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sur 694 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Ce polar oriental d'un Prix Nobel est presque aussi différent des polars occidentaux classiques que les miniatures d'Istanbul l'étaient des dessins italiens du XVIè siècle... comme je l'ai appris dans ce pavé dense, touffu, étrange, étouffant mais malgré tout intéressant.

C'est un polar en cela que le récit commence par un meurtre et s'achève par la découverte du coupable. Pourtant, ça ne ressemble pas du tout à un polar, ne serait-ce que parce qu'on change sans arrêt de narrateur, de la victime assassinée à la commère du quartier en passant par les sujets des tableaux, les différents peintres du sultan ou l'intrigante femme fatale Shékuré.

Les digressions sont incessantes et les paragraphes érudits et interminables, nous plongeant dans l'atmosphère moite et chahutée d'Istanbul en 1591. Chacun des personnages a son caractère, sa façon de s'exprimer et ses marottes. Cela ajoute de l'intérêt au livre mais aussi de la difficulté au lecteur, car l'intrigue n'avance pas vraiment !

C'est donc un livre ardu, qui se mérite, qui demande de la persévérance. Pour autant, j'ai eu du plaisir à la lecture, notamment en découvrant les subtilités et impératifs de la peinture à l'ottomane ou les romances improbables de Shékuré.
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Après avoir terminé ce roman j’avais la tête lourde, non que je me suis acharné à lire ses dernières pages avidement, que j’étais fatigué ou assailli par la densité de ce que je lisais mais parce que les voix des personnages raisonnaient toujours dans ma tête. J’étais heureux comme Pamuk après l’avoir terminé après des années de travail sur ce livre où il avait mis beaucoup de lui-même.

C’est mon deuxième livre de Pamuk et j’ai de nouveau ce constat : l’histoire n’est qu’un prétexte, l’essentiel c’est l’acte artistique (ou littéraire) ; comment s’accomplit l’œuvre artistique ? pourquoi, aussi ? on aura le plaisir de lire de longs passages où des miniaturistes nous livrent leurs points de vue sur la peinture, le style, la signature, la cécité.

Dans ce roman, on voit un événement raconté derechef par un autre personnage qui le poursuit ou le relate ou l’éclaircit, c’est comme une variation du même thème musical avec d’autres instruments ou avec un autre musicien. On a l’impression de lire une volumineuse pièce de théâtre où chaque personnage s’exprime en tirade. D’ailleurs, le personnage d’Esther n’est-il pas un vrai personnage de comédie ?

Certaines phrases pouvaient déclencher une réflexion profonde sur un sujet assez simple, et je me voyais en train de divaguer en pleine lecture. On a envie de voyager dans le sens de cette phrase, de mûrir ce sens. En parlant de phrases, Pamuk a subi la double influence de Flaubert (son exigence dans la construction de la phrase), et Proust (les longues phrases enchevêtrées).

Par ailleurs, j’aimerai bien faire un petit rapprochement entre, "Mon nom est Rouge" et "Le Nom de la rose". Deux romans historiques avec trame policière, des crimes violents, des querelles religieuses (le rire et la peinture comme hérésies), un livre secret dans les deux romans et qui est la cause de tous ces crimes (dans "Mon nom est Rouge", le livre secret rend aveugle, comme le dit Hassan en plaisantant avec Esther (chapitre 25), alors que dans "Le Nom de la rose", le livre est empoisonné). Les deux auteurs font preuves d’une grande érudition concernant les thèmes qu’ils abordent (les sciences naturelles, la peinture, la multitude des références).

Comme dans "Eloge de la marâtre" de Vargas Llosa, Pamuk fait parler les tableaux (lui par la bouche du conteur et satiriste du café).

Pour finir, je me demande si Pamuk grand admirateur de Stendhal n’aurait pas fait un petit clin d’œil à son maître par ce choix du Rouge dans le titre et du Noir pour le nom du personnage ?
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J'ai lu Mon nom et Rouge et ses 59 chapitres en 2002, au lendemain de sa parution en français et de sa reconnaissance comme Prix du meilleur livre étranger.

