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Jean-François Pérouse (Traducteur)
EAN : 9782070344543
640 pages
Gallimard (05/04/2007)
3.65/5   511 notes
Résumé :
Le jeune poète turc Ka quitte son exil allemand pour se rendre à Kars, une petite ville provinciale endormie d’Anatolie. Pour le compte d’un journal d’Istanbul, il part enquêter sur plusieurs cas de suicide de jeunes femmes portant le foulard. Mais Ka désire aussi retrouver la belle Ipek, ancienne camarade de faculté fraîchement divorcée.

A peine arrivé dans la ville de Kars, en pleine effervescence en raison des prochaines élections, il est l’objet d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (68) Voir plus Ajouter une critique
3,65

sur 511 notes
Neige, c'est le genre de roman qui fait travailler le cerveau. Même une fois la lecture terminée (si on n'abandonne pas en route), on ne peut s'empêcher d'y penser à nouveau, d'interpréter autrement les actions des personnages, d'en découvrir des sens cachés, etc. Chacun peut en retirer quelque chose de différent. J'irais jusqu'à dire qu'il peut hanter. On ne peut s'en sortir indemne. C'est que le roman est complexe. D'ailleurs, pour cette même raison, il est ardu de le résumer et, s'y atteler ne peut mener qu'à une tentative incomplète. C'est pourquoi je vais me limiter et essayer de la réduire à trois éléments, pour l'instant.

Le premier est Ka. Il s'agit d'un jeune poète turc ayant grandi à Istanbul et vivant en exil en Allemagne depuis plusieurs années. C'est maintenant un étranger, il ne suit pas tous les préceptes islamique (par exemple, il boit de l'alcool) et pense comme un Occidental, un laïc. le deuxième est Kars, une petite ville pauvre (presque arriérée) du nord-est de l'Anatolie, au pied des montagnes. Là-bas, après de sluttes ethniques, un radicalisme religieux, un islamisme fanatique semble prendre le dessus. Des jeunes filles ont préféré se suicider plutôt que retirer leur foulard pour pouvoir fréquenter l'école alors même que des élections municipales se préparent. le troisième est la neige qui tombe et qui tombe sur Kars pendant trois jours et l'inspiration qu'elle procure à Ka. C'est un élément ambigû car, si elle est source de poésie pour le jeune homme, elle semble embourber, endormir, figer toute la ville dans sa situation explosive.

Même si le roman aborde des thèmes très sérieux (identité, laïcité, radicalisation religieuse, etc.) et encore d'actualité, le grand auteur Orhan Pamuk ratisse plus large, dresse un portrait (une critique ?) de sa société. Même s'il semble prendre mille détours pour y arriver… C'est que Kars représente les provinces et la Turquie elle-même, en plein bouleversement. Cette idée d'une ville ensevelie sous la neige qui tombe, et qui tombe sans arrêt… d'abord je trouvais cela plaisant. Il faut dire que ce n'est pas une tempête qui s'abat sur la ville mais de jolis flocons en continue. Puis je me suis demandé : pourquoi cette neige ? L'auteur aurait pu trouver autre chose pour intégrer des poèmes à son roman. (Petite déception : Pamuk mentionne à plusieurs endroits les 40 poèmes que la neige inspire à Ka mais j'aurais bien aimé qu'il les intègre au roman.) Plus j'y pensais, plus cet élément me semblait incongru. D'autant plus que j'y associe l'immaculée. Or, la ville et les personnages sont tout sauf innocents… Sert-elle à rendre tolérable l'intolérable?

En effet, un drôle de climat règne sur la ville. Les fanatiques religieux sont prêts à tout pour faire avancer leur cause (outre ces jeunes filles qui se suicident pour leur voile et leurs convictions, un fou tire à bout portant sur le directeur d'école, un imam déconnecté et le chef terroriste Lazuli n'est pas en reste), les kémalistes et les républicains laïcs provoquent (l'acteur Sunay cherche les coups d'éclats) alors que les militaires profitent des débordements pour fomenter un putsch qui tourne au carnage. Et Ka dans tout ça ? Il est tiraillé de tous côtés. Chacun veut le rallier à sa cause et je me demandais bien pourquoi. Il est tellement différent d'eux, presque indifférent. Et le seul appui qu'il peut leur donner est la vague promesse d'un article dans un journal occidental. Pour tous ces malheureux, il est un étranger qui ne les comprend pas, encore plus malheureux qu'eux. Même son amour pour la belle Ipek semble compromis.

