Que celui qui n'a jamais mangé un Big Mac lance la première pierre à notre société de consommation! ai-je pensé après lecture de cette fable des temps modernes présentée en deux phases par
Haruki Murakami, qui tel un cow-boy s'en prend à nouveau au système capitaliste.
Les attaques de la boulangerie sont deux nouvelles oscillant entre réalité et fiction, concret et absurde. La première, initialement publiée dans un magazine puis dans Oeuvres complètes, conte l'aventure de deux jeunes paresseux qui ont faim, de deux 'adulescents' déjantés (ou shootés?) qui écoutent discourir les croissants et qui enthousiastes, dotés d'émotions "qu'avaient pu éprouver les Jeunesses hitlériennes", braquent une boulangerie et surtout son propriétaire communiste.Ce dernier, par ailleurs mélomane, leur propose un marché: du pain si vous écoutez la musique de Wagner. Apaisement de la haine.Séparation des deux complices.Deuxième nouvelle (issue de son recueil
L'éléphant s'évapore), deuxième faim après embourgeoisement, deuxième complice et manipulatrice en la personne de la nouvelle épousée au ton affable mais armée jusqu'aux dents.Manque de bol pour les employés modèles du
Mac Do,on ne trouve de pain que chez eux!
Haruki Murakami, écrivain japonais (dont Ecoute le vent lui a valu le prix Gunzo et plusieurs fois favori pour le prix Nobel de littérature) dont je suis pourtant fan, m'a un peu déçue dans
Les attaques de la boulangerie, car petit un c'est du réchauffé,petit deux c'est du pré-cuit (où est passée la croute dorée à point de
la ballade de l'impossible, dont la violence ambiante était sublimée en prose poétique?)!
Comme dans 1Q84 (qui rappelait
1984 de
Georges Orwell avec son Big Brother) il s'interroge toujours sur le bien et le mal, le pouvoir,la violence,la manipulation,la plongée dans un inconscient incontrôlable et dangereux. Mais à quoi bon si c'est une redite? S'engager c'est bien mais rabâcher lasse à la fin.
J'ai par contre trouvé sublimes les illustrations en noir, blanc et or (tiens donc!) surréalistes de
Kat Menschik (illustratrice berlinoise) qui avait déjà contribué aux illustrations de
Sommeil. Elle restitue parfaitement l'univers onirique de 1Q84. Son trompe-l'oeil (entre autres): un cocon ouvert entre des herbages d'où sort une longue chenille qui s'avère être un ventre aux intestins noirs dévidés est d'un symbolisme choquant (donc excellent)! le gros plan sur les mains du boulanger qui pétrit sa pâte sur une partition, idem!
Si je devais acheter ce livre (17 euros pour 63 pages!) ce serait pour ses illustrations parlantes qui en font un vrai bijou.
"L'art est langage": où sont passés les métiers d'antan, pourquoi tant de haine au ventre, la musique adoucit les moeurs,la vie n'est pas un long fleuve tranquile,l'homme se noie-t-il dans une société trop industrialisée,où sont partis nos rêves d'enfants?....Oui, "L'art est langage" et
Les attaques de la boulangerie, façon Kate Menschick y contribuent.