Je fus immédiatement conquis par la recette équilibrée de grand roman. A mi-chemin entre Dan Brown et Umberto Eco, Orhan Pamuk déploie sa trame policière en un temps et un lieu bien spécifiques. Il nous transporte à Istanbul, dans l'empire ottoman du XVIème siècle, et dans un quasi huis clos, celui des enlumineurs et miniaturistes du Nakkash-Hane, , l'atelier du sultan. Après avoir lu ce livre, avec quel plaisir me suis-je, 10 ans plus tard, replongé dans le climat de raffinement et d'intrigue du palais Topkapi lors de ma visite à Istanbul !

Ce fut aussi une découverte du talent narratif d'Orhan Pamuk, l'un des plus célèbres écrivains turcs, qui a reçu après ma lecture le prix nobel. Ce passionné de peinture, marié à une historienne, nous fait découvrir dans ce roman polyphonique la culture de son pays. Musulman engagé dans la défense des droits de l'homme en Turquie et ailleurs, dans un style à la fois dense et complexe, il tisse son roman de différents points de vue. Il expérimente aussi la rencontre, féconde, de la quête inquiète de sens du roman à l'occidentale -on pense à la mort à Venise ou à l'Amour au temps du Choléra- et du conte oriental -Neh Manzer, lu récemment-.

Orhan Pamuk n'est pourtant pas d'une lecture facile, et j'ai pour ma part dû renoncer à achever La Vie Nouvelle, entamé après Mon Nom est Rouge. L'avantage de ce dernier réside dans sa construction baroque : l'amateur de roman policier, celui d'Histoire, l'explorateur des palais ottomans ou le curieux de découvrir l'art des miniaturistes s'y retrouveront tout autant. L'intrigue amoureuse se déploie aussi à l'ombre de la Sublime Porte. L'art des miniaturistes entre d'ailleurs en résonance avec sa manière de conter, pleine de détails du quotidien, et donc très documentée.

Pour toutes ces raisons, bien que déçu depuis par l'auteur, je recommande sans hésiter ce roman comme son chef d'oeuvre. On referme le livre en ayant appris -et ressenti- une foultitude de choses sur ces lieux et cette époque de rencontre et de confrontation entre orient et occident -encore une fois, quelle magnifique introduction à la visite d'Instanbul !- ; et cela sans s'ennuyer : l'intrigue m'a tenu en haleine de bout en bout.










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Dès le titre du premier chapitre “Je suis mon cadavre” j'ai été séduite par ce roman et ce sentiment n'est allé qu'en s'amplifiant au fur et à mesure de mon avancée dans ma lecture. Maintenant que je l'ai terminé, je peux affirmer que j'ai été conquise par ce livre qui réunit tous les éléments qui me charment que je m'attend à trouver à la lecture d'un policier historique qui plus est écrit par un prix Nobel.

Il s'agit d'un pavé dense de 750 pages qui, pendant plusieurs jours, m'a plongée dans la ville d'Istanbul à la fin du XVIème siècle et m'a fait partager l'univers de ses habitants et plus spécifiquement des peintres miniaturistes. L'intrigue policière mêlée à la culture ottomane se révèle très prenante et habilement construite.
J'ai particulièrement apprécié la narration alternée des différents personnages de l'histoire et leur façon de s'adresser directement au lecteur.

Pendant toute ma lecture je n'ai pas pu m'empêcher de rapprocher ce roman du célèbre le nom de la rose d'Umberto Eco : une intrigue policière dans un contexte historique avec des crimes violents qui touchent des personnes en lien avec des manuscrits (et donc la pensée) et des controverses sur l'hérésie ou non de certaines pratiques. On a également des digressions sur différents sujets. Une histoire qui est donc prétexte à un propos érudit et à des réflexions philosophiques, religieuses et métaphysiques très intéressantes. J'ai découvert un pan de la culture ottomane méconnu qui m'a donné envie d'en apprendre plus sur l'histoire de ce pays et de découvrir la ville d'Istanbul.
Une lecture exigeante mais qui m'a apporté une grande satisfaction intellectuelle.
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En refermant « Neige » d'Orhan Pamuk, j'ai eu l'étrange sensation de passer à coté de quelque chose. Avec « mon nom est rouge » je sais que j'avais raison. Quel roman ! D'abord une vraie histoire, bien construite et qui tient en haleine, ayant pour cadre Istanbul en hivers en 1591. Un meurtre. Un livre. de l'amour. Des intrigues. du sang. Mais surtout une vraie recherche sur l'art et sur la relation que nous avons avec lui. Une interrogation sur le choc des cultures et le mélange qu'il en résulte. le tout écrit magnifiquement.
Un livre à déguster en prenant sont temps, en faisant des poses pour se laisser imprégner jusqu'à pouvoir imaginer regarder une miniature réalisée par les maîtres d'Herat.
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Livre absolument fascinant, pour qui s'interroge sur la représentation du monde, les affrontements qu'elle peut susciter entre différentes orientations esthétiques et donc entre les enjeux philosophiques et politiques qui les sous-tendent. Il ne faut jamais l'oublier en regardant un tableau.
(C'est l'un de mes grands sujets d'exploration depuis des années - émissions à France-Culture, articles, livres).

