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La Commune, une révolution parmi d'autres dans le fil contestataire qui grondait depuis un siècle déjà, délaissée dans les manuels scolaires, mais considérée comme une des premières à l'accent féminin prononcé. Des femmes surnommées les pétroleuses, vues comme des incendiaires ou de simples exaltées par ceux qui les jugeront en Conseil de guerre. Elles sont pourtant nombreuses, mais une personnalité se détache en figure de proue : Louise Michel.

La Vierge rouge, la Sarah Bernardt noire, comparée à Jeanne d'Arc par Verlaine, adoubée par Victor Hugo, elle était déjà renommée de son vivant mais c'est aussi parce qu'elle s'est écrit que l'on peut mieux cerner sa personnalité depuis et qu'elle nous parvient en icône de la Commune aujourd'hui, sûrement aussi grâce à sa correspondance avec Victor Hugo, pouvant aller jusqu'à prendre le dessus sur le reste de sa vie, comme à sa station parisienne éponyme. Et puis Louise Michel était « un personnage d'Hugo qui avait échappé à son auteur », elle s'invente dans ses écrits en sublimant sa vie, lui donnant même un relief poétique au bagne de Nouvelle-Calédonie.
Rien ne la prédestinait pourtant à tout cela, elle l'enfant sans père identifié, traitée néanmoins comme « la demoiselle du domaine » où travaillait sa mère, car la rumeur disait qu'elle était la petite-fille des maîtres. Elle deviendra une institutrice engagée après une enfance passée dans la rêverie, refusant à ses élèves les prières à l'empereur, lui préférant les chants de la Marseillaise. le reste on le connaît, la Commune où le procès de toutes ces femmes « menait à elle », le bagne, et le retour avec « sa colère  qui est son oxygène », toujours et encore surveillée dans « sa croisade sociale »

Il ne faut pas s'attendre dans ce récit à une lecture en mode page-turner malgré la chronologie respectée dans ses grandes lignes, une lecture qui serait lisse et débroussaillée des aléas de la recherche journalistique. On est quand même dans la bio d'une anarchiste de la Commune partiellement enterrée aux Archives. Judith Perrignon y est allée, sur les traces de la future anarchiste en photographiant les documents au besoin, étonnée par « ces papiers vieux de plus d'un siècle qui glissent dans ma mémoire numérique », même si les phrases de Louise Michel ne lui paraissent pas anachroniques. La journaliste farfouille ainsi dans les boîtes, extrait aussi des passages des Mémoires de Louise Michel, fait parler la correspondance avec Victor Hugo, convoque des spécialistes qui se sont exprimés sur le sujet, interrompt par les questions du juge à Louise Michel durant ses procès, agrémente son récit d'éléments journalistiques voire personnels liés à sa quête.

Et cela donne les contours d'un récit rythmé par différents points de vue, mais un récit vivant et émouvant, tant dans la plongée historique que dans la quête journalistique. Un récit à plusieurs cordes, palpitant de vie dans les papiers dépoussiérés, et qui profile la silhouette historique d'une icône féminine de la Commune, également avant-gardiste, au point de retentir avec une sensation de proximité plus d'un siècle après.

« La presse de Versailles accusa les pyromanes, « pétroleurs » et « pétroleuses », puis subitement, très vite, le masculin a disparu, le mot s'est figé au féminin. Il permettait de ramasser en trois syllabes toutes ces femmes de la révolution, de les ramener à des pulsions destructrices et échevelées, d'en faire des viragos, des mégères, de les dépolitiser, car les femmes ne pensent pas »
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Une obscure institutrice qui rêve de littérature, elle ne sera jamais la grande romancière qu'elle espérait, sa foi politique et ses luttes prendront le dessus. 1871, Louise Michel croupit dans la prison de Versailles, elle attend son procès qui va la condamner à la déportation au bagne de Nouvelle-Calédonie.
Judith Perrignon nous invite à remonter la trace de Louise Michel, surnommée la vierge rouge, anarchiste dans l'âme, irréductible, toisant les autorités qui traversera le temps, elle deviendra l'image et les voix des femmes de la Commune.

