Une Lune Comanche avant le crépuscule
La « Lune Comanche », c'est traditionnellement la lune d'automne, celle qui voit les tribus Comanches fondre sur le Mexique pour « tuer, piller et ramener des prisonniers ». Mais le grand chef redouté Buffalo Hump sait bien que le temps de son Peuple est terminé. Les Blancs sont devenus trop nombreux, trop armés et organisés. Avant que cette fin arrive, il décide de lancer une grande attaque inattendue, lors de la lune froide de février.
Voici donc le deuxième volet de la série Lonesome Dove. (si l'on s'en tient à l'ordre théorique de lecture en considérant les années évoquées- car sinon, Lune Comanche a été écrite après Lonesome Dove et Les Rues de Laredo).
Lune Comanche est le parfait trait d'union entre
La Marche du Mort et Lonesome Dove.
D'abord parce qu'on en retrouve les principaux personnages : les deux (anti) héros de la série, Woodrow Call et Augustus McCrae, devenus plus matures (enfin, pour McCrae, cette notion reste relative), les autres principaux rangers, l'éclaireur Famous Shoes, Clara Forsythe l'éternelle fiancée, mais également les redoutables Comanches Buffalo Hump et Kicking Wolf….
Ensuite parce que le décor reste le même : ces paysages entre Texas et Mexique, abritant de terribles déserts, des canyons dangereux, des fleuves de boue…
La trame du récit est également connue.
Tout comme
La Marche du Mort dont l'histoire se situe quelques années auparavant, ce livre repose essentiellement sur le récit d'expéditions des Texas Rangers aux alentours de la frontière mexicaine, vers 1850. Et des expéditions peu suivies de succès puisque comme le dit Gus McCrae : « On a l'habitude maintenant, de faire des expéditions pour rien. C'est presque toujours le cas. On chevauche dans un sens, et puis on fait demi-tour et on repart dans l'autre. »
Pourtant, s'il suit grosso modo la même construction, Lune Comanche s'avère plus riche encore que
La Marche du Mort, notamment en entrelaçant les expéditions de Gus et Woodrow, de récits autonomes faisant la part belle à d'autres aventures individuelles, mais également en exposant leurs histoires sentimentales qui se révèlent tout aussi bancales et erratiques que leurs longues courses à cheval.
Enfin, Lune Comanche prépare également la suite en réglant le sort de certains personnages tout en en introduisant de nouveaux et surtout, en faisant apparaître pour la première fois, la ville naissante de Lonesome Dove.
Ce livre est tellement riche qu'il se permet d'évoquer la guerre civile en pointillés ou de faire un saut d'une dizaine d'années, sans que le récit en souffre.
Une nouvelle réussite donc pour
McMurtry et son épopée à base de voyages aussi absurdes qu'initiatiques, fourmillante de détails, d'études de caractères, et d'humour.
Bien que le récit offre de quoi faire dresser les cheveux sur la tête (pratique pour le scalp), notamment pour les scènes de torture, il n'use jamais d'artifices pour en accentuer le caractère horrifique. Il écrit « à plat » et contribue ainsi à une unité de style d'une redoutable efficacité.
Une dernière remarque :
McMurtry est le plus grand auteur des fins de paragraphes. Chaque phrase qui conclut l'une des 44 parties, pourrait être citée en exemple.