En octobre 2012, invité spécial au Louvre, Pamuk a expliqué comment il avait longtemps tourné autour du sujet avant de découvrir ce qui pouvait en conduire le fil - il s'est alors plongé dans l'histoire des miniatures persanes, mal connue en Occident.. Et il a développé une trame romanesque, poignante souvent haletante même.

L'action de "Mon nom est Rouge" se situe à Istambul, durant l'hiver 1591 où neige couvre la Corne d'Or. Par contraste, un personnage appelé le Noir enquête pour retrouver l'assassin de Monsieur Délicat, un miniaturiste du Sultan. Combat des couleurs fondamentales
Au tout début du roman, le cadavre de Monsieur Délicat se plaint car il gît au fond d'un puits et aspire à une sépulture.

On découvre peu à peu l'affrontement entre deux visions du monde dans l'Empire ottoman de la fin du XVIème siècle.
En digne successeur du grand Soliman le Magnifique, pour manifester que rien au monde ne lui est inconnu, le Sultan d'alors charge ses miniaturistes d'introduire la technique italienne de la perspective dans l'illustration d'un livre. Or, chez les gardiens des traditions picturales de l'Empire ottoman, cette intrusion de la perspective propre à l'Occident suscite une opposition farouche, au besoin, le crime. On ne plaisante pas avec les codes et les lois qui régissent la représentation, car il s'agit toujours de « rendre visible l'invisible ».
Vaste question.

Et Pamuk met en scène le Rouge en personne: la couleur s'interroge sur elle-même. le Rouge s'avance tel un vrai tourbillon, la vivacité même, s'enivrant de l'énumération vertigineuse des manifestations de sa présence, un peu partout, sur les somptueux atours, « les bannières des assaillants, les épées merveilleuses, les nappes de festin, les tapis indiens, les frises des bas relief, les fins liserés autour des miniatures, sur les grenades et les fruits de pays fabuleux, les nez frappés d'insolation, les aurores aux doigts de rose, les ailes des anges, les lèvres de femmes, les plaies de cadavres et les têtes coupées"
J'ai adoré ce livre dont j'ai publié un extrait dans mon anthologie "Le Goût du Rouge" (Mercure de France fév. 2013). Je reprends d'ailleurs ici une partie de ma présentation,
Rappel de l'ensemble :
http://www.mercuredefrance.fr/livre-Le_go%C3%83%C2%BBt_du_rouge-2201-1-1-0-1.html

Pour le centenaire de la mort de Rimbaud (1991), j'avais composé pour F.Culture une série d'émissions autour de son célèbre poème des "Voyelles" . Ce fut pour moi le point de départ d'une grande exploration de l'histoire picturale, symbolique et culturelle des couleurs -
J'y suis toujours plongée.

Au fil des critiques fort intéressantes des lecteurs de Babelio sur ce livre de Pamuk, je conseille aussi le point de vue de Sylvain Maresca que j'ai découvert sur son blog culture visuelle (cf le lien

