Proies d'
Andrée A. Michaud
Rivages Noir
Dans les romans d'
Andrée Michaud, la nature est un personnage à part entière. La nature ne prend pas toute la place mais elle en prend beaucoup !
Elle influe sur les êtres, les hommes comme les animaux, sur leurs actes, leurs émotions, et aussi sur le temps.
Les forêts, les rivières, les plaines sauvages aux noms évocateurs, recherchées par l'homme qui se toque de revenir à la source, à la solitude, mais deviennent subitement lieux inhospitaliers, rendus à la sauvagerie, retour à l'état originel de toute chose.
Terres un peu animistes où les fantômes planent non pas de façon surnaturelle mais de façon inexpliquée, entrainant une atmosphère mystérieuse, inquiétante, troublante.
Esprit des lieux, terres chargées.
La langue est littéraire, poétique bien que personnelle, le parler québécois y est pour beaucoup. Et le ton, car le narrateur laisse entrevoir qu'il a une longueur d'avance et suggère le drame à venir).
Andrée Michaud convoque les peurs de l'enfance (les peurs enfouies au coeur de l'enfance) dans un univers au départ très familier, la peur du bois, du loup, du chasseur, du rôdeur, les adolescents qui se voient déjà grands, presque adultes en seront pour leurs frais.
La menace est silencieuse, la peur enfle, la folie guette, on perd pied et pourtant les personnages gardent un semblant d'humanité, on ne peut leur en vouloir, ils trainent leurs propres valises, des boulets encombrants, la psychologie est fine et les portraits brossés à la perfection.
Alex, Gabi et Jude, amis d'enfance partent camper en forêt. Août tire sur sa fin, ils veulent profiter de leurs vacances, trois jours seuls, entre eux avec pour décor une rivière et les bois qui la bordent.
Baignades et histoires effrayantes au bord d'un feu de camp, mais voilà, une sensation d'être épiés, surveillés, fouillés ne les quitte pas, dans les mots de l'auteure, le ton est donné et il va s'intensifier. Surtout que non loin de là, au village, une foire agricole se prépare, une comice, tous participent, tous se connaissent, et les parents des adolescents ne peuvent s'empêcher de ressentir un malaise, une petite sensation désagréable, une envie farouche que le weekend s'achève et que les enfants regagnent leurs pénates...
Mais pour beaucoup, à la fin du weekend rien ne sera plus jamais pareil.