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3,83

sur 330 notes
Une pépite !
Georges Perec adore jouer avec les mots. C'est parce qu'il les connaît bien qu'il s'amuse avec les figures de style, les néologismes et les métaphores.

L'histoire tient en deux lignes mais l'auteur arrive à l'étirer sur 119 pages parfois hilarantes, en tout cas burlesques.

Une bande de copains se donne pour mission de faire réformer un pote de leur pote pour qu'il ne parte pas crapahuter dans les djebels de Sidi-Belles-Abbesses (sic). Leur pote, après sa journée réglementaire, circule sur un petit vélomoteur pétaradant (à guidon chromé) entre la caserne de son pote et l'appartement de ses potes qui ne connaissent pas son pote.

Son pote s'appelle Karatruc, ou chose ou Karamel ou Karalélipipède, bref, un nom indéfinissable un peu comme la Castafiore qui écorche sans arrêt le nom du capitaine Haddock.

Perec ne s'encombre ni de syntaxe, ni de grammaire et encore moins de concordance des temps. Il s'agite, il répète, il embobine, il embrouille, il ajoute, il asticote, il part, il revient, il repart. C'est très drôle et on se prend à son jeu avec une bonne humeur contagieuse.

Une liste des figures de style utilisées (ou non) dans l'opus, clôt cette partie de rigolade en s'arrêtant toutefois après le "p" pour éviter la méningite au lecteur qui se gondole.

Lisez-le et offrez-le, tout le monde aura la banane.
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C'est l'histoire d'un jeune militaire, un certain Kara quelque chose, qui en pleine guerre ne veut pas aller en Algérie. Prêt à tout pour cela (il imagine même se faire rouler sur un pied), derechef il s'adresse au maréchal des logis Henri Pollack, un de ses potes, qui lui-même demande à ses potes de l'aider à éviter à son pote l'enfer du djebel. En attendant, chaque soir, après sa journée au Fort Neuf de Vincennes, Henri Pollack enfourche son pétaradant petit vélomoteur (à guidon chromé) pour regagner son Montparnasse natal où l'attend sa bien-aimée.

À lire et à relire, un texte jubilatoire beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît, puisque comme souvent Georges Perec se joue des mots, truffant son récit de syllogismes et de figures de style, dont il fait d'ailleurs à la fin du livre une liste, qui bien que non exhaustive est fort longue, et que paru en 1966 ce texte signe aussi l'engagement de Perec pour l'indépendance des colonies.

Challenge MULTI-DEFIS 2022

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Autant vous prévenir tout de suite : ce court roman paru en 1966 est inclassable, fantaisiste, répétitif, allumé, poétique, malicieux, inventif, corrosif, génial et...totalement inutile ! Mais que c'est drôle et imprévisible, une parenthèse, un chemin de traverse, en dehors des chemins balisés de la littérature. Préfacé avec tendresse, je trouve, par Richard Bohringer.
Bref, on aime ou on n'aime pas !

Bien sûr, il y a une trame principale, un prétexte à semer " des fleurs et ornements rhétoriques, et, plus précisément, des métaboles et des parataxes que l'auteur croit avoir identifiées dans le texte qu'on vient de lire. ", autrement dit une quantité incalculable de figures de style répertoriées par l'auteur lui-même dans un index en fin d'ouvrage.
Très synthétiquement, pendant la guerre d'Algérie, un groupe de jeunes gens s'ingénient à trouver une solution pour faire réformer un de leur camarade engagé. Mais cela ne suffit évidemment pas à résumer l'état d'esprit de cette pure fantaisie littéraire, deuxième roman de Georges Perec, membre il ne faut pas l'oublier de L'Oulipo - OUvroir de LIttérature POtentielle - ce groupe international de littéraires et de mathématiciens fondé en 1961 que R. Queneau définissait comme des " rats qui construisent eux-mêmes le labyrinthe dont ils se proposent de sortir ".
" Un club de liberté. Liberté d'écrire, liberté de créer "comme le nomme Bohringer dans sa préface.

C'est typiquement le genre de livre qui résiste bien au-delà d'une première lecture, dont on n'épuise pas le contenu si facilement. Comme une balade en montagne ou en forêt que l'on affectionne, on y revient avec plaisir pour découvrir d'autres points de vue, d'autres figures de style savoureuses.
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En exclusivité exclusive : de la naissance d'une oeuvre ou quand le couple Perec passe à table. Action.

- Georges, as-tu une idée pour ton prochain livre?
- Justement Marie-Jo, j'y pensais. Je m'ennuie dans l'écriture. J'aimerais désormais me rajouter quelques contraintes.
- Euh... Mais... Ce n'est pas assez compliqué déjà d'écrire sans contrainte?
- Ce n'est pas faux... Quoique : premier roman, prix Renaudot. Tranquille Emile, les doigts dans le nez René. Mais j'aime les challenges. Beaucoup plus excitant et enrichissant d'avoir un cadre à respecter.
- Mais quand tu dis "contraintes", tu veux dire contrainte comme "je n'utilise aucun e dans mon roman" par exemple?
- ...
- Georges?
- Pardon. Je réfléchissais à ton histoire de disparition du e. Ça se tente... Bref. Non, là je pensais plutôt écrire un roman en y insérant tout ce qu'on compte de figures de style.
- Ah oui rien que ça... Tu réalises que tu vas faire fuir tes lecteurs?! Car à part l'oxymore et la litote, les figures de rhétorique, c'est du costaud à détecter... le lecteur lambda sera peut-être limité pour comprendre l'astuce, non?
- Arrête de prendre mon lecteur pour ce qu'il n'est peut-être pas. Puis je lui mettrai un lexique à la fin. Au kazoo. Enfin, juste quelques notes, histoire de lui montrer la voix. Au-delà d'un mètre soixante dix, ils sont grands, ils se débrouilleront. Et je ne vais pas caser de l'anacoluthe et du zeugme à tout-va non plus. Ce sera aussi plein d'humour, de jeux de mots, rassure toi, je vais éviter le relou.
- Relou...?
- Lourd à l'envers. Ça n'existe pas je sais, mais je voulais essayer un nouveau truc.
- Ok le créateur. Mais ce n'est que ton deuxième roman, penses-y! le Renaudot t'a rudement retourné, rien à rajouter le rhétoricien?
- Wow... Mon modeste palindrome ne vaut ton tautogramme.
- Toto qui?
- Laisse tomber le tautogramme, mais pas le plat, merci.
- Tu es relou Georges... Et sinon, il va parler de quoi ton roman? Parce que c'est pas le tout de mettre Anna Biloute et ses oeufs, faut une histoire.
- Anacoluthe et zeugme. Bon, je pensais à pondre un truc sur la guerre. Mais avec une écrasante légèreté tu vois. Juste pour montrer cette connerie d'envoyer de braves types qui préfèrent dormir plutôt que partir et revenir avec deux trous rouges sur le côté droit.
- Pourquoi pas. Tu as des idées?
- Oui, je pensais créer un gars dont personne ne retiendrait le nom. Genre Karabistouille, Karaoké ou quelque chose approchant, qui cherche à tout pris à échapper à l'enrôlement pour l'Algérie.
- Mmm... Peut-être risqué le sujet. T'as intérêt à marcher sur des zeugmes..! Mdr!
- Mdr?
- Acronyme pour mort de rire. Ça n'existe pas je sais, mais tu me donnes envie d'essayer de nouveaux trucs. Et sinon, il ne se sentira pas un peu seul ton Karamachin là?
- Non, je vais lui coller un margis et sa bande de potes pour l'aider à se faire réformer.
- Un mar-quoi?
- Margis. Mot-valise. Contraction de maréchal des logis si tu préfères.
- Curieusement je préfère oui... Ça ne va pas être simple à repérer tes trucs stylés vu comme ça...
- Mais ce sera justement tout l'intérêt de l'oeuvre! le lecteur, s'il le souhaite, devra lire et relire, chercher, fureter, fouiner, farfouiller! Décortiquer chaque phrase, analyser chaque mot! Une lecture infinie avec toujours de nouvelles découvertes! Tu imagines le potentiel littéraire? Digne de l'Ouvroir. (Il serait temps que je contacte Raymond moi). Et ils pourront même l'utiliser au collège pour apprendre les figures de rhétorique! du pain béni pour les jeûnes.
- Mouais... Je parie qu'ils ne retiendront quand même que la litote et l'oxymore tes collégiens. Et tu as déjà trouvé un titre?
- Non, j'expire là. Mais j'attends l'inspiration. Allez suffit, à table maintenant.
- Y a pas de figure là?
- Je meurs de faim si tu préfères.
- Très bien, alors à table. Mais s'il te plaît, avant de dîner, tu peux aller ranger ton vélo à guidon chromé au fond de la cour?
- ...
- Georges?
- Je viens de l'avoir.
- Tu as vu qui?
- L'inspiration.
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Par miles nombre usesoeuvres de Georg esPerec, ses grandso pus, il ne faut pasman querce pe titoups! (Fredonnez-moi pradonnez-moi ce leger eruct! J'ai trop bu j'ai trop lu j'ai trop ru…).

Comme souvent, Perec s'amuse. Comme toujours, il y a beaucoup plus que du divertissement dans ce livre. Il faut beaucoup de bosse, pas mal d'application, et une lourde once de talent, pour aboucher tellement d'enfantillages en si peu de pages, sans que cela devienne pueril. Parce que derriere ses jeux de gamin, ses jeux de mots de lignes et de pages, apparait clairement son attitude face a la guerre du moment (c'etait la guerre d'Algerie), sa contestation, son rejet de la levee de bannieres chauvines. Parce que derriere ses boutades stylistiques, derriere l'accumulation de calembours de potaches, Perec se regarde au miroir et raille un peu une certaine jeunesse intellectuelle, doree en fin de compte, dont il fait partie.

Mais finalement, le plus important est tout de meme le plaisir avec un grand P que procure ce livre. Que du bonheur (avec un grand B)!

P.S. Je pousse a lire une critique dans ce site: une qui est claire comme G. Parce que.

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Pétillant et virevoltant, foutraque et malicieux, mais aussi politique et accusateur: tel est ce petit récit enjaillant, jouant avec les mots comme un enfant heureux avec des billes ou tel un érudit facétieux avec les académismes, ne lassant jamais son lecteur malgré d'innombrables répétitions pour lui conter l'histoire d'un troufion qui fait appel à ses amis pour éviter la guerre d'Algérie.

Un sujet sérieux, très sérieux même, et pourtant cette lecture est une bouffée de fraîcheur, d'ingéniosité, d'irrévérence, qui fait un bien fou à la tête.

Quant à répondre à la question posée par le titre c'est une autre histoire.
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Perec s'amuse avec les mots dans le pur esprit de l'OULIPO et c'est jouissif à souhait. Il a tenté d'intégrer à son récit un nombre incalculable de figures de style dont on trouvera un index partiel à la fin du texte. En effet, il s'est arrêté à la lettre P pour ne pas saouler le lecteur. Merci Monsieur Perec. Rien que pour la lettre A, on en trouve 47 dont l'anacoluthe, l'anaphore, l'aphorisme, l'apophtegme, l'apocope ou l'allitération et si l'on ne sait pas ce que cela veut dire ni où on peut les trouver dans son texte, eh bien il nous dit en substance : "démerdez-vous".
On y trouvera également des fautes d'orthographe comme les psychanalisses, des problèmes de concordance des temps : "ils finiraient bien par la gagner leur sale guerre et que le cessez-le-feu il sera conclu et que la paix elle est signée" et d'autres curiosités littéraires.
Perec s'amuse sous la contrainte et nous fait jouer avec lui et avec les mots. Mais derrière cette prouesse, ce texte est le reflet d'une époque et une vraie narration vient servir la contrainte d'écriture : comment faire réformer un soldat du régiment d'Henri Pollack, le propriétaire du petit vélo à guidon chromé, de manière à ce que ledit soldat puisse rester avec sa bien aimée et éviter la guerre d'Algérie, le Pollack mobilise ses potes dans un brainstorming saugrenu sur la meilleure manière de lui péter le bras en douceur !!
Un texte bien déjanté qui se déguste et qu'il faudrait relire pour mieux savourer ce roman inclassable.

Challenge Multi-Défis 2022.
Challenge riquiqui 2022.
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Pénétrer dans l'univers de Georges Perec c'est partir en voyage au pays des mots, de la langue française. C'est rester bouche-bée , c'est se dire il a osé;C'est sourire devant l'incongru c'est aussi verser une larme sur tous ceux qui... nous sommes à la fin de la guerre d'Algérie.
Quel plaisir de vous lire à nouveau Mr Perec! Il y a si longtemps que je ne vous avais rendu visite mais promis je reviens vous lire très vite.
Un texte à lire et surement à relire.
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Quand se sont succédées plusieurs lectures un peu sombres, j'ai plaisir et besoin de me plonger dans des lectures plus rafraîchissantes. Et le domaine de l'absurde est souvent une valeur sûre. C'est donc avec délice que je me suis jetée sur un tout petit roman d'un des maîtres de l'Oulipo (« ouvroir de littérature potentielle », mouvement littéraire qui naquit au XXe s pour ceux qui ne connaîtraient pas).

En triant les livres de ma grand-mère (qui s'appelait Berthe et qui n'avait pas de grands pieds) je tombais récemment sur ce minuscule roman (mais sans me faire mal heureusement, je vous rassure). « Super » me dis-je, un roman de Georges Perec que je ne connais pas (vous ai-je dit que j'appréciais particulièrement les écrits des membres de l'Oulipo, groupement d'auteurs qui naquit dans les années commençant par 19).

Or donc, afin de remplir les cases d'un ou plutôt de plusieurs challenges et de m'aérer les neurones un peu tristounets des précédentes lectures, voilà-t-y pas que j'me dis qu'c'est p'tète ben le moment de sortir ce p'tit bouquin de 111 pages écrit en 1966 par l'un des maîtres de ce mouvement d'écrivains du siècle dernier (vous ai-je dit à quel point je me régale du brin de folie des écrivains et écrivaines qui participent à l'Oulipo) (vous pouvez reprendre votre respiration).

Et quel plaisir que celui de lire cet ouvrage miniature écrit par celui qui réussit l'exploit d'écrire un roman de 300 pages sans que n'y apparaisse une seule fois la lettre « e », mais je m'égare, je m'égare.

Bref, n'est pas Georges Perec qui veut, (et moi la première). Aussi je clôturerai cette chronique en vous dévoilant quand même que derrière l'exercice d'écriture auquel s'est livré l'auteur (on trouve en fin de livre un « index des fleurs et ornements rhétoriques", et, plus précisément des métaboles et parataxes que l'auteur a identifié dans son texte ) se cache l'histoire d'un appelé du contingent qui est sur les listes des soldats envoyés faire la guerre en Algérie et de ses copains qui vont tenter de l'aider à échapper à ce funeste sort.

Le ton est joyeux, enlevé, l'écriture magistrale et c'est un moment de pur bonheur.
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Curieux ouvrage que celui-ci. S'il m'a laissé sur ma faim, il m'a, en tous cas, permis de mesurer la formidable capacité humoristique de cet auteur. C'est une façon très légère de faire comprendre la détestation de la guerre. Comme tout ce qui est loufoque, cela cache souvent un mal être. Quelle plus belle façon de le communiquer que de le porter en dérision.
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