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EAN : 9782343137896
165 pages
Editions L'Harmattan (01/02/2018)
5/5   6 notes
Résumé :
Des minorités discriminées sur des bases nationales, ethniques, culturelles ou religieuses existent un peu partout dans le monde. Mais pour les Jummas du Bengladesh, comment en est-on arrivé là ? Il s'agit pour Nicolas Paul de décrire la « fabrique » d'une minorité opprimée. Ce terme fabrique signifie que ce processus est contingent et non orienté vers une fin. Cette étude cherche à évaluer comment ces minorités sont encore menacées, quelles formes de domination ont... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Une minorité opprimée, une communauté dont on ne parle pas, ou du moins, dont on ne parle plus depuis 1987, une colonisation planifiée, hier de l'avis de la tutelle anglaise des tribus sauvages à isoler, aujourd'hui c'est au Bangladesh, que les Jummas tentent de survivre.


Que peuvent un million de bouddhistes Jummas face à la majorité musulmane du Bengladesh de plus 150 millions d'habitants!


Le livre de Paul Nicolas, ne se limite pas à tirer une sonnette d'alarme, ou à écrire le récit d'un génocide selon les mots de Danielle Mitterand;" affirmant en octobre 86, Les Hills Tracts sont une région du Bangladesh, où se déroule un drame, c'est tout simplement un génocide."


Paul Nicolas agrégé de géographie, a consacré 30 année de sa vie, sur cette réalité des Jummas, il a soutenu en 2017 une thèse de doctorat, pour leur rendre hommage. A 70 ans celui qui fut un premier de cordée exemplaire, livre plus qu'un mémoire, une indispensable réflexion sur les mécanismes qui conduisent à fabriquer une minorité qui devient une proie si elle n'est pas protégée.


"La Fabrique d'une Minorité", pourrait être considérée comme un pamphlet à l'égard des Britanniques, et des Pakistanais, qui ont créé les conditions d'une persécution admise voire naturelle, de leur colonisation, une occupation de terres qui allait de soi. La minorité sauvage selon les Britanniques, expliquerait l'idée d'un peuple rétif au développement selon les Pakistanais.


C'est bien plus qu'un coup de sang. Paul Nicolas, a voulu rendre une copie propre, conduire une recherche n'écartant aucune hypothèse, conduire un travail de terrain, vérifier, disséquer, éviscérer, confronter toutes les données historiques ou les recensements comme un juge d'instruction impartial, se mettant en équilibre instable, tel le grimpeur qu'il fut, aller chercher l'élément tangible quel qu'en soit le prix.

Dès 1948, Muhammad Ali Jinnah refuse d'accepter les peuples des collines ( Hills Tracts) comme une communauté distincte des Bengalis. En 1975 un coup d'état militaire instaure la République islamique du Bangladesh.

« les peuples des collines ont été désignés, suspectés de ne pas avoir été de fervents nationalistes , les voilà exclus par ce que non musulmans et habitant une zone frontière, page 97. Les Jummas sont acculés et pour certains refusant la soumission, c'est le début de leur rébellion.

"Entre 1971 et 1982, 400 000 colons se sont installés dans les Hill Tracts. L'armée leur fournissait des armes et le gouvernement des terres , du bétail et même une allocation, page 99."


l'islamisation des territoires est mise en place par le régime, le chant des muezzins couvre l'espace sonore, des centres culturels sont édifiés avec des fonds Saoudiens. Édifiant!
"Militaires et colons s'attaquent aux valeurs culturelles et religieuses des jummas."
Cependant le fond du problème n'est-il pas ailleurs, quelle motivation se cache derrière cette façade religieuse, et ce depuis près de deux siècles.


En particulier, la conjugaison d’un regard condescendant porté sur les populations des Hill Tracts par les “dominants” couplé avec le désir d’accaparer les richesses de leur territoire, explique les dérives récentes, la guerre des religions est venu cimenter et faciliter l'actuelle hégémonie.
Le contrôle de ces territoires pour des raisons stratégiques, en est l'ultime motivation..


