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Cet essai a été réalisé à l'issue d'une émission sur France Culture et dédiée à Louise Michel. Il est le résultat d'analyses d'archives qui retracent la vie de cette révolutionnaire invétérée née en 1830 et morte en 1905. Richement documenté, l'ouvrage met en valeur l'engagement indéfectible de cette femme qui n'a peur de rien et affiche ses convictions avec force et constance. le point d'orgue de l'ouvrage est bien sûr sa participation à la commune de Paris en 1871 et son exil à suivre en Nouvelle Calédonie pendant une dizaine d'années. La proximité épistolaire importante qu'elle a eue avec Victor Hugo est particulièrement intéressante. Une forme romanesque eût été plus attrayante, mais moins proche d'une réalité issue de la compilation d'archives à laquelle s'est livrée l'autrice
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Petit détail primordial pour comprendre la suite : c'est en se documentant sur ce qui allait devenir son « Victor Hugo vient de mourir » en 2015 (récit sur la mort et l'enterrement de l'écrivain, ouvrage par ailleurs tout à fait recommandable) que Judith PERRIGNON a « croisé » la figure de Louise MICHEL, l'éternelle révoltée. S'étant intéressée à son parcours, elle se documente, jusqu'à cette présente biographie de l'anarchiste féministe, biographie qu'elle fait commencer en septembre 1871, alors que Louise MICHEL attend son procès pour sa participation active à la Commune de Paris quelques mois auparavant. Puis reprend par petites touches ce que fut sa vie avant cet événement déclencheur dans ses idéaux et sa résolution à devenir une militante acharnée.

Le problème est que Judith PERRIGNON dépeint Louise MICHEL par deux procédés qui peuvent paraître maladroits. Tout d'abord par l'ombre écrasante de Victor HUGO sur lequel l'autrice avait déjà travaillé et dont elle semble porter une admiration sans bornes. Ainsi HUGO ne cesse de surgir. Il est vrai qu'il a connu Louise MICHEL, qu'ils ont correspondu durant trois décennies, mais ceci ne suffit pas, loin de là, pour le faire piétiner si sauvagement le récit. J'y reviendrai. de plus, bien sûr Judith PERRIGNON s'est longuement documentée pour dresser cette biographie, et ce qui en ressort, ce n'est pas une analyse de la documentation récoltée, mais bien la documentation elle-même, c'est-à-dire de (trop) longs et (trop) nombreux passages, livrés abruptement, comme sans discernement, entre guillemets.

Si Judith PERRIGNON a souhaité écrire une biographie de Louise MICHEL, c'est aussi pour remémorer la portée de ses paroles, de ses actes. Mais le résultat est une sorte de suites de livres de la bonne Louise, d'écrits (judiciaires ou non) de ceux qui l'ont croisée, sans en changer une virgule. Sentiment pour le lectorat d'être devant un patchwork, une sorte de « best of », les bons moments à lire sur la vie trépidante de Louise MICHEL. S'il est indéniable que n'étant pas un documentaire sur la Commune de Paris, ce texte ne doit que l'évoquer brièvement au milieu de tant d'autres, il est pourtant curieux que l'autrice n'ait rempli que quelques pages sur le rôle de Louise MICHEL durant cette insurrection, alors que c'est bien ici qu'elle est « née » politiquement, en tant que féministe, républicaine et anarchiste. PERRIGNON préfère convoquer HUGO tant et plus. Louise MICHEL aurait mérité plus d'égards.

En amenant HUGO sur le devant de la scène, l'autrice détourne notre regard, mais aussi le sien. Plus embarrassant : elle fait exister Louise MICHEL par le personnage de HUGO, comme s'il avait influencé ses opinions politiques, la dénigrant, elle en tant que femme de conviction, comme si sans HUGO elle n'était rien, il écrase le récit, laissant Louise sur le bas côté. La preuve en est qu'il disparaît du texte… au moment de sa propre mort à lui, comme s'il avait été le personnage principal du roman (de cette biographie romancée plutôt) jusqu'à sa disparition et que la suite n'était qu'une succession de petits détails sans importance.