Ce climat et cette ribambelle de personnage, c'était original mais pas nécessairement captivant. En plein milieu du roman de 486 pages, l'ennui commençait à me menacer. L'intrige elle-même semblait tourner en rond, tellement que j'avais l'impression qu'elle s'étirait sur plusieurs semaines même si je savais qu'elle ne se déroulait que sur quelques jours. C'est probablement dû au rythme lent, au style de narration. Mais, évidemment, j'ai poursuivi ma lecture. Ce qui entretenait ce désir, c'est entre autres le sort réservé à Ka. Parler de suspense serait un peu exagéré mais la curiosité était bel et bien là. Dès le début, le narrateur (Orhan Pamuk lui-même ?) nous informe que le personnage mourra. Il le mentionne, presque négligemment, mais on ne sait ni où ni comment cela se produit et, moi, j'ai essayé de suivre cette piste tout au long de ma lecture. Qui allait le commettre et pourquoi ? En vain…

Bien sur, le sujet lui-même intrigue. le fanatisme religieux et la radicalisation islamique sont des phénomènes que l'Occidental laïc en moi souhaiterait mieux comprendre. Triste constat, ce propos est encore d'actualité, il suffit de lire les journaux et d'écouter les nouvelles pour s'en rendre compte. Mais tout n'est pas sombre ou nostalgique, et l'écriture est empreinte de poésie (paysage, neige, rencontres inspirantes) qui reste gravée dans la tête. Dans tous les cas, on y retrouve quelque chose d'irréel, de surréel, quelque chose d'un rêve inachevé auquel on souhaite se rattacher.

Enfin, d'un point de vue plus littéraire, d'autres raisons m'ont poussé à continuer ma lecture. J'ai trouvé au roman Neige des qualités kafkaïennes. D'abord, ce malaise qui ne me quittait pas. Ensuite, ce personnage, Ka, qui erre au gré des rencontres, déambule dans une ville enneigée et cauchemardesque, sans but précis (son reportage semble bidon car il rempli son carnet de poèmes plutôt que d'informations pertinentes), presque opprimé, troublé. Il y a toujours cette distance entre lui et les habitants de Kars. Et tous ces dialogues de sourds, ces gens qui bien souvent ne se répondent pas et font écho au son de leurs voix. Un univers terrible et fascinant qu'on peut difficilement mettre de côté.
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Avec Pamuk, je voyage en Turquie pour la première fois. Un voyage que j'ai failli abandonner en cours de route, un voyage difficile avec des filles qui se suicident, des policiers qui tirent dans la foule et un journaliste qui décrit les événements avant qu'ils n'arrivent!

On y trouve un poète dont on ne peut pas lire la poésie, un poète qui a peur du bonheur parce que selon lui, chaque bonheur apporte une part égale de malheur. Un poète exilé qui retourne dans un village isolé de Turquie pour trouver l'inspiration et l'amour.

Mais le plus dramatique dans ce roman ce n'est pas la souffrance individuelle, mais le malheur d'une société divisée où on peut tout autant être flingué par les islamistes que fusillé par les militaires ou « dispersé » par les bombes d'un autre groupe extrémiste. Et que dire du sort des femmes, qu'on veut voiler ou dévoiler, mais qui sont surtout des objets à posséder!

J'ai du mal aussi avec toute la dimension mystique, avec l'importance que la foi prend dans le roman, mais aussi avec la récupération religieuse, la zizanie entre les groupes qui sert peut-être les intérêts d'un autre. Je m'interroge aussi sur ces croyants fanatiques qui s'informent du signe astrologique de leur visiteur…

Malgré la beauté de la Neige, je n'ai pas eu le goût de rester plus longtemps en Turquie… J'espère qu'il existe des itinéraires plus faciles pour aborder le pays et surtout des Turcs plus heureux que les personnages de ce roman.
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Quelle idée de lire un roman de 600 pages en plein été, au camping, alors qu'il fait 35 degrés et que le roman s'appelle Neige ! Pas les meilleurs conditions pour une immersion dans l'atmosphère !

Est-ce ce qui a fait que le début de ma lecture a été si poussif ? Ou plutôt la volonté de l'auteur d'instaurer un climat non seulement glacial mais surtout figé par la neige et par l'immobilisme de cette petite ville que le narrateur vient bouleverser par ses questions.

J'ai d'abord pensé que l'auteur était lui même journaliste car le début est vraiment une suite d'"entretiens" avec les différentes figures fortes de la ville. L'auteur s'était en effet destiné dans un premier temps au journalisme mais tourné ensuite vers la littérature où il cherche les formes les plus adaptées pour retranscrire la société turque où il a grandi, coincé entre la religion, le nationalisme et l'aspiration à la modernité. le microcosme de la petite ville de Kars utilisé dans Neige permet d'observer au plus près les tensions de la société.