Judith Perrignon nous raconte le destin de cette femme exceptionnelle, en parcourant les archives officielles, les dépositions des témoins devant le tribunal militaire, les nombreux rapports de police, car elle sera surveillée en permanence dès son retour du bagne en 1880 jusqu'à sa mort en 1905. Judith Perrignon fouille aussi dans ses correspondances, notamment avec Victor Hugo, ses mémoires rédigées en prison. C'est une plongée dans l'histoire de la Commune, cette guerre civile française jamais nommée. Nous suivons Louise Michel de meetings en réunions, de manifestations en séjours en prison.

Ce livre est le fruit d'un travail journalistique remarquable de la part de l'auteure qui brosse le portrait vivant de l'égérie de la Commune, une femme insoumise et exaltée.

Merci infiniment aux éditions Grasset et Babelio pour l'envoi de ce livre et leur confiance.

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Judith Perrignon, journaliste à France Culture a fait le portrait de Louise Michel pour la série de l'été Les grandes traversées. Pour ne pas se contenter des biographies existantes, elle s'est rendue aux archives pour consulter le dossier de son procès militaire en 1871, lorsque les Versaillais sont venus à bout de la Commune.
Judith Perrignon a découvert que beaucoup d'autres femmes ont pris une part active à la lutte. Les principaux meneurs de l'insurection furent exécutés, mais les femmes condamnées à mort furent déportées en Nouvelle-Calédonie. Louise Michel, institutrice et correspondante de Victor Hugo continua le combat depuis son exil en écrivant ses mémoires et refusant toute forme de remise de peine ou d'amnistie personnelle. A son retour en France, elle continua à jouer un rôle très actif dans le mouvement anarchiste.
A travers le destin de Louise Michel, c'est toute la fin du XIXème siècle en France que fait revivre Judith Perrignon, avec ses luttes politiques et sociales.
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Cet essai a été réalisé à l'issue d'une émission sur France Culture et dédiée à Louise Michel. Il est le résultat d'analyses d'archives qui retracent la vie de cette révolutionnaire invétérée née en 1830 et morte en 1905. Richement documenté, l'ouvrage met en valeur l'engagement indéfectible de cette femme qui n'a peur de rien et affiche ses convictions avec force et constance. le point d'orgue de l'ouvrage est bien sûr sa participation à la commune de Paris en 1871 et son exil à suivre en Nouvelle Calédonie pendant une dizaine d'années. La proximité épistolaire importante qu'elle a eue avec Victor Hugo est particulièrement intéressante. Une forme romanesque eût été plus attrayante, mais moins proche d'une réalité issue de la compilation d'archives à laquelle s'est livrée l'autrice
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Pour son nouveau roman, Judith Perrignon s'est penchée sur une figure féminine emblématique du XIXe siècle, prolongeant ainsi le travail qu'elle avait déjà initié avec sa série documentaire réalisée France Culture et consacrée à Louise Michel. Pour bien comprendre le personnage, il est dans un premier temps nécessaire d'évoquer le contexte historique qui l'a fait connaître. Ce contexte, c'est celui de la Commune de Paris, insurrection au cours de laquelle les habitants de la ville affirmèrent leur volonté de ne pas céder à la Prusse (avec laquelle la France est alors en guerre depuis 1870) et d'instaurer une république démocratique et sociale. Cette guerre civile de soixante-douze jours est restée dans l'histoire pour une multitude de raisons, qu'il s'agisse de la modernité des lois qu'elle a entériné (séparation des églises et de l'état, reconnaissance de l'union libre, égalité salariale entre instituteurs et institutrices, démocratisation et laïcisation de l'enseignement…) ou de la sanglante répression qui suivi la reprise du pouvoir par les Versaillais. Enfin, la Commune est restée dans les mémoires grâce aux figures emblématiques qui y participèrent, parmi lesquelles la fameuse Louise Michel, institutrice âgée d'une quarantaine d'années en 1871, qui sera condamnée au bagne pour son rôle dans l'insurrection et qui deviendra une figure incontournable de la gauche du XIXe. L'histoire tumultueuse de la militante nous est racontée ici par le biais des archives, et notamment des archives de police, qui constituent une grande partie des sources concernant la vie et l'influence en surplomb de Louise Michel sur la vie politique française de l'époque. L'autrice retranscrit ici une partie de ces sources policières, parmi celles qu'elle a trouvé les plus significatives.