Par cette omniprésence Hugolienne, Judith PERRIGNON commet une erreur majeure : elle ne fait qu'évoquer des parties cruciales de la vie de Louise MICHEL, les bâcle en quelque sorte. Elle n'aborde que brièvement le portrait de Théophile FERRÉ, l'éternel compagnon de lutte, qui sera pour Louise bien plus qu'un camarade, en tout cas dans son coeur et qui, tellement plus que le vieil HUGO, va influencer toute la suite de la vie de Louise MICHEL par-delà la mort (celle de FERRÉ par son exécution à Satory). Il en est de même en fin de volume pour la tentative d'assassinat lors d'une conférence. Un homme tire sur Louis MICHEL, à peine blessée, elle lui pardonne. La suite est admirable de compassion et d'altruisme, mais nous n'en sauront rien ici, Judith PERRIGNON se contentant du factuel, en somme de manière absolument contraire que lorsque HUGO s'invite en ses pages.

De la déportation de la militante anarchiste en Nouvelle Calédonie, nous ne saurons presque rien, contrairement à cette rumeur infondée (et somme toute détail infime de la vie de Louise) d'une possible relation charnelle qu'elle aurait eu avec… je vous le donne en mille… Victor HUGO. L'autrice passe plus de temps à écrire sur ce micro événement « people » que sur sa déportation qui dura pourtant six ans.

Pour autant, si tant est que vous êtes novices sur ce que fut Louise MICHEL, ce bouquin comporte quelque intérêt, bien que vous auriez pu obtenir les renseignements ailleurs, sur une simple page Wikipédia par exemple. Par ses « copié-collé » de documents existants, Judith PERRIGNON réalise le minimum syndical, un recueil de textes, cimenté avec parcimonie par sa plume à elle, alors que sans doute elle pense à HUGO. Quant à la fin du récit, soit après le retour de la révolutionnaire sur le sol européen et jusqu'à sa mort, PERRIGNON déterre les rapports de police la concernant. Car Louise MICHEL était très surveillée.

En revanche, elle ne le fut pas assez par Judith PERRIGNON qui dresse la bibliographie ayant servi à ce travail. Résultat : cinq livres (dont la correspondance avec un certain Victor H. bien entendu). Pas un de plus. En voulant ressusciter Louise MICHEL, PERRIGNON la repousse dans son cimetière de Levallois-Perret. Je finirai en paraphrasant l'autrice mais concernant le goût que m'a laissé la lecture de ce livre paru en 2023 : « Son nom flotte désormais dans l'air tel un ballon rouge détaché du socle de son époque, de ses convictions, des faits et des détails de sa vie, elle sera nette et floue à la fois ».

https://deslivresrances.blogspot.com/
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La Commune, une révolution parmi d'autres dans le fil contestataire qui grondait depuis un siècle déjà, délaissée dans les manuels scolaires, mais considérée comme une des premières à l'accent féminin prononcé. Des femmes surnommées les pétroleuses, vues comme des incendiaires ou de simples exaltées par ceux qui les jugeront en Conseil de guerre. Elles sont pourtant nombreuses, mais une personnalité se détache en figure de proue : Louise Michel.

La Vierge rouge, la Sarah Bernardt noire, comparée à Jeanne d'Arc par Verlaine, adoubée par Victor Hugo, elle était déjà renommée de son vivant mais c'est aussi parce qu'elle s'est écrit que l'on peut mieux cerner sa personnalité depuis et qu'elle nous parvient en icône de la Commune aujourd'hui, sûrement aussi grâce à sa correspondance avec Victor Hugo, pouvant aller jusqu'à prendre le dessus sur le reste de sa vie, comme à sa station parisienne éponyme. Et puis Louise Michel était « un personnage d'Hugo qui avait échappé à son auteur », elle s'invente dans ses écrits en sublimant sa vie, lui donnant même un relief poétique au bagne de Nouvelle-Calédonie.
Rien ne la prédestinait pourtant à tout cela, elle l'enfant sans père identifié, traitée néanmoins comme « la demoiselle du domaine » où travaillait sa mère, car la rumeur disait qu'elle était la petite-fille des maîtres. Elle deviendra une institutrice engagée après une enfance passée dans la rêverie, refusant à ses élèves les prières à l'empereur, lui préférant les chants de la Marseillaise. le reste on le connaît, la Commune où le procès de toutes ces femmes « menait à elle », le bagne, et le retour avec « sa colère  qui est son oxygène », toujours et encore surveillée dans « sa croisade sociale »

Il ne faut pas s'attendre dans ce récit à une lecture en mode page-turner malgré la chronologie respectée dans ses grandes lignes, une lecture qui serait lisse et débroussaillée des aléas de la recherche journalistique. On est quand même dans la bio d'une anarchiste de la Commune partiellement enterrée aux Archives. Judith Perrignon y est allée, sur les traces de la future anarchiste en photographiant les documents au besoin, étonnée par « ces papiers vieux de plus d'un siècle qui glissent dans ma mémoire numérique », même si les phrases de Louise Michel ne lui paraissent pas anachroniques. La journaliste farfouille ainsi dans les boîtes, extrait aussi des passages des Mémoires de Louise Michel, fait parler la correspondance avec Victor Hugo, convoque des spécialistes qui se sont exprimés sur le sujet, interrompt par les questions du juge à Louise Michel durant ses procès, agrémente son récit d'éléments journalistiques voire personnels liés à sa quête.