Si le rythme est un peu lent, avec des chapitres qui se ressemblent au début, l'évènement qui survient dans le milieu du livre permet de mieux comprendre le tout. Les multiples strates du récit avec la réflexion sur l'inspiration poétique, la confusion entre le premier narrateur et l'auteur qui devient ensuite narrateur, l'histoire d'amour bancale dont on ne comprend qu'ensuite les raisons de cette fragilité, tout cela contribue à rendre le livre de plus en plus intéressant. le travail notamment autour de ces poèmes dont on découvre la genèse sans jamais les lire est vraiment impressionnant de maîtrise.

L'auteur s'évertue en plus à prendre parfois le lecteur à contrepied de ce qu'il attend, ce que j'apprécie toujours. Il en rend d'autant mieux les ambiguïtés et certaines incohérences du peuple turc, et permet ainsi de mieux comprendre ce qui, au delà de sa position géographique, fait de ce pays un carrefour essentiel de notre monde moderne, tellement impliqué dans les enjeux de notre époque.
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Je dois avoir lu ce roman en mai 2015, alors pourquoi en publier une critique maintenant après que tant de temps s'est écoulé ? Peut-être qu'il aura fallu la lumière des derniers évènements dans ce vaste pays pour dessiller mes yeux et enfin entrevoir que Neige recouvre aussi tout le sang qui s'en est écoulé ? Peut-être que la lecture de Naguib Mahfouz autre prix Nobel littéraire, autre maître de la peinture sociale de son pays, me ramène inconsciemment par une étrange association à Orhan Pamuk ? Plus simplement il me semble que la courante conjoncture justifie d'attirer votre attention sur ce livre qui prend aujourd'hui une toute autre dimension capable de dépasser largement ses intentions initiales.

Je vais commencer par vous dévoiler pourquoi je me suis retenu à l'époque : la lecture m'a été tellement fastidieuse à certains endroits, j'avais vraiment la désagréable impression de patauger lamentablement, de ne pas avancer dans cette Neige si épaisse. Au point de longtemps hésiter à continuer, à quoi bon piocher dans ce qui me devenait un enfer blanc au fil des interminables randonnées de Ka retraçant inlassablement le même itinéraire, tournant en rond à m'en donner le tournis. C'est bien simple : vingt fois j'ai failli tout laisser tomber, l'envoyer balader. Et je me souviens de cette furieuse démangeaison d'écrire : Qu'à Ka à Kar ? Or, c'eut été m'offrir à bon compte un défouloir à la fois injuste et inapproprié par rapport à la qualité intrinsèque de l'oeuvre.

J'ai une horreur viscérale des descriptions réalistes et détaillées, je n'en éprouve d'autre ressenti qu'une vaste perte de temps. Je trouverais cent fois plus efficace de les remplacer par une photo et dans le cas qui nous occupe un plan de la ville aurait bien pu avantageusement me libérer d'une centaine de page. Cela m'est propre. Ainsi j'exécrai les lectures scolaires imposées de Balzac, l'horreur absolue de mon point de vue, pour l'exacte même raison. Il faut savoir que je lis très lentement et je m'interroge si ce n'est pas probablement lié en partie à cause d'une singularité identifiée depuis peu : je serais potentiellement sujet à l'aphantasia. Donc ce qui m'insupporte au plus haut point peut-être source de délectation pour une majorité de lecteurs et encore plus de lectrices. Et dans le cas de Pamuk je détectai suffisamment d'autres qualités pour ne pas dézinguer à tout va sur le coup d'une frustration.

Mais quelque soit l'être singulier qui le reçoit, un chef d'oeuvre, parfois par de très tortueux détours du destin, fini toujours par tracer son chemin. Ainsi donc outre les errements de Ka, poète turque maudit, exilé en Allemagne et bloqué quelques jours à Kar par le hasard d'une tempête neige, dont Pamuk nous emmène dans les traces des longues promenades déjà mentionnées mais aussi à suivre les élans du coeur et les affres de la création, Neige décrit de multiples facettes de la Turquie à travers lesquelles l'on ne peut que ressentir l'amour de l'auteur pour son pays. Pamuk arrive, me semble-t-il du moins, par un tour de force remarquable à rendre sensible les différentes tensions qui écartèlent son pays entre la montée de l'islamisme radical, les différents courants politiques, les particularismes régionaux, la douloureuse et longue histoire des antécédents claniques et raciaux, le sexisme et les tentatives de libération de la femme, le conflit intergénérationnel...

