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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Une fois de plus j'ai appris , je me suis divertis, je me suis passionnée par cette histoire, j'ai voyagé dans le temps grâce à Michel Pastoureau. Une étude à travers les siècles, sur les tissus rayés, les animaux au pelage zébré , les symboles formés de raies, à la fois savante, ludique.
Porter des vêtements à rayures fut longtemps un signe distinctif souvent infamant, et puis, les modes , les moeurs changent les rayures deviennent à la mode, elles sont signe de modernité, d'originalité, de ralliement . Paradoxalement aussi les rayures peuvent être positives et négatives, protectrices et dangereuses.
Un cadeau de Noël fort apprécié !
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Passionnante plongée dans les représentations mentales des hommes du Moyen-Âge, avec pour guide Michel Pastoureau, dont j'ai déjà adoré l'histoire de la couleur bleue et celle du cochon. Et il est bien vrai que nous avons bien du mal à nous imaginer dotés de l'outillage intellectuel de cette période si rude, ou la pensée magique prenait souvent le pas sur la connaissance, le plus souvent lacunaire et surtout pour nous, paradoxale ... Un livre court et dense, très facile à lire malgré son érudition, qui intéressera autant les férus d'histoire des civilisations que les couturières.

Nous voici donc confrontés à l'histoire des rayures et des tissus rayés. Nous apprenons que les surfaces, au Moyen-Âge, sont signifiantes. On classifie ainsi l'uni, le rayé et le semis auxquels sont conférés des valeurs positives ou négatives spécifiques. Le semé par exemple (fleur de lis, hermines ...) est toujours valorisant, solennel, majestueux, sacré, signe de pouvoir, attribut marial, symbole de fécondité, de souveraineté. A l'opposé, le tacheté sous-entend pustuleux, scrofuleux, bubonique, lépreux, bref, l'antichambre de la mort ...

Le rayé, c'est le passage d'un état à un autre. Le terme "varietas" désigne à la fois la tromperie, la méchanceté, la lèpre. La rayure horizontale est infamante, elle signifie servilité, pare les prostituées, les personnes en marge et même, en héraldique, elle indique la bâtardise. Parfois, la rayure indique seulement l'ambivalence, l'ambiguïté : le vêtement rayé est attribué à Caïn, Judas, et même à Joseph car croire en la conception naturelle de Jésus est une hérésie. La rayure est donc considérée comme transgression de l'ordre social. Elle distingue le maître du valet, le bourreau des victimes, les fous des sains d'esprit, les damnés des élus.

Jusqu'à l'explosion de la mode des rayures au XVIIIème siècle. Buffon réhabilite alors le zébre comme "le quadrupède le plus élégamment vêtu" ... et les 13 colonies insurgées de l'Amérique donnent le ton avec leurs "stripes". Cela devient une folie, aussi bien dans le textile, la décoration, le vêtement. Le statut visuel et culturel de la rayure se transforme radicalement pour évoquer la liberté et les idées nouvelles. La jeunesse, l'esprit sportif, le bord de mer comme la rayure horizontale des tricots de marins, la rayure devient chic.

Sauf pour de notables exceptions qui forment autant de rémanences : si aujourd'hui le banquier et le malfrat portent tous deux des costumes à rayures, ce ne sont pas du tout les mêmes. Au XIXème siècle, le costume rayé des bagnards a pour origine les colonies pénitentiaires américaines, il sera repris comme marque d'infamie pour les déportés victimes du nazisme.

La rayure joue le rôle de trompe-l'oeil, de mise en garde. Elle montre et cache à la fois, elle filtre entre interdiction et perméabilité : en signalisation routière, elle signale une barrière que l'on peut éventuellement franchir mais avec précautions.

La rayure est donc une marque culturelle, si rarement présente dans la nature (à part le tigre et le zèbre). Michel Pastoureau nous en instille toutes les différentes interprétations ... Difficile de regarder désormais une surface rayée sans y penser. Et pour moi, une explication historique de ma préférence pour les étoffes à semis comme le Liberty !

Lien : http://www.bigmammy.fr/archi..
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Essai de Michel Pastoureau. Lettre P de mon Challenge ABC critiques Babelio.

Du costume des jongleurs ou des bourreaux au tristement célèbre pyjama rayé des détenus concentrationnaires, du pelage du tigre au cuir lustré du zèbre, de la marinière à la livrée domestique, des chasubles sportives à l'uniforme militaire ou sportif, de l'héraldique des blasons aux drapeaux nationaux et jusqu'au code de la route, Michel Pastoureau épluche la rayure et les tissus rayés. Il retrace l'histoire culturelle de la rayure qui "n'est pas une forme, comme le besant, l'étoile ou la rouelle, c'est une structure." (p. 29)

Du "caractère dévalorisant, péjoratif ou nettement diabolique de la rayure vestimentaire" (p. 11), l'auteur démontre comment "la rayure médiévale était cause de désordre et de transgression" avant que "la rayure moderne et contemporaine [se soit] transformée en instrument de mise en ordre." (p. 15)

La notion culturelle qui prétend que les rayures verticales agrandissent l'espace et que les rayures horizontales le tassent n'est pas tout. La rayure véhicule des traditions d'exclusion, de mise à l'écart voire de mise à l'index et de disctinction. Les porteurs de tissus rayés furent tour à tour exclus, diabolisés, puis reconnus et consacrés.