Et cela donne les contours d'un récit rythmé par différents points de vue, mais un récit vivant et émouvant, tant dans la plongée historique que dans la quête journalistique. Un récit à plusieurs cordes, palpitant de vie dans les papiers dépoussiérés, et qui profile la silhouette historique d'une icône féminine de la Commune, également avant-gardiste, au point de retentir avec une sensation de proximité plus d'un siècle après.

« La presse de Versailles accusa les pyromanes, « pétroleurs » et « pétroleuses », puis subitement, très vite, le masculin a disparu, le mot s'est figé au féminin. Il permettait de ramasser en trois syllabes toutes ces femmes de la révolution, de les ramener à des pulsions destructrices et échevelées, d'en faire des viragos, des mégères, de les dépolitiser, car les femmes ne pensent pas »
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Pour son nouveau roman, Judith Perrignon s'est penchée sur une figure féminine emblématique du XIXe siècle, prolongeant ainsi le travail qu'elle avait déjà initié avec sa série documentaire réalisée France Culture et consacrée à Louise Michel. Pour bien comprendre le personnage, il est dans un premier temps nécessaire d'évoquer le contexte historique qui l'a fait connaître. Ce contexte, c'est celui de la Commune de Paris, insurrection au cours de laquelle les habitants de la ville affirmèrent leur volonté de ne pas céder à la Prusse (avec laquelle la France est alors en guerre depuis 1870) et d'instaurer une république démocratique et sociale. Cette guerre civile de soixante-douze jours est restée dans l'histoire pour une multitude de raisons, qu'il s'agisse de la modernité des lois qu'elle a entériné (séparation des églises et de l'état, reconnaissance de l'union libre, égalité salariale entre instituteurs et institutrices, démocratisation et laïcisation de l'enseignement…) ou de la sanglante répression qui suivi la reprise du pouvoir par les Versaillais. Enfin, la Commune est restée dans les mémoires grâce aux figures emblématiques qui y participèrent, parmi lesquelles la fameuse Louise Michel, institutrice âgée d'une quarantaine d'années en 1871, qui sera condamnée au bagne pour son rôle dans l'insurrection et qui deviendra une figure incontournable de la gauche du XIXe. L'histoire tumultueuse de la militante nous est racontée ici par le biais des archives, et notamment des archives de police, qui constituent une grande partie des sources concernant la vie et l'influence en surplomb de Louise Michel sur la vie politique française de l'époque. L'autrice retranscrit ici une partie de ces sources policières, parmi celles qu'elle a trouvé les plus significatives.

Minutes de procès, rapports de la préfecture de Paris, notes rédigées par des indics de la police… : les sources émanant des autorités sont nombreuses et nous instruisent sur la surveillance étroite sous laquelle le pouvoir garda la militante jusqu'à la fin de sa vie, ainsi que la crainte qu'elle pouvait susciter. Ces rapports se révèlent toutefois insuffisants pour comprendre la personnalité de Louise Michel ni sa détermination à livrer son combat. L'autrice a ainsi également puisé dans les mémoires de l'institutrice, rédigés alors qu'elle était emprisonnée, ainsi que sur les nombreuses lettres de sa main qui ont été préservées. Parmi elles, beaucoup sont adressées à un certain Victor Hugo, le poète et la révolutionnaire ayant entretenu une relation épistolaire pendant de longues années. L'ouvrage nous donne ici un aperçu de cette correspondance, l'autrice ayant à nouveau sélectionné quelques uns des textes parmi les plus révélateurs de la pensée et de la personnalité de Louise Michel. Les articles de journaux qui lui sont consacrés sont eux aussi édifiants, la révolutionnaire n'ayant pas hésité à parler à la presse (et même à monnayer ses interviews), et celle-ci donne souvent d'elle une image surprenante, insistant sur sa fougue et certaines excentricités de sa vie privée (son amour pour les chats, par exemple). Cette diversité des sources consultées et reproduites par l'autrice constitue l'une des principales qualités du roman qui nous offre une plongée, certes brève, mais néanmoins très instructive dans la fin du XIXe. le choix de mettre au premier plan les archives permet également de petites digressions, Louise Michel étant loin d'être la seule personnalité fascinante de l'époque. Judith Perrignon nous instruit ainsi de temps à autre sur le parcours surprenant d'autres femmes militantes, quasiment toutes occultées par la figure de la révolutionnaire, mais qui mériteraient elles aussi d'être étudiées.