Lien : http://culturevisuelle.org/v..
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De Pamuk, je n'avais lu jusque là que "Istanbul", qui tient plus de l'autobiographie et de l'essai littéraire que de la fiction. Cet ample roman se situe aussi à Istanbul mais à la fin du seizième siècle. Au premier plan on y trouve une enquête quasi-policière : un enlumineur de l'atelier de miniaturistes de Maître Osman, Monsieur Délicat a été assassiné à coups de pierre. le Noir, qui a fait brièvement partie de cet atelier dans sa jeunesse revient à Istanbul après douze ans d'errance ; il était amoureux de la belle Shékuré, fille de Monsieur l'Oncle, autre miniaturiste réputé. Il est mêlé à ces meurtres car L'Oncle est lui aussi assassiné. Les soupçons se focalisent sur trois autres enlumineurs, Papillon, Cigogne et Olive. Tour à tour les personnages prennent la parole. C'est un roman très érudit sur son sujet et cette époque, plein de considérations philosophiques sur l'art, sur l'idée que se font les hommes de Dieu. Malgré quelques longueurs et redites, ce roman m'a fasciné.
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Pour ma première incursion dans la littérature turque j'ai choisi Mon nom est Rouge et j'ai eu la main heureuse. Quel beau roman de Orhan Pamuk. L'écriture est superbe, la forme de roman choral est astucieuse, le sujet instructif caché derrière une énigme policière dont on ne connaîtra le dénouement qu'à la toute fin et l'érudition de l'auteur n'a rien à envier à l'érudition de Umberto Eco.

J'ai beaucoup appris sur l'art du miniaturisme ottoman et sur les raisons pour lesquelles les peintres dessinaient d'après mémoire plutôt que d'après modèle comme le faisaient les Européens. Les explications à ce sujet m'ont permis d'approfondir ma connaissance de la religion musulmane. D'ailleurs ce roman est une mine de renseignements sur la philosophie de l'art en Turquie à cette époque, C'est extrêmement intéressant et à mon avis le vrai sujet de ce roman.

Je ne connaissais pas du tout Orhan Pamuk n'ayant jamais entendu parler de lui. C'est grâce à Babelio que je l'ai découvert alors je remercie tous les babeliotes qui en ont fait mention.

Je ne suis pas amateur d'histoire de l'art mais je considère que tous ceux qui s'y intéressent ont là tout un pépite. Tant qu'à ceux qui aiment les intrigues policières ils y trouveront aussi leur compte s'ils ont un peu d'intérêt pour L Histoire en général. Certains ont reproché à Pamuk la longueur et les répétitions de cette oeuvre et ils ont un peu raison mais quel bonheur de lecture.

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Le titre et la couverture de ce roman turc m'avait interrogé, il fallait que je le lise ! Et je ne l'ai pas regretté !
L'histoire des maîtres enlumineurs, les descriptions tellement détaillées qu'on a l'impression d'avoir les images sous les yeux… Un roman polyphonique mêlant plusieurs sujets qui m'a fait voyager dans cette Turquie d'alors. Un pur régal, ce livre, je l'ai conseillé plusieurs fois et je n'ai qu'un seul regret : ne pas l'avoir dans ma bibliothèque.
Il faut absolument que je lise ses autres livres.
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C'est un voyage merveilleux dans un Orient magique que nous propose Orhan Pamuk, dans l'univers des grands maîtres enlumineurs, calligraphes et peintres miniaturistes. Un des quatre peintres de l'Atelier de Maître Osman a été assassiné. Tous les quatre travaillaient également pour Monsieur l'Oncle pour un livre de miniatures commandé par le Sultan pour le millénaire de l'Hégire. Maître Osman reste fidèle à la grande tradition des anciens maîtres perses d'Hérat, de Qazvin ou de Tabriz qui s'exerçaient à représenter le monde vu par Dieu, en se conformant aux règles en vigueur dans leur Atelier, en s'efforçant de ne pas avoir un style personnel ; Monsieur l'Oncle est attiré par la peinture réaliste des maîtres vénitiens ou européens qui utilisent la perspective et cherchent à restituer trait pour trait leurs modèles, privilégiant la forme aux sens. Pour les partisans de l'Islam, pour le Hodja d'Erzurum, cette peinture à l'occidentale est impie et contraire aux versets du Coran. Mais c'est avant tout une bataille entre Orient et Occident, prémices d'un déclin en marche, conflits attisés par la jalousie entre peintres ou grands maîtres ambitieux ou orgueilleux, désireux de reconnaissance ou de puissance. C'est tout à la fois une réflexion sur l'art de la miniature, une intrigue policière qui tient le lecteur en haleine, une leçon de sagesse, un voyage dans l'histoire du royaume perse et de l'empire ottoman, une mine de références artistiques et légendaires . Les multiples voix qui s'adressent tour à tour au lecteur rendent le récit passionnant et vivant. Un grand roman.
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