Alors donc aujourd'hui, à tout cela qui en soi était déjà un argument suffisant pour trouver un profond intérêt à la lecture de ce remarquable ouvrage vient s'ajouter une dimension métaphorique et prémonitoire. C'est l'histoire de ce putsch de pacotille dont l'orchestration théâtrale ne peut manquer d'interroger sur le commanditaire et qui vient à point nommé pour renforcer un pouvoir totalitaire et servir de justification à toutes les exactions et crimes qui l'accompagnent. La fin du livre se termine, si je me souviens, mais cela aussi est un ressenti personnel indépendant de la volonté de l'auteur, sur le désespoir d'un triste exil du poète et son questionnement insupportable sur la santé et la survie de ceux restés exposés à l'arbitraire. Exil dont à mon entendement Orhan Pamuk ferait bien d'évaluer la nécessité à l'heure ou les arrestations dans l'intelligenciat turque se multiplient et où sonne de façon de plus en plus assourdissante le sinistre glas de la mise à sac des libertés. Alors tant que ce livre paru en 2002 en turc et disponible en français à partir 2005 n'est pas encore interdit il m'a maintenant semblé utile d'y attirer toute votre attention.

Tant il est vrai que nos libertés ont une très fâcheuse tendance à rapidement fondre comme neige au soleil en cette période de réchauffements climatiques, même incapable de former consciemment des images mentales je ne peux m'empêcher de percevoir avec une acuité sans cesse grandissante l'association, prémonitoire elle aussi, entre Neige d'Orhan Pamuk et Guernica de Pablo Picasso. Seul un grand artiste ou poète peut ainsi nous éclairer en une fulgurance sur l'état du monde par sa sensibilité singulière d'en percevoir les vibrations qui nous sont autrement inaccessibles hormis par l'intermédiaire de son oeuvre. Au moins vous voilà prévenus, à vous de voir, à vous de lire...
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La neige est souvent présente dans les romans et récits d'Orhan Pamuk. Elle nous semble plutôt incongrue, déplacée, étrange, presque surnaturelle, que vient faire cette neige sur le paysage turc, que vient-elle nous dire en mettant une épaisse couche de blancheur sur les coupoles grises, sur les ruelles aux pauvres façades, sur la plaine monotone, sur les villages de tôle et de parpaings, sur les maisons abandonnées?

En Turquie, même ce qui est neuf a l'air déjà vieux, usé, démodé. Les traditions sont tellement puissantes que la modernité est tuée dans l'oeuf. Les vendeurs de simit et les fumeurs de narguilé, les femmes en pantalon bouffant dans les champs, les hommes attablés au café jouant au tric-trac, le style des maisons, le goût des böreks, la musique déversées par les autoradios, le mépris pour le code de la route, tout cela reste intact.

