Organisé en trois volets -Matière source, Richesse plastique, L'Atelier interieur- le catalogue de la dernière exposition des oeuvres de Zadkine dans son propre atelier parisien suit fidèlement le parcours de celle-ci.
On y suit aussi chronologiquement la maturation artistique de Zadkine, d'abord très à l'écoute de la matière elle-même , comme dans cette Tête héroïque de granit où le ciseau suit les rugosités et les accidents de la pierre, comme pour en dégager la voix particulière- brutale, close, à la fois obscurément présente et étrangère au monde. Première partie que j'ai personnellement trouvée saisissante et particulièrement intéressante.
Des aller-retour entre peinture et sculpture, l'influence formelle des recompositions cubistes infléchissent bientôt cette voie sans doute trop radicale : torses et têtes, adoucis, polis, rendus précieux par la dorure ou l'incision, disent le luxe des matières et la volupté de la transmutation par le geste et l'outil. La matière ne dicte plus sa loi. L'artiste lui imprime ses volontés esthétiques.
Dans la troisième partie, peinture et sculpture sont souvent associées: les dessins se présentent comme des croquis de sculptures.
Ou encore la sculpture s'associe à la peinture soit par le biais de la polychromie -comme cette Odalisque ou Bayadere, 1932 peinte comme une vierge médiévale - soit par la création d'un "objet" multiple, combinant marbre, granit, pierre, plomb et verre peint - le sculpteur, 1929-1949, ou marbre, pierre blanche et verre peint, - Esprit de l'antiquité, 1927.
Catalogue soigné comme toujours pour les expositions du musée Zadkine, belle iconographie et articles clairs et intéressants.
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Créer pour l'artiste, c'est nécessairement passer de l'intériorité de l'atelier à l'extériorité - le dehors auquel sont destinées ses oeuvres. Les enchâssements de vides et de pleins de "La Demeure " (1959) ou les ultimes et singulières "Sculptures pour l'architecture (1967) que Zadkine avait l'intention de porter à l'échelle monumentale se déploient comme autant de "demeures " fantastiques où s'interpénètrent le dehors et le dedans.
Substances en devenir, puissances formelles, les matières sont des forces, des flux. L'art de Zadkine naît de l'écoute de cette matière première. Dans "Le Maillet et le Ciseau.Souvenirs de ma vie.", l'artiste confesse son enracinement dans la "forêt psychique" de sa Russie natale, son approche sensorielle du bois, de la terre, de la pierre, dont témoigne "Tête héroïque " ( 1909- 1910).
Durant une courte phase d'exploration cubiste, l'artiste se constitue une nouvelle grammaire, fondée sur le signe plastique et l'alternance rythmique des pleins et des vides, du convexe et du concave : ainsi des "Formes féminines", taillées dans la pierre, et des "Formes et lumières", fondues en bronze doré.
Paris Musées vous souhaite une très belle année 2019 dans les musées de la Ville de Paris