent le pluie de cigales
Qui tombe des étoiles noires ;
Aucun des dieux n'a de tison !
" MÉMOIRE
…
Meurs ! ô poème dérisoire !
Rejoins l'enfance que je nie,
Ce temps de l'Épiphanie
Dans les lointains de ma mémoire !