Mais la neige, elle, est toute neuve. Elle vient chambouler les habitudes, les esprits, les âmes, elle désoriente le voyageur, elle l'éblouit, le charme, l'endort.
La neige provoque des accidents, elle est linceul et voile de mariée, une page blanche pour y inscrire des poèmes, elle isole et protège les amoureux, elle étouffe le bruit des balles, elle boit le sang des martyrs.
Dans Kars enneigée, le poète qui s'appelle Ka, comme Kafka, marche avec peine dans les rues désertes sans savoir ce qu'il va trouver.
Exilé dans son propre pays, étranger aux intrigues, traversé par l'amour, la poésie et le malheur, il se débat comme dans un piège sans savoir de quoi il est coupable.
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critiques presse (1)
Lecturejeune
01 juin 2006
Lecture jeune, n°118 - Ka est un poète turc vivant en Allemagne depuis douze ans lorsqu’il rentre dans son pays. Missionné par un journal local, il va enquêter dans l’est du pays, à Kars, sur une mystérieuse vague de suicides de jeunes femmes voilées. « Il est sûr que la cause de ces suicides réside dans un extrême malheur de nos filles ; il n’y a pas de doute à cela, dit à Ka le préfet adjoint. Mais si le malheur était une vraie cause de suicide, la moitié des femmes en Turquie se seraient suicidées. » Sur place, Ka est confronté à plusieurs réalités qui le déstabilisent sérieusement : les kémalistes activistes, des intégristes nocifs et une femme qu’il retrouve et dont il tombe fou amoureux. En toile de fond, la neige omniprésente dilue la réalité dans sa texture ; elle fait s’étirer le temps et étouffe les cris d’une ville meurtrie. Neige est à la fois un roman très poétique — l’écriture est majestueuse — et très réaliste : la société décrite l’est grâce à une plume intransigeante et incisive. Les personnages sont tiraillés entre le désir de vivre un bonheur individuel et celui d’appartenir à une communauté, les deux étant incompatibles. Dans la vision de Pamuk d’une Turquie en quête d’elle-même, il y a quelque chose de l’ordre de l’accomplissement, du destin : le pire doit advenir pour engendrer un changement sociétal. Ka y laissera sa peau, nous l’apprendrons par le narrateur, ami du poète, qui retrace pour nous ses derniers moments. L’auteur, poursuivi dans son pays pour ses positions sur le génocide arménien, dit avoir écrit là son roman le plus politique. _ Michelle Charbonnier
Lire la critique sur le site : Lecturejeune
Citations et extraits (63) Voir plus Ajouter une citation
«Que fais-je dans ce monde? se demanda Ka. Ma vie est aussi misérable que le paraissent de loin les flocons de neige. L'être humain vit, s'érode, disparaît.» Il se dit que dans un sens il avait déjà disparu, mais que dans l'autre il existait encore : il aimait à se penser en flocon de neige, et suivait avec amour et tristesse la voie que prenait sa vie. Il se rappela l'odeur de son père quand il se rasait. Il se souvint de ses pieds froids dans les pantoufles de sa mère qui préparait le petit-déjeuner à la cuisine, d'une brosse à cheveux, du sirop couleur rose, sucré, qu'on lui faisait boire à son réveil après une nuit passée à tousser, de la cuillère dans sa boucher, de tous ces petits riens qui font la vie, de l'ensemble de ces choses, du flocon.
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- [...] Tu es venu parce que tu es malheureux, dit Necip.
- Qu'est-ce qui te fait dire ça?
- Tes yeux : je n'ai jamais vu de regard aussi triste que le tien... Maintenant moi aussi je ne suis pas du tout heureux ; mais je suis jeune, moi. Le malheur me donne de la force. À mon âge je préfère être malheureux plutôt qu'heureux. À Kars, seuls les idiots et les mauvaises gens sont heureux. Mais une fois que je serai parvenu à ton âge, j'espère bien être inondé de bonheur.
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Pourquoi ce poème est-il si beau?
Il rentra sans tarder à son hôtel en pensant au poème qu'il écrirait, sous la neige qui tombait.
A peine dans sa chambre d'hôtel,Ka enleva son manteau. Il ouvrit un cahier à carreaux, à la couverture verte, qu'il avait acheté à Francfort et commença à écrire son poème tel qu'il lui venait à l'esprit, mot après mot. C'était comme si quelqu'un d'autre le lui murmurait à l'oreille: il se sentit rasséréné; cependant, il s'adonnait avec la plus grande attention à ce qu'il faisait. Comme auparavant aucun poème ne lui était venu sous l'effet d'une telle inspiration, il éprouva quelques doutes sur sa valeur. Mais au fur et à mesure que les vers se succédaient, sa raison lui disait que le poème était en tous points parfait,....
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Le vrai problème du vrai poète est toujours le même. S’il est heureux pendant une longue période, il devint ordinaire. S’il est malheureux pendant une longue période, il ne peut plus trouver en lui la force de tenir en vie sa poésie… (p.149)
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- Moi, je suis très heureux en ce moment. Je ne veux pas être un héros, pas du tout. Le rêve d'héroïsme, c'est la consolation des malheureux. Et d'ailleurs, pour les gens comme nous, etre héroïque, c'est soit tuer quelqu'un soit se tuer soi-même.
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Videos de Orhan Pamuk (17) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Orhan Pamuk
Le nouveau roman "Les Nuits de la Peste" de l'écrivain turc Orhan Pamuk se présente comme le théâtre d'une grande fresque historique qui résonne avec l'actualité. La pandémie mondiale est venue donner une actualité poignante au roman qu'il écrivait depuis trois ans.
Son récit mêlant fiction et réalité raconte les ravages une épidémie de peste dans l'île fictive de Mingher en 1901, contrée de l'Empire Ottoman en déclin. Un livre à la croisée des chemins et des genres. Roman historique, roman d'amour et roman politique, ce livre vient interroger notre rapport à la fiction et au réel, l'imaginaire se mélangeant au réel, et le romanesque à l'historique. La véritable prouesse d'Orhan Pamuk consiste à jouer avec les codes de la fiction et à rendre la frontière poreuse entre l'histoire et la grande Histoire. Au milieu de ce drame humain et politique, l'amour est un refuge pour ceux qui se battent contre l'épidémie.
Orhan Pamuk nous livre une réflexion sur le pouvoir et la liberté, à l'heure où s'amorcent le délitement de l'Empire Ottoman et les conflits de succession entre sultans.
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