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EAN : 9782700309423
319 pages
Editions Arthaud (30/06/1998)
4/5   2 notes
Résumé :
Biographie. Livre de voyage.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Enfant, j'avais un livre sur l'histoire de la conquête du pôle Sud.
Je l'ai lu à d'innombrables reprises.
Les expéditions me faisaient rêver.
Le duel Scott-Amundsen me fascinait. Une histoire heureuse, une histoire tragique.
Ce récit fait partie de ceux qui m'ont donné le goût de l'aventure.
Reinhold Messner, jeune retraité des sommets, a encore la bougeotte et une furieuse envie de grands espaces.
Envie qu'il va assouvir dans une expédition au pôle Sud, en compagnie de l'Allemand Arved Fuchs qui revient tout juste du pôle Nord.
N'allez surtout pas croire que la traversée de l'Antarctique est facile, plus facile que l'ascension d'un "huit mille" himalayen. Reinhold Messner, lui, ne s'y trompe pas, et nous raconte les doutes et même les cauchemars qui l'assaillent avant le départ.
Toujours très prudent et méthodique, Messner prépare minutieusement l'expédition pendant trois longues années.
La traversée de l'Antarctique dure 92 jours, pendant lesquels alternent les bons et les mauvais moments.
Les conditions météorologiques sont parfois exécrables.
Certains jours, la visibilité est quasi nulle, voire nulle, c'est ce qu'on appelle le "white out", sorte de brouillard blanc et lumineux dans lequel on ne distingue plus rien. Reinhold et Arved ne voient même plus leurs pieds, et ne peuvent plus se diriger qu'à la boussole. Ce white out commande de s'arrêter et de se réfugier sous la tente.
Les jours de brouillard moins épais, il faut tout de même avancer car le temps disponible pour la traversée est limité, mais la peur de se perdre et surtout de perdre l'autre est toujours présente : "Je regardais constamment autour de moi. Il n'était pas question qu'Arved sorte de mon champ de vision. Nous nous serions perdus si nous nous étions égarés dans ce brouillard épais et que nous n'avions pas trouvé les traces de l'autre, perdus tous les deux."
Quand le fameux blizzard s'en mêle, la tente est un bien maigre refuge : "Le bruit était tel, quand le blizzard faisait rage de l'autre côté de la toile, que nous ne pouvions pas nous entendre bien qu'assis à cinquante centimètres l'un de l'autre."
Mais il y a heureusement des jours plus cléments... enfin, tout est relatif : "Soir de Noël. le soleil entra quand j'ouvris la tente. Pas un souffle d'air. Une ambiance printanière dehors bien que l'on frissonnât. Un air printanier de − 25°C. C'était un Noël paisible et blanc, comme à la maison."
Reinhold Messner a scrupuleusement tenu un journal de bord, et son récit très précis donne au lecteur l'impression de le suivre de très près... sans prendre de risques !
Il mêle à sa progression des extraits du journal de Scott, leader d'une expédition britannique concurrente de celle menée par le Norvégien Amundsen. J'ai retrouvé dans ces lignes ce qui m'avait marquée dans mon enfance : l'opiniâtreté de ces hommes endurant mille souffrances, leur détermination farouche pour atteindre le pôle. Ils l'atteignent, mais découvrent qu'Amundsen et les siens les ont devancés. La déception est terrible "Tous les rêves éveillés s'en vont". Ils avaient jeté toutes leurs forces dans la bataille, et leur échec leur sera fatal. Ils ne retrouveront pas l'énergie dont ils auraient eu besoin pour le retour, et qu'un succès leur aurait apportée : ils ne rentreront jamais et meurent tous en cours de route.
L'auteur rend un hommage respectueux à ces hommes courageux.

Vivre coupé du monde pendant une aussi longue période est une expérience très particulière. Pendant les longues heures de marche, Reinhold Messner aime réfléchir, voire philosopher sur le sens de ses actions, et de la vie d'une façon générale : "Lorsque j'étais en route dans des contrées sauvages, ce n'était pas le monde extérieur qui m'importait, mais mon monde intérieur." Il cite La divine comédie de Dante, il cite Schopenhauer " La solitude seule permet d'être soi-même ; qui n'aime pas la solitude, n'aime pas non plus la liberté."
J'aime le mélange des genres lorsque c'est bien fait, ce qui est le cas ici.
Vivre pendant l'été austral dans un désert froid et sans odeur entraîne certainement une perte de repères. Qu'à cela ne tienne, Arved et Reinhold s'en fabriquent.
Ils rythment leurs journées, et continuent d'utiliser les termes de "matin", "soir" ou "nuit" alors que rien ne les distingue dans la luminosité permanente du soleil polaire. Ils inventent également de petits rituels qui jalonnent le parcours et aident à casser la monotonie : "Nous prenions une gorgée de whisky dès que nous avions atteint un autre degré de latitude [...]. C'était devenu une habitude. Nous le buvions la plupart du temps "on the rocks", avec des cubes de glace, et nous nous réjouissions plusieurs jours à l'avance de ce moment." Sympathique, non ? Et puisque les cubes de glace ne manquent pas, pourquoi se gêner ?
Une seule fois, nos deux aventuriers ont rompu leur solitude à deux, au milieu de leur traversée, pile au pôle Sud. Là se trouve en effet une base dans laquelle des personnes travaillent et demeurent. Cette halte fait du bien, mais décontenance aussi. Retrouver des humains après toutes ces semaines passées seuls, hors du temps, est une expérience spéciale. Les deux explorateurs reçoivent en vrac les nouvelles du monde. Messner raconte être resté sans réaction après avoir appris la chute du mur de Berlin. Non que la politique ne l'intéresse pas, mais il n'est simplement pas encore prêt à se reconnecter au monde, sachant qu'il lui reste à effectuer la seconde moitié de la traversée.
