Ce livre regroupe deux histoires : «
Batman : Année Un » et sa "suite" « Batman et les Monstres ».
Le premier récit, le plus court, offre la meilleure des genèses se focalisant sur une année entière à Gotham et non sur l'entraînement du héros avant son retour au bercail.
Beaucoup plus polar qu'héroïque, le récit suit les destins croisés de Gordon et de Bruce Wayne dans une Gotham City qui se complaît dans la crasse.
L'univers de Year One semble fortement inspiré de Taxi Driver avec ses quartiers chauds remplis de putes et de toxicos. La police est pourrie, toute la ville est à vomir, et Batman n'est clairement pas un James Bond déguisé en chauve-souris.
Loin du superhéros capable de castagner 10 gars à la fois, c'est au contraire un homme qui doute, ne sait pas encore comment s'y prendre, et paye cher ses erreurs. A fortiori, Miller met davantage l'accent sur Gordon (simple lieutenant fraîchement débarqué), faisant office de voix off, et ses déboires dans un contexte policier véreux. L'alternance entre les actions et les pensées de Batou et celles de Gordon confère une force incroyable à ce récit. Tous deux sont certes présentés comme la part de lumière dans un océan de ténèbres mais ceci ne les empêchent pas de se fourvoyer et de s'égarer en chemin. Des personnages terriblement humains !
Apparaissent également, quoique dans une moindre mesure, Selina (la future Catwoman aux origines revisitées) et Harvey Dent (le futur Double Face). Si la première ralentit plutôt l'intrigue (servant juste d'élément perturbateur), le second préfigure en coulisses la future relation entre la justice et le vigilant.
Côté réalisation, Mazzuccheli est bon, très bon ! Son style old school peut plaire ou non mais sa mise en scène est impeccable et d'une excellente fluidité.
Ayant inspiré le film "Batman Begins", «
Batman : Année Un » est un classique très réussi mais un poil trop court (se terminant abruptement) au vu de la densité des thèmes abordés.
Le second récit, plus long, « Batman et les Monstres » (ou Shingeki no Kyojin / L'Attaque des Titans version Batou) est dans la lignée du précédent tout en faisant office de point de relais vers des ambiances bien plus super-héroïques. Gotham est toujours contrôlée par la mafia mais celle-ci commence à céder le terrain face aux criminels costumés qui prendront définitivement l'ascendant dans « Un long Halloween ».
Précédant « L'homme qui rit » (1re apparition du Joker), « Batman et les Monstres » est une relecture moderne d'un classique des années 1940, réinventant le mythe du savant fou en la personne d'Hugo Strange.
Oscillant entre polar et horreur, l'intrigue axée sur les manipulations génétiques place un Batman encore inexpérimenté dans une situation inconfortable. le héros doit affronter une nouvelle menace d'origine surhumaine et commet des erreurs de débutant, l'obligeant à perfectionner ses techniques et son arsenal (1re apparition de la Batmobile).
Le côté détective du Chevalier Noir est particulièrement mis en avant tout comme sa première association (officieuse) avec Gordon. Bien que l'identité du coupable soit connue du lecteur dès le début, le suspense est savamment entretenu via différentes scènes de carnage, insérées avec parcimonie à des moments clés, tout en développant le personnage de Bruce Wayne (ses amours compliqués, ses échanges sarcastiques avec Alfred et ses peurs). On regrettera juste que la fille, Julie Madison, soit un peu cruche bien que l'histoire de son père (un buisnessman s'acoquinant avec la pègre) fasse écho au film « The Mask of The Phantasm ».
Une certaine poésie se dégage néanmoins de ce comics car chaque personnage doit faire face à sa propre noirceur et aux conséquences qui en découlent !
Au style froid et figé de Mazzuchielli, le graphisme de Wagner est beaucoup plus coloré à l'image de
Bruce Timm pour la série animée Batman de 1992. Ses visages sont très expressifs (parfois un peu grossiers) tandis que l'ambiance visuelle très 1950s est un vrai régal !
Bien que n'égalant pas Year One, cette mini-série ancrée dans le début de carrière de Bat demeure sympathique. Notez qu'il existe une fausse "suite" avec « Batman et le moine fou » (absente de ce tome).
Ce tome est un très bon crû et une belle amorce pour découvrir l'univers de Batman !