Enfin, l'autrice convoque pour compléter son portrait les avis d'historiens et historiennes qui viennent éclairer ou nuancer toutes ces sources. le travail de Judith Perrignon est donc scrupuleusement documenté, et le portait qui résulte du brassage de toutes ces sources est finalement assez contrasté. Les nombreuses anecdotes témoignant du caractère et des habitudes de Louise Michel (elle dilapide systématiquement l'argent qu'on lui prête en le redistribuant aux plus indigents, ou encore refuse la grâce du pouvoir et demande à rester en prison avec ses camardes), de même que les extraits de certains de ses discours permettent aisément de comprendre les raisons pour lesquelles la révolutionnaire a marqué durablement ses contemporains. Dotée d'une sacrée verve, déterminée à être de toutes les luttes et à ne jamais renier ses idéaux, Louise Michel impressionne par son exaltation et la force de ses convictions. Ce qui frappe, aussi, c'est le nombre de personnalités historiques avec lesquelles elle est en désaccord politiquement mais qui la soutiendront pourtant toute leur vie. C'est le cas notamment de Victor Hugo, mais aussi de Clemenceau, qui lui enverra des mandats tout au long de sa détention au bagne de Cayenne, ou encore d'Henri Rochefort, dont elle finira toutefois par s'écarter en raison de son antisémitisme. Ralliée aux idées anarchistes et par conséquent peu désireuse de jouer le jeu des élections, Louise Michel restera tout au long du XIXe une figure tutélaire importante mais gardera ses distances avec les figures montantes du socialisme français. Enfin, parmi les nombreux aspects de la personnalité de la révolutionnaire évoqués, l'autrice porte un regard critique sur la manière dont l'histoire l'a retenue, la réduisant souvent aux relations qu'elle a entretenu (ou plutôt pas entretenu) avec les hommes, ainsi qu'en témoigne d'ailleurs son surnom de « vierge rouge ».

Avec « Notre guerre civile », Judith Perrignon signe une biographie édifiante de Louise Michel, figure emblématique de la Commune et plus largement de la gauche française du XIXe. Pour son roman, l'autrice a consulté un nombre impressionnant d'archives dont certaines sont en parties reproduites ici, ce qui permet de s'immerger pleinement dans cette période historique assez méconnue et qui fait pourtant partie des fondements de notre vie politique actuelle.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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Cette autrice m'est inconnue, mais apparemment ce doit être une star de la radio, car son mauvais récit est sans cesse interrompu par son point de vue personnelle ainsi que par d'autres considérations qui ralentissent une lecture ardue sans vrai lien avec l'histoire racontée. Ardue, car la dame connait certainement fort bien son sujet et du coup oublie l'essentiel, le lecteur n'est pas aussi au fait de la Commune qu'elle. Donc, on se lasse après plein de passages obscurs, obligés de reprendre pour trouver une explication qui n'existe pas. Certains réussissent fort bien ce mélange des genres, elle devrait s'en inspirer ou ne faire que l'historienne en abondant dans la fluidité de son récit ou... abandonner l'écriture !!
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Encore un livre de Judith Perrignon que j'ai aimé. Cette fois elle nous embarque dans la vie de Louis Michel et je suis ressortie de ce livre avec beaucoup plus de connaissance de cette époque et envie d'approfondir encore plus!
Ce livre fait échos à" Victor Hugo vient de mourir".
Vivement le prochain!
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Un livre passionnant qui retrace la vie de Louise Michel au travers des rapports des policiers et des indics chargés de sa surveillance.

Institutrice, révolutionnaire, utopiste, féministe, activiste, indignée, engagée, elle fut de tous les combats, de toutes les luttes jusqu'à les payer par 10 ans de déportation pour son rôle pendant la commune.

Elle incarne la foi en un avenir meilleur et la lutte pour les lendemains qui chantent. Anarchiste opposée au statuquo elle ne cessa jamais de se battre pour ses idées. Elle voulait l'égalité, la justice pour tous, que chacun puisse manger à sa faim, que chacun ait accès à l'instruction - surtout les femmes, que les ouvriers s'organisent et mettent en place une forme d'autogestion. Elle poussa sa passion jusqu'à une attitude que j'ai trouvée ambigüe vis à vis des actions violentes.