La rayure n'est jamais neutre: aujourd'hui encore elle singularise et elle frappe les esprits. Les frères Dalton et leur casaque jaune et noire, Coluche et sa salopette ou Picasso dans sa marinière sont autant de représentants divers de la rayure.

Ce court essai est très bien écrit, même si je reproche à l'auteur d'être un tantinet trop assertif voire péremptoire dans ses affirmations. Mais il défend avec conviction et documents à l'appui des idées clairement exprimées et parfois originales.
Lien : http://lililectrice.canalblo..
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J'aime énormément Michel Pastoureau , l'homme est passionnant à écouter ( j'ai assisté à plusieurs débats où il intervenait , par exemple à Grignan) et son travail , magnifique d'érudition maîtrisée , sur les couleurs , les symboles ou ,ici, les tissus est remarquable. Il permet une lecture intelligente et précise des tableaux anciens (par exemple) en évitant les pièges de l'anachronisme ou du délire interprétatif. Un régal.
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Drôle de titre pour un ouvrage d'art. Drôle de titre pour un ouvrage d'histoire. Ce livre est pourtant l'un et l'autre. Michel Pastoureau s'empare-là d'un sujet surprenant, les rayures et les tissus rayés. Dans notre monde où l'image se capture d'un doigt, en appuyant compulsivement sur un bouton, savons-nous encore qu'elle se construit ? L'image est devenue évidence immédiate à nos esprits contemporains, alors qu'il n'en est rien, nous avons simplement désappris, à l'investir, à la décrypter et à la lire pour y mettre ou y trouver du sens. Au Moyen-Age, l'iconographie est construite, savamment, pour délivrer un message consistant et toujours important. Au coeur de l'image, la couleur parle, la couleur dit et affirme. Non pas une humeur ou un choix, « j'aime beaucoup le rouge », « l'orange me sied peu au teint ». La couleur signifie socialement et symboliquement. Ainsi est sera-t-il aussi de la rayure. Il est d'abord nécessaire de s'accorder sur ce qu'est la rayure. Michel Pastoureau, avec érudition, précision et clarté, précise. Naissant du découpage du plan en un certain nombre de raies ou de bandes, la rayure se distingue pour l'oeil et l'esprit médiéval des raies ou des bandes se superposant sur un plan uni, pair. Quand la bichromie est équilibrée, il n'y a qu'un plan pour l'oeil médiéval. En revanche, quand le nombre de bandes est impair, il y a, pour l'homme du Moyen-Age, deux plans, la couleur dominante étant celle du fond. Impair, disruptive, clivante, la rayure est infamante, transgressive, impie, elle habille le traître Judas ou Ganelon, la prostituée, les comédiens, comme elle signera plus tard le statut du bagnard – rappelez-vous les Dalton dans Lucky Luke. Comment est-elle devenue l'uniforme du marin ? La « couleur » des bébés au maillot ou des culottes de coton des petites filles ? Michel Pastoureau suit, avec le flair du limier, l'évolution des moeurs, pour nous apprendre à voir, ce que nous ne voyons plus. Alors un zébre est-il blanc rayé de noir ou noir rayé de blanc ?
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L'histoire de la rayure du Moyen-Age à aujourd'hui à travers la société, la religion, l'hygiène, l'héraldique, les prisonniers, les majordomes, les zèbres … Un livre riche et documenté grâce auquel on apprend beaucoup tout en se divertissant. Toujours un plaisir de lire Michel Pastoureau qui sait parfaitement nous faire partager ses travaux de recherche.
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Rayer, barrer, tirer un trait...
La rayure semble tellement avoir envahi notre quotidien que l'on ne se rappelle plus - à moins d'avoir lu le brillant ouvrage de Michel Pastoureau- qu'elle était originellement portée par les individus qui étaient ostracisés (jongleurs, filles de mauvaise vie...) ou les Infidèles afin de les stigmatiser. La rayure est au Moyen-âge la marque du désordre. L'oeil médiéval habitué à la lecture par plans est dérangé par la rayure...
A partir de l'époque moderne, elle devient entre autres le synonyme de l'anglophobie car elle apparaît sur le drapeau des Etats-Unis qui se sont libérés de la tutelle de l'Angleterre. Les révolutionnaires français en feront quant à eux la marque du civisme et elle sera portée par les sans-culottes. Au XIXème siècle, la rayure marine passe des marins de profession aux baigneurs qui sont autorisés à s'encanailler en portant des costumes de bain rayés sur la plage car le blanc réservé au petit linge est transparent une fois dans l'eau ! Présente sur les tenues des sportifs (Juventus de Turin) ou de la marque Adidas, elle est associée également à la jeunesse et à la fraicheur. Les enfants, petits exclus, porteront aussi des tenues rayées car elles semblent moins salissantes (simple illusion bien sûr).
Symbole des bagnards et de la pègre...la rayure a aussi des aspects plus sombres, il ne faut l'oublier. Elle reste d'ailleurs associée encore aujourd'hui à la signalisation d'interdiction...
Pastoureau rappelle néanmoins que trop de rayures rendent fous comme en témoigne le film d'Hitchcock : "La maison du docteur Edwardes" (1945).
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