Minutes de procès, rapports de la préfecture de Paris, notes rédigées par des indics de la police… : les sources émanant des autorités sont nombreuses et nous instruisent sur la surveillance étroite sous laquelle le pouvoir garda la militante jusqu'à la fin de sa vie, ainsi que la crainte qu'elle pouvait susciter. Ces rapports se révèlent toutefois insuffisants pour comprendre la personnalité de Louise Michel ni sa détermination à livrer son combat. L'autrice a ainsi également puisé dans les mémoires de l'institutrice, rédigés alors qu'elle était emprisonnée, ainsi que sur les nombreuses lettres de sa main qui ont été préservées. Parmi elles, beaucoup sont adressées à un certain Victor Hugo, le poète et la révolutionnaire ayant entretenu une relation épistolaire pendant de longues années. L'ouvrage nous donne ici un aperçu de cette correspondance, l'autrice ayant à nouveau sélectionné quelques uns des textes parmi les plus révélateurs de la pensée et de la personnalité de Louise Michel. Les articles de journaux qui lui sont consacrés sont eux aussi édifiants, la révolutionnaire n'ayant pas hésité à parler à la presse (et même à monnayer ses interviews), et celle-ci donne souvent d'elle une image surprenante, insistant sur sa fougue et certaines excentricités de sa vie privée (son amour pour les chats, par exemple). Cette diversité des sources consultées et reproduites par l'autrice constitue l'une des principales qualités du roman qui nous offre une plongée, certes brève, mais néanmoins très instructive dans la fin du XIXe. le choix de mettre au premier plan les archives permet également de petites digressions, Louise Michel étant loin d'être la seule personnalité fascinante de l'époque. Judith Perrignon nous instruit ainsi de temps à autre sur le parcours surprenant d'autres femmes militantes, quasiment toutes occultées par la figure de la révolutionnaire, mais qui mériteraient elles aussi d'être étudiées.

Enfin, l'autrice convoque pour compléter son portrait les avis d'historiens et historiennes qui viennent éclairer ou nuancer toutes ces sources. le travail de Judith Perrignon est donc scrupuleusement documenté, et le portait qui résulte du brassage de toutes ces sources est finalement assez contrasté. Les nombreuses anecdotes témoignant du caractère et des habitudes de Louise Michel (elle dilapide systématiquement l'argent qu'on lui prête en le redistribuant aux plus indigents, ou encore refuse la grâce du pouvoir et demande à rester en prison avec ses camardes), de même que les extraits de certains de ses discours permettent aisément de comprendre les raisons pour lesquelles la révolutionnaire a marqué durablement ses contemporains. Dotée d'une sacrée verve, déterminée à être de toutes les luttes et à ne jamais renier ses idéaux, Louise Michel impressionne par son exaltation et la force de ses convictions. Ce qui frappe, aussi, c'est le nombre de personnalités historiques avec lesquelles elle est en désaccord politiquement mais qui la soutiendront pourtant toute leur vie. C'est le cas notamment de Victor Hugo, mais aussi de Clemenceau, qui lui enverra des mandats tout au long de sa détention au bagne de Cayenne, ou encore d'Henri Rochefort, dont elle finira toutefois par s'écarter en raison de son antisémitisme. Ralliée aux idées anarchistes et par conséquent peu désireuse de jouer le jeu des élections, Louise Michel restera tout au long du XIXe une figure tutélaire importante mais gardera ses distances avec les figures montantes du socialisme français. Enfin, parmi les nombreux aspects de la personnalité de la révolutionnaire évoqués, l'autrice porte un regard critique sur la manière dont l'histoire l'a retenue, la réduisant souvent aux relations qu'elle a entretenu (ou plutôt pas entretenu) avec les hommes, ainsi qu'en témoigne d'ailleurs son surnom de « vierge rouge ».

Avec « Notre guerre civile », Judith Perrignon signe une biographie édifiante de Louise Michel, figure emblématique de la Commune et plus largement de la gauche française du XIXe. Pour son roman, l'autrice a consulté un nombre impressionnant d'archives dont certaines sont en parties reproduites ici, ce qui permet de s'immerger pleinement dans cette période historique assez méconnue et qui fait pourtant partie des fondements de notre vie politique actuelle.
Lien : https://lebibliocosme.fr/202..
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« En 1793, les tricoteuses des Clubs et les malheureuses qui méritèrent le surnom de Furies de la guillotine ont épouvanté le monde […] Celles qui sont ici sont les filles des mégères de 1793 ! »
Ainsi parle le Commissaire du Gouvernement le 5 septembre 1871 au Conseil de guerre de Versailles devant lequel comparaissent un certain nombre de femmes , les « pétroleuses  » accusées d'avoir incendié Paris lors de l'écrasement de la Commune par l'armée versaillaise. Plus de mille femmes furent déférées devant le Conseil de guerre et parmi elles, une qui attend son procès en prison et qui va bientôt rentrer dans l'Histoire : Louise Michel.