En toile de fond de ce livre remarquable, s'étale tout le 19e siècle avec ses grands personnages - Hugo, Valles, Marx, ..., ses crises révolutionnaires, ses guerres civiles, ses luttes sociales, la naissances des grandes utopies, la période au cours de laquelle l'éveil de la conscience politique et l'intensité du débat ont changé les sujets en citoyens.

J'ai donc beaucoup aimé cette fresque historique qui raconte le bouillonnement social et intellectuel de l'époque. Une effervescence qui disparaît peu à peu aujourd'hui et que le livre de Judith Perrignon nous rappelle avec force.

A lire d'urgence…
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Un livre qui me permet de valider un titre commençant par N que je ne regrette pas d'avoir.
J'apprécie Perrignon ce roman s'inscrit dans la lignee de ceux de Julie Perrignon(v Hugo n'est pas mort j'avais adoré).
Même si l'on connait la vie de Louise Michel ce livre permet de concrétiser nos connaissances.
Un livre sur fond historique , une femme qui combat surtout pour les femmes je ne pouvais qu.'aimer
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Carnet de fouille dans les archives officielles françaises (préfecture de police, archives nationales d'outre-mer) Notre guerre civile de Judith Perrignon est aussi un document de préparation du podcast Grandes Traversée sur Louise Michel, ainsi qu'un livre de réflexions personnelles, enrichi d'extraits de travaux d'historiens et historiennes.

Texte court mais extrêmement vivant, ponctué de documents authentiques, il s'ouvre sur le procès de la Commune de Paris, à une époque où la femme est"objet d'affection et de respect" quand "elle est toute entière aux soins de la famille", et maintient "l'homme dans la ligne de ses devoirs sociaux", "mais si désertant cette sainte mission, son influence changeant de caractère ne sert que le démon du mal, elle devient une monstruosité morale. Alors, la femme est plus dangereuse que l'homme le plus dangereux." (discours du capitaine Jouenne, Commissaire du gouvernement au procès des insurgés de la Commune de Paris).

Dans ce contexte, si Louise Michel, enfant illégitime ayant reçu une bonne éducation puis institutrice célibataire meneuse des « pétroleuses », n'est pas condamnée à mort, c'est parce que certaines de ses compagnes sont enceintes ou mères de famille.
En tuer une c'est devoir les tuer toutes, ce sera donc la déportation.

A son retour de Guyane, les traces laissées par ceux qui l'ont surveillée (police, indics), enfermée, déportée, enterrée, démontrent qu'elle avait une vitalité et une bonté pour les indigents et les indigentes hors du commun, qu'elle plaçait la connaissance et ses idéaux humanistes au dessus de sa vie même.

Prenant la parole en public, écrivant, s'exposant souvent, elle constituait un exemple d'émancipation et de revendications menaçant pour l'État français à une époque où les femmes existaient rarement pour elles-mêmes. D'ailleurs il frappant de constater que ses compagnes de lutte et de bagne restent encore aujourd'hui fort méconnues.

Impossible à faire taire, il devient impératif d'abîmer son image. On lui prête une liaison avec Victor Hugo (avec qui elle a longtemps correspondu) et un enfant caché dont il n'existe aucune preuve, on la dit lesbienne aussi puisque jamais mariée mais vivant avec une femme (toujours utile de ramener une femme à son utérus, hier comme aujourd'hui). On l'empêche de prendre soin de sa mère mourante. On la dit folle. Elle est victime d'un attentat. Tient à être jugée avec ses camarades anarchistes, malgré l'accident.

Inlassablement elle poursuit la lutte révolutionnaire, de meeting en prison, refusant tout traitement de faveur. Traquée, surveillée, son enterrement même fera l'objet d'un dispositif policier spécial.