Voilà une lecture qui m'a enchantée. J'aime ces récits qui me font voyager, encore plus quand ils ne rapportent pas que les faits bruts mais s'accompagnent de réflexions intéressantes. Et si Reinhold Messner n'a pas le lyrisme d'un Bonatti ou d'un Rébuffat, il a une pensée qui n'est pas dénuée d'intérêt.
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J'ai bien apprécié cette aventure car l'auteur décrit avec précision son aventure et on a l'impression de se trouver au froid avec lui ou d'entendre le vent claquer sur la tente. Par ailleurs, j'ai aimé le fait qu'il décrive en parallèle les récits de la conquête du pole entre les anglais, morts et arrivés trop tard, devancé de quelques semaines par les norvégiens mieux préparés à de telles températures. À la fin de l'ouvrage, il met également son carnet de bord ainsi que la description chronologique de la conquête du pole. Intéressant et rafraichissant.
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Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
Il faisait chaud. J'enlevai tout. Jusqu'à la fourrure polaire. Comme c'était facile de marcher sur cette piste ! Deux paires de moufles, un masque de visage, une écharpe, des lunettes de soleil étaient jetés en vrac sur le traîneau. Comme les accessoires d'une vie enfuie. Je n'étais plus le même que quelques heures auparavant. Nous avions quitté le monde sauvage. [...]
Le premier Américain que je rencontrai me demanda si la Transversale constituait un record. « L'Antarctique n'est pas un anneau de vitesse », répondis-je avec réserve.
Le premier Canadien demanda si nous avions ramené tous nos déchets. Je pus le confirmer.
Le premier Japonais photographia mon équipement et voulut tout savoir de la logistique.
Le premier Italien m'entoura de ses bras et m'appela un héros.
Le premier Russe vint, une bouteille de vodka à la main, et nous fêtâmes le succès.
Le premier Français que je rencontrai voulut seulement savoir si des Français avaient déjà fait cette traversée avant nous. « Peut-être », dis-je.
Le premier Britannique demanda si nous avions tout le temps tiré nos traîneaux nous-mêmes. « Oui », dis-je [...]
Le premier Allemand que je rencontrai demanda : « Pourquoi ? », et je ne sus que répondre.
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En Antarctique règnent le ciel ou l'enfer selon les volontés de la nature. La vie se joue entre ces deux mondes, l'un menaçant, l'autre bienfaisant. L'homme vit cette expérience depuis des centaines de milliers d'années. L'homme a connu la foudre avant d'inventer l'art et la science. Il ne savait pas d'abord que c'était une décharge d'électricité. C'est cette connaissance expérimentale que nous avons perdue. Et c'est l'une des raisons pour lesquelles on doit préserver l'Antarctique. Quand l'Antarctique sera exploité et divisé, il n'y aura plus de lieux où l'homme pourra se confronter directement à la nature. Nous n'avons pas le droit de diviser, de couvrir de constructions et de câbles des paysages « inutiles » comme l'Antarctique ou l'Everest. L'homme mourra spirituellement s'il ne peut plus se représenter le monde sauvage, la nature intacte.
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Ne faut-il pas que le centre de l'Antarctique garde son caractère de "terra incognita" ? Même s'ils n'y vont jamais, les hommes doivent protéger les lieux qui peuvent les faire rêver. Cette attitude de respect doit faire partie de la culture humaine à l'ère de la technologie. L'homme ne se sauvera qu'en s'imposant des limites. Nous devrons savoir renoncer. Renoncer à exploiter les ressources naturelles, renoncer à prendre possession de certaines contrées, renoncer à vouloir toujours davantage. Il faut savoir ce que c'est que les espaces sauvages, l'immensité, le silence pour ne pas vouloir les perdre. Ces richesses que la société de consommation avait chassées du « paradis », les glaces de l'Antarctique les ont conservées : le calme, la paix, les espaces vierges, dans un monde totalement secret et gelé.
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Je ne suis vraiment moi-même en effet que lorsque je pousse mon corps et mon esprit à la limite de leurs possibilités. Je suis alors heureux, bien dans ma peau, supportable. Je suis persuadé que l'humanité serait plus pacifique si chacun avait, de temps en temps, l'occasion de se défouler aux limites de ses capacités. La paix ne présuppose pas seulement des nations libres. La paix ne sera possible que lorsque tous les hommes deviendront des hommes à part entière.
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Je rationnai les vivres, d'abord sans qu'Arved s'en aperçût. Puis, avec son assentiment. Bientôt, la faim ne nous quitta plus. Nous nous racontions le « soir » sous la tente nos plats préférés. La faim ! Je pensais en marchant − nos barres énergétiques et la pâte de noisette ne suffisaient plus à calmer notre faim dans la journée − à toutes les invitations que j'avais refusées au cours des mois précédant le départ [...] « Des œufs au lard pour le petit déjeuner ! » C'est ainsi qu'Arved commençait ses journées au pays de Cocagne. Et ainsi de suite, et nous en parlions sans mélancolie. « Du saumon fumé et un verre de champagne. Mais aussi du fromage, du gorgonzola et un petit morceau de parmesan frais », dis-je. « Et du beurre », ajouta Arved. Que ne donnerions-nous pas maintenant pour un morceau de beurre !
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