Judith Perrignon a choisi de dresser le portrait de celle qui est devenue l'égérie féminine et féministe de cette «  guerre civile » si mal traitée dans nos manuels, à travers l'histoire de la fin du XIX e siècle. Les soixante douze jours de la Commune, d'abord : «  Ils ont voté la séparation de l'Eglise et de l'Etat, l'école laïque, l'abolition de la peine de mort, les coopératives ouvrières, la journée de travail à 10 heures, la réglementation du travail de nuit, la légalisation du divorce… […] Ils n'ont pas pu faire le quart de ce qu'ils espéraient faire » avant que la semaine sanglante ne mette fin à leurs aspirations.

Parmi ces communards, Louise Michel .
Louise Michel, institutrice, révoltée par la misère, insoumise, militante infatigable des droits des femmes (comme des Kanaks qu'elle va côtoyer en Nouvelle Calédonie ), anarchiste jusqu'à la fin de sa vie, mais aussi écrivaine, poétesse qui entretient une correspondance avec Victor Hugo qu'elle admire depuis sa jeunesse. Louise Michel condamnée comme les autres femmes à purger sa peine au bagne de Nouvelle Calédonie et qui refuse tout traitement de faveur et amnistie personnelle. Autour d'elle, on retrouve quelques figures de la vie politique de l'époque : Jules Ferry, Clemenceau, Rochefort, et Hugo bien sûr.

Mais on trouve surtout tous ces rapports de police, ces billets transmis par les multiples indics qui la traquent dès son retour du bagne et entre deux séjours en prison, et qui ne la lâcheront pas jusqu'à sa mort. Car Judith Perrignon ne s'est pas contentée d'une biographie classique, ni des Mémoires rédigées en prison par Louise Michel elle-même. Elle a longuement fréquenté les archives et méticuleusement épluché tous ces documents : archives d'outre-mer pour les dossiers des bagnards, archives de l'Arsenal sur le monde ouvrier , archives de la préfecture de police, enfin, dont elle nous restitue si bien l'atmosphère qu'on a l'impression d'ouvrir nous aussi ces boîtes …

Et la journaliste de conclure : «  Je n'ai jamais aussi bien compris le système politique et économique dans lequel j'ai grandi, qu'entre ces murs et ces boîtes poussiéreuses. Tant de choses se sont jouées en cette fin du XIX e siècle. Que je sois plongée dans les procès de la Commune, ou dans l'organisation des obsèques d'Hugo, j'y ai vu la République méticuleusement briser l'élan des utopies au nom de l'ordre économique , jusqu'au désenchantement et à la décomposition actuelle. »

Cinquième livre que je lis de Judith Perrignon et, même si ce n'est pas mon préféré de l'auteure, j'ai retrouvé dans celui-ci ce qui m'avait séduite dans les précédents. L'autopsie d'un personnage ou d'un lieu et d'une époque, un regard journalistique qui sert de base à l'écriture d'un récit qui peut prendre la forme romanesque, la plongée dans l'Histoire pour éclairer le présent et réfléchir à l'avenir.

Un grand merci aux éditions Grasset et à Babelio pour cette lecture.
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"Que devient, à l'aube du XX ème siècle, l'utopie du XIX ème, forgée dans la poésie, la révolution et les mots des idées naissantes ?".
Judith Perrignon utilise cette phrase pour parler de l'évolution des idées politiques révolutionnaires en cette fin du XIX ème siècle, alors que la République républicaine et bourgeoise s'installe, et que les idées radicale de gauche se divisent sur la forme du combat - passer par les urnes ou par la révolution - et sur l'idéologie - anarchistes, socialistes, marxistes...
Mais cette triade pourrait convenir à Louise Michel telle qu'elle est décrite ici ; je n'ose utiliser le mot Trinité pour l'évoquer, même si, après tout, elle avait bien comme surnom la Vierge Rouge...
La "poésie" et les mots, d'abord. Car Louise Michel est d'abord une écrivaine, une poétesse. Admiratrice du Maître, Victor Hugo, avec qui elle entretient une correspondance, qu'elle imite d'abord dans ses