Les livres ne manquent pas sur Louise Michel, qui a également écrit ses mémoires, pendant son incarcération.
Mais Judith Perrignon, en partageant ses découvertes archivistiques, nous emmène sur le chemin de la curiosité. Que peut-on déduire de telle ou telle trace ? Ce qui est vraisemblable, ce qui est certain, ce qui est notable… Qu'en disent les spécialiste ? Et aujourd'hui ?
C'est un grand plaisir de lecture de pouvoir cheminer à ses côtés, et partager un peu de sa démarche et de ses réflexions.
Et une joie toujours renouvelée d'en apprendre plus sur Louise Michel, car comme écrit l'autrice :
« Et l'on enseignera jamais aux enfants des innombrables écoles Louise Michel, combien d'années la république de Jules Ferry la traqua et l'emprisonna. C'est qu'il faudrait en plus leur expliquer qu'elle ne voulait pas en sortir. Qu'elle voyait un certain honneur à être une reprise de justice d'un monde qui ne lui convenait pas. Il faudrait donc leur expliquer le monde. le sien. le leur.
Les prévenir. »

Merci à Babelio, Judith Perrignon et les éditions Grasset, pour ce livre fort attendu, reçu en masse critique.
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« En 1793, les tricoteuses des Clubs et les malheureuses qui méritèrent le surnom de Furies de la guillotine ont épouvanté le monde […] Celles qui sont ici sont les filles des mégères de 1793 ! »
Ainsi parle le Commissaire du Gouvernement le 5 septembre 1871 au Conseil de guerre de Versailles devant lequel comparaissent un certain nombre de femmes , les « pétroleuses  » accusées d'avoir incendié Paris lors de l'écrasement de la Commune par l'armée versaillaise. Plus de mille femmes furent déférées devant le Conseil de guerre et parmi elles, une qui attend son procès en prison et qui va bientôt rentrer dans l'Histoire : Louise Michel.

Judith Perrignon a choisi de dresser le portrait de celle qui est devenue l'égérie féminine et féministe de cette «  guerre civile » si mal traitée dans nos manuels, à travers l'histoire de la fin du XIX e siècle. Les soixante douze jours de la Commune, d'abord : «  Ils ont voté la séparation de l'Eglise et de l'Etat, l'école laïque, l'abolition de la peine de mort, les coopératives ouvrières, la journée de travail à 10 heures, la réglementation du travail de nuit, la légalisation du divorce… […] Ils n'ont pas pu faire le quart de ce qu'ils espéraient faire » avant que la semaine sanglante ne mette fin à leurs aspirations.

Parmi ces communards, Louise Michel .
Louise Michel, institutrice, révoltée par la misère, insoumise, militante infatigable des droits des femmes (comme des Kanaks qu'elle va côtoyer en Nouvelle Calédonie ), anarchiste jusqu'à la fin de sa vie, mais aussi écrivaine, poétesse qui entretient une correspondance avec Victor Hugo qu'elle admire depuis sa jeunesse. Louise Michel condamnée comme les autres femmes à purger sa peine au bagne de Nouvelle Calédonie et qui refuse tout traitement de faveur et amnistie personnelle. Autour d'elle, on retrouve quelques figures de la vie politique de l'époque : Jules Ferry, Clemenceau, Rochefort, et Hugo bien sûr.

Mais on trouve surtout tous ces rapports de police, ces billets transmis par les multiples indics qui la traquent dès son retour du bagne et entre deux séjours en prison, et qui ne la lâcheront pas jusqu'à sa mort. Car Judith Perrignon ne s'est pas contentée d'une biographie classique, ni des Mémoires rédigées en prison par Louise Michel elle-même. Elle a longuement fréquenté les archives et méticuleusement épluché tous ces documents : archives d'outre-mer pour les dossiers des bagnards, archives de l'Arsenal sur le monde ouvrier , archives de la préfecture de police, enfin, dont elle nous restitue si bien l'atmosphère qu'on a l'impression d'ouvrir nous aussi ces boîtes …

Et la journaliste de conclure : «  Je n'ai jamais aussi bien compris le système politique et économique dans lequel j'ai grandi, qu'entre ces murs et ces boîtes poussiéreuses. Tant de choses se sont jouées en cette fin du XIX e siècle. Que je sois plongée dans les procès de la Commune, ou dans l'organisation des obsèques d'Hugo, j'y ai vu la République méticuleusement briser l'élan des utopies au nom de l'ordre économique , jusqu'au désenchantement et à la décomposition actuelle. »

Cinquième livre que je lis de Judith Perrignon et, même si ce n'est pas mon préféré de l'auteure, j'ai retrouvé dans celui-ci ce qui m'avait séduite dans les précédents. L'autopsie d'un personnage ou d'un lieu et d'une époque, un regard journalistique qui sert de base à l'écriture d'un récit qui peut prendre la forme romanesque, la plongée dans l'Histoire pour éclairer le présent et réfléchir à l'avenir.

Un grand merci aux éditions Grasset et à Babelio pour cette lecture.
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