Si sous la pression internationale le traité de 1997 a mis un terme aux luttes armées entre les Jummas et l'armée bengali, il faudra dénombrer plus de 11 000 morts.
Tout n'est pas réglé.
Les travaux de Paul Nicolas sont connus, et leur richesse démontre bien un mécanisme de violence qui peu à peu a justifié l'hostilité, puis le génocide.

Ce récit ajusté de 150 pages préfacé par Devasish Roy, est une voix qu'il faut écouter et lire, d'une étonnante lucidité, sans artifice.

Paul Nicolas a accueilli un des 72 jeunes jummas venus des camps de réfugiés en Inde. Ce jeune jumma est maintenant intégré dans sa nouvelle famille d'où il suit les travaux de Paul et partage ses enthousiasmes et ses craintes.

Le sort des 72 jeunes arrivés en 1987 en France fait l’objet d’un autre livre dont il sera question plus tard, Sur Babelio. à suivre...
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On pourrait penser que ce livre, la fabrique d'une minorité, n'est destiné qu'aux spécialistes du Bangladesh ou aux militants de la cause Jumma.
A n'en pas douter, ceux-ci trouveront leur compte dans cet ouvrage qui s'appuie sur la recherche, extrêmement bien documentée, que Paul Nicolas a conduite pour réaliser sa thèse.
Mais, pour celui qui -et c'est mon cas - ne connaît rien au Bangladesh, ce livre s'avère tout aussi passionnant.
Le livre se lit très bien, il est clair et pédagogique et on y apprend des quantités de choses. La réflexion qu'il autorise à partir d'un cas particulier - celui des Jummas du Bangladesh - s'élargira facilement à l'ensemble des minorités.

Les pistes d'interrogation ouvertes par l'ouvrage sont multiples :

Interrogation, bien sûr, sur le regard que "les uns", qu'ils s'appellent État, armée, "majorité" ou colons agricoles, portent sur "l'autre", "l'autochtone". L'analyse de Paul Nicolas est d'autant plus pertinente qu'elle décrit ce processus de fabrication d'une minorité sur le temps long, depuis la colonisation britannique jusqu'à la situation actuelle. La déconstruction est particulièrement efficace, en particulier parce qu'elle évite le piège du motif religieux, si souvent invoqué comme une explication facile et supposée évidente. La mécanique est en fait bien plus complexe et l'auteur en décrit précisément les raisons, les tenants et les aboutissants.
Interrogation aussi sur la construction de l'État-Nation et la façon dont l'identification de la minorité sert aussi à la construction d'un "nous" support de l'identité nationale. Bien qu'écrit avant les événements, le propos du livre entre en résonance avec l'actualité de l'exode des Rohingyas de Birmanie et la situation explosive des camps de réfugiés au Bangladesh. Plus largement, le livre pousse à la réflexion sur la façon dont le "bouc émissaire" est utilisé pour justifier une démarche identitaire ou nationaliste.
Interrogation encore sur le développement. Nos normes occidentales permettent facilement de qualifier la minorité de "sous- développée". Elles servent aussi à justifier le "bon développement" - en l'occurrence la construction d'un barrage - voulu par le gouvernement. le développement, y compris au travers d'un tourisme destructeur, devient ainsi un outil qui permet de dessaisir davantage encore la minorité de ses terres.
Interrogation enfin sur notre regard à nous, lecteurs occidentaux. le livre conduit à abandonner le cliché facile du "bon sauvage" ou de la "communauté authentique", largement empreint d'une idéalisation des sociétés traditionnelles. Il montre sans concessions la part d'auto définition du peuple Jumma au travers de la lutte armée. le livre est aussi et malheureusement l'histoire d'un conflit, d'une " guerre sale ", une guerre oubliée... comme tant d'autres de par le monde.

Lien : https://www.babelio.com/livr..
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Au fil de l'histoire récente, disons depuis la colonisation britannique, le tranquille peuple des collines est devenu le souffre douleur des pouvoirs centraux, colonisateur anglais, Pakistan puis enfin Bangladesh. Marginalisé,colonisé, humilié, privé de droits, le peuple des collines est devenu la communauté Jumma en lutte pour le maintien de sa culture et de ses droits. Paul Nicolas fait oeuvre utile en nous montrant, à partir d'une expérience très personnelle, comment se constitue, se fabrique, une minorité, éclairant ainsi bien des conflits d'aujourd'hui.Par un double mouvement l'oppresseur désigne l'autre, le différent, comme devant être soumis et l'oppressé se constitue en communauté homogène, les jummas, pour résister, voire prendre les armes pendant 20 ans, de 1977 à1997. Ce conflit ignoré en éclaire bien d'autres, que la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones de 2007 n'a pu résoudre.
Le témoignage de Sueiti Zadjian "Chakma,orphelin des Hill Tracts" est bouleversant et complète de façon très concrète l'ouvrage de Paul Nicolas.
http://autres-talents.fr
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Pour qui s'intéresse un tant soit peu aux minorités ethniques, je recommande sincèrement ce livre, très bien écrit et vraiment très intéressant.
Après l'avoir lu, on comprend mieux comment des minorités peuvent progressivement être mises à l'index et comment certains gouvernements peuvent laisser des populations éliminer insidieusement d'autres populations plus faibles ou moins importantes.
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Ce livre montre bien le processus qui conduit par l'oppression, la discrimination et la répression à la marginalisation d'un peuple. Il est d'autant plus utile qu'il nous parle d'une minorité ethnique peu connue donc plus vulnérable, les Jummas du Bangladesh. Sa lecture est très agréable et accessible au profane.
Je le conseille vivement.
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Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Entre 1971 et 1982, 400 000 colons se sont installés dans les Hill Tracts. L'armée leur fournissait des armes et le gouvernement des terres , du bétail et une allocation.
Page 99.
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Une vrai paix dans les Hill Tracks passe donc par la prise en compte,par les classes dirigeantes bangladaises des graves séquelles laissées par deux siècles de domination et par un changement de regard sur les Jummas.
P150
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La guerre et la violence avant de devenir physique et de porter la mort et la désolation, sont toujours, au départ, une guerre des mots, le développement d'une sémantique de l'hostilité envers l'autre, de sa dépréciation et sa barbarisation.
p 150
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les peuples des collines ont été désignés, suspectés de ne pas avoir été de fervents nationalistes , les voilà exclus par ce que non musulmans et habitant une zone frontière.
P 97
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Video de Paul Nicolas (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Paul Nicolas
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=59716&motExact=0&motcle=&mode=AND
http://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=catalogue&obj=livre&no=58834&motExact=0&motcle=&mode=AND
Les Jummas entre France et Bangladesh
Paul Nicolas
Préface de Virginie Baby-Collin
Logiques sociales
En 1987, 72 jeunes garçons jummas (minorité opprimée du Bangladesh) arrivent en France, exfiltrés des camps de réfugiés en Inde et placés dans des familles d'accueil. Trente ans plus tard, une communauté de près de 400 Jummas ou Franco-Jummas, en lien avec leur région d'origine, les Chittagong Hill Tracts au Bangladesh, existe en France. Ce livre décrypte les étapes de la fabrique de cette communauté transationale. Avec des récits de vie, une base de données quasi exhaustive du groupe et l'analyse de certains réseaux relationnels, l'auteur, immergé dans ce groupe, offre une analyse précise de leur intégration en France et des processus qui les ont conduits à l'établissement de liens transnationaux.
Paul Nicolas est professeur agrégé de géographie. Enseignant en lycée et à l'IUFM d'Aix-en-Provence, il a soutenu, en 2017, une thèse de doctorat de géographie sur la communauté jumma de France et sur ses liens avec le Bangladesh. Il a accueilli en 1987, au sein de sa famille, un des soixante-douze jeunes Jummas venus ensemble en France, depuis des camps de réfugiés en Inde
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