Comme «
Les Chagrins », son premier roman, ce nouveau titre nous offre plusieurs points de vue : celui de Mary Lee, la grand-mère, sa fille Dana, les petits-enfants Déborah, Marcus, Wes et Jonah. C'est principalement la grand-mère qui s'exprime, et c'est elle aussi qui nous offre un flash-back en 1949, en pleine ségrégation. Une nouvelle fois, l'auteur mène très bien son oeuvre et gère à merveille les différents points de vue. Elle termine son roman sous la forme d'une émission de radio, un procédé que j'ai trouvé intéressant.
La ségrégation est un sujet qui a beaucoup été traité dans des romans et pourtant, celui-ci sort du lot. Tout d'abord grâce à l'angle original de la natation. Et ensuite parce que
Judith Perrignon a su trouver les bons mots pour restituer la condition des Afro-américains et la violence de ce qu'ils ont vécu. Durant l'épisode qui se déroule en 1949, on est frappé par le sentiment d'impunité des blancs, par la violence gratuite qu'ils déploient et par la position ambiguë des forces de l'ordre chargées de protéger les gens de couleurs sans pour autant sanctionner les agitateurs blancs. Concernant la période actuelle, l'auteure nous fait prendre conscience des préjugés qui pèsent sur les épaules de ces jeunes gens, et combien il est dur pour eux de tracer une autre voie que celle qu'on leur destine, d'autant plus que leurs pères sont le plus souvent absents.
Les personnages sont assez nombreux dans ce roman. Parmi eux, Mary Lee, la grand-mère, est la plus présente et la plus intéressante, car elle a vécu les deux époques, celle de la ségrégation et celle des années 2000. Marcus est un garçon bien, seulement un peu dépassé par la vision que l'on a de lui. Déborah rêve d'être aimée, tandis que leur mère, Dana, n'a jamais réussi à garder un homme et aimerait être fière d'elle-même, à nouveau. Ces personnages sont profondément attachés les uns aux autres et ce roman est aussi une belle histoire de famille.
J'aime beaucoup le style de
Judith Perrignon que je trouve assez percutant. Elle emploie des mots forts et parfois crus, mais toujours à bon escient, tout sonne juste. C'est un auteur qui sait donner du poids à ses paroles. En somme, c'est un style à la fois direct et agréable.
Ainsi, c'est un roman que je vous recommande volontiers, même si le sujet de la ségrégation a été maintes fois évoqué celui-ci tire son épingle du jeu, je l'ai trouvé très fort. Il est bien mené, bien pensé et bien écrit. A ce jour, c'est le titre de la rentrée littéraire que j'ai préféré, même si je n'en ai pas encore lu beaucoup… !
Lien :
http://romans-entre-deux-mon..