Ne baisse pas les bras: tu risquerais de le faire une heure avant le miracle.
D’ailleurs, moi je trouve qu’il ne faut jamais juger car qui sommes-nous pour juger ?
C’est moi qui pose mes conditions, et tant pis si ça ne plaît pas à mademoiselle. Le pouvoir est aux forts, un prix est un prix. Si tu veux la liberté, tu te soumettras.
C’était sans projet sous-jacent qu’elle aimait dire des horreurs à chacun : pour le simple plaisir de faire souffrir. L’observation scientifique de ZHF 911 révélait d’autres traits du mal : elle était inerte, n’avait d’énergie que pour parler – mais une énergie inégalable. Si elle
donnait une impression d’intelligence, c’était à cause de la méchanceté de ses reparties qui semaient les larmes et le désespoir.
Zdena se demanda si elle avait des idées. Le brouhaha qu'elle avait dans la tête et qu'elle nommait pompeusement sa pensée ne l'étourdit pas au point de conclure par l'affirmative. Mais elle songea qu'elle n'aurait aucun mal à inspirer la sympathie.
C'est une naïveté courante : les gens ne savent pas combien la télévision les enlaidit. Zdena prépara son laïus devant le miroir sans se rendre compte que la caméra n'aurait pas pour elle les indulgence de son reflet.
C'était avant la première émission: les gens ne savaient pas encore ce qui allait leur arriver. Ils s'indignaient. A la gare, on les entassa dans un wagon à bestiaux. Pannonique vit qu'on les filmait: plusieurs caméras les escortaient qui ne perdaient pas une miette de leur angoisse.
Ce qu'il y a d'affreux, dans les miracles, ce sont les limites de leur impact.
Ce vouvoiement généralisé eut des conséquences. On ne s’en aima pas moins, on n’en fut pas moins intime, mais on se respecta infiniment plus. Ce n’était pas une déférence formelle : on avait plus d’estime les uns pour les autres.
(...)Précisément. Laissons le tutoiement à ceux qui nous veulent du mal.
Vint le moment ou la souffrance des autres ne leur suffit plus : il leur en fallut le spectacle.
"Comme il serait facile d'être Dieu s'il n'y avait pas ZHF 911 !" Elle riait de l'absurdité d'une telle réflexion : en effet, il serait facile d'être Dieu si le mal n'existait pas - mais alors, on n'aurait aucun besoin de dieu non plus.