Citations sur Le Jardin des Secrets (80)
Elle surprenait des fées batifolant dans les toiles d'araignée, des insectes échangeant à voix basse des incantations secrètes sur les appuis de fenêtre, et, dans le fourneau, des esprits qui vivaient dans le feu et passaient leur temps à émettre des sifflements et des crachotements. Parfois, l'après-midi, elle s'installait dans son fauteuil à bascule pour les écouter. Et tard le soir, quand les créatures étaient endormies, elle narrait leur histoire au fil de contes qui n'appartenaient qu'à elle.
« Qu’avait donc ce jardin pour laisser croire à ses visiteurs que sa splendeur ne pouvait être entièrement naturelle, qu’on avait dû conclure un pacte avec le monde surnaturel pour y faire pousser une telle profusion végétale ? »
On doit dessiner ce qu'on voit, et non ce qu'on imagine avoir sous les yeux ; toute image peut se réduire à un ensemble de lignes et de formes ; la couleur doit révéler et dissimuler.
p.559
Avec de la volonté, même les faibles peuvent beaucoup
Des lampes à gaz palpitaient çà et là sur des guéridons mais, malgré leurs efforts, elles ne pouvaient éclairer dignement ce salon aux proportions gigantesques; aussi les ténèbres murmuraient-elles dans les angles, tandis que les ombres, elles, respiraient le long des murs en une perpétuelle oscillation.
C'était une impression étrange de faire ainsi connaissance avec la petite personne qui avait grandi dans son ventre, de caresser les mains et les pieds menus qu'elle avait si souvent attrapés quand ils poussaient de l'intérieur contre la paroi de son ventre, d'observer ces jolies lèvres qui semblaient sur le point de parler. Cette petite personne arborait une expression d'infinie sagesse, comme si, lors des premiers jours de son existence, elle conservait le savoir acquis dans une vie antérieure qui venait juste de prendre fin.
Vous vous en rendrez compte par vous-même quand vous aurez mon âge, mais le passé finit par être une espèce de vieil ami.Le genre d'ami qui débarque sans prévenir et ne veut plus s'en aller.
Alors avec toute la douceur dont elle était capable, elle enveloppa le souvenir de son frère dans plusieurs épaisseurs d'émotions - joie, amour, dévouement - dont elle n'aurait plus l'utilité, et le verouilla à double tour au fond de son coeur. C'était préférable et justifié. Eliza n'était plus qu'une moitié de personne. Telle une chambre dont on a volé la chandelle, son âme devint froide, sombre et sans limites. p.184
La phrase qui lui avait paru si bizarre quand Ben lui avait remis les papiers...
- " Pour Cassandra, qui comprendra pourquoi ".
- Et alors vous comprenez maintenant ?
Bien sur qu'elle comprenait. Nell, qui s'était efforcée avec l'énergie du désespoir d'affrontée son passé pour pouvoir le transcender, avait vu en elle une âme sœur. Une victime de la vie comme elle.
- Elle savait que j'entreprendrais la démarche.
- Elle savait que vous l'aimiez assez pour achever ce qu'elle avait commencé. Comme dans " Les yeux de l’aïeule ", quand le faon révèle à la princesse qu'en fin de compte la vieille n'avait pas besoin d'yeux, qu'elle savait qui elle était grâce à l'amour que lui vouait la princesse.
Cassandra en avait les larmes aux yeux.
Par ailleurs, cette vie d'ermite avait des aspects positifs imprévus : depuis qu'elle écrivait seule dans sa chaumière, ses personnages prenaient de la substance. Elle surprenait des fées batifolant dans les toiles d'araignée, des incestes échangeant à voix basse des incantations secrètes sur les appuis de fenêtre, et , dans le fourneau des esprits qui vivaient dans le feu et passaient leur temps à émettre des sifflements et des crachotements.