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4,09

sur 101 notes

Critiques filtrées sur 1 étoiles  
Mehdi Cloé (née en 1992) – "Rien ne se perd" – Jigal / J'ai lu, 2016
– Prix Etudiant du polar en 2016, Prix Mystère de la critique en 2017

Un livre inadmissible, au sens le plus fort du terme (j'ai travaillé douze ans dans le 9-3, au contact de jeunes de banlieue).
En effet, sous le couvert d'un personnage central rendu sympathique, l'auteur matraque son point de vue simpliste à plusieurs reprises : les "flics" sont tous des assassins, ils passent leur temps à massacrer des jeunes de banlieue, et se voient ensuite innocentés par les juges.

Pour faire passer ce message simpliste, l'auteur utilise diverses ruses dont il est aisé de lister les principales.

Le personnage central, le narrateur, est un jeune enfant de onze ans prénommé Mattia, bien évidemment traumatisé par "les violences policières", mais aussi par les conséquences de ces scènes sur les adultes qui l'entourent, lesquels sont pratiquement toutes et tous en traitement psychiatrique (l'hôpital psychiatrique Charcot passe aussi à la moulinette du dénigrement). Évidemment, seule la psychologue, qui, comme par hasard, vient aussi de cette banlieue Verrière, et est donc – forcément – elle aussi traumatisée par des scènes de violence policière, s'avère compréhensive et tout plein gentille.
Remarquons en passant que la situation juridique de cet enfant est tout à fait in-vraisemblable : sa garde aurait été accordée à un jeune homme récemment sorti lui aussi d'asile psy, dénommé "Zé", sous prétexte que les parents de ce jeune homme seraient de puissants membres du système juridique honni.

Le rôle des juges est d'ailleurs récapitulé en page 189 : dans ce roman, elles et ils passent leur temps
"à envoyer en taule des tas de gens de Verrière qu'avaient pas fait grand chose (sic!), alors que le flic qui a tué Saïd, personne l'a condamné".
Cette thèse paraît quelque peu bizarre, lorsque l'on sait que la dernière marotte des jugettes consiste à casser les commissaires luttant efficacement contre les trafics de drogue, sous le prétexte qu'elles n'étaient pas prévenues et ne purent donc alimenter dans l'heure qui suit les colonnes du Canard enchaîné et autres gazettes à succès...

Parmi ceux que l'auteur appelle constamment "les flics", le "coupable" sera bien évidemment repentant, puisqu'il faut bien dans ce récit qu'il soit entièrement coupable : c'est "bien sûr" par pur férocité et racisme qu'il aurait agressé un jeune de banlieue qui n'était qu'en fuite. Et bien évidemment, quinze ans plus tard, ces mêmes flics entament une enquête clandestine, en dehors de toute procédure légale.

Quant au jeune "assassiné" par les flics plusieurs années auparavant, il s'agit bien sûr d'un gentil gamin de quinze ans, qui ne faisait jamais rien de "grave" puisqu'il se contentait d'avoir du shit sur lui et d'être positif au contrôle THC-cannabis (p. 216). Ces gentils jeunes n'avaient bien évidemment rien à voir avec le fait que la vitrine du centre social soit régulièrement défoncée (p. 312), et ce n'est vraiment pas leur faute si l'une d'entre elles finit par assassiner froidement le flic coupable (p. 317).
Pire encore, l'auteur glisse une liste de tous les jeunes ainsi "assassinés par les flics" (p. 187).
La comptabilité des victimes est toujours un exercice périlleux, voire odieux...
Il va de soi que la liste des policiers gravement blessés, voire incendiés, ne figure nulle part dans ce livre. de même qu'il n'est nulle part rappelé que la plupart des gamins de onze ans sont – à cet âge – déjà embrigadés dans le trafic de drogue par les caïds, lesquels terrorisent les habitants qui se voient obligés de servir de "nourrice".
Bien évidemment, il n'est pas non plus rappelé que certains de ces innocents jeunes gens torturèrent à mort Ilan Halimi, armèrent Mohamed Merah (Toulouse, 2012), et se livrent régulièrement à ces actes inadmissibles envers leurs concitoyens de confession juive.

Il y a fort à parier que – dans un prochain roman – cette dame nous offrira un bien joli roman sur la totale innocence des djihadistes partis couper quelques têtes en Syrie ou en Irak...

Qu'une personne écrive – avec talent, hélas – un tel roman pose déjà un problème, mais que d'autres se croient obligés de lui accorder des prix littéraires divers et variés montrent à quelle degré d'irresponsabilité peuvent culminer les cultureuses et cultureux...

Pour ce qui concerne la banlieue, mieux vaut se fier aux classiques que sont devenus les romans de Jonquet ("Ils sont votre épouvante et vous êtes leur crainte" "Jours tranquilles à Belleville"), Morgan Sportès ("Tout, tout de suite"), ou aux romans plus récents de Magyd Cherfi ("Ma part de Gaulois"), Bibi Naceri ("A l'arrache"), Rachid Santaki ("Les anges s'habillent en caillera").
On peut même s'intéresser au versant vécu par la police avec Olivier Norek ("Territoires")...

Et pour conclure sur ce roman, il n'est pas interdit de penser qu'il constitue une véritable insulte envers toutes celles et ceux qui s'échinent pour que les habitant-e-s des banlieues puissent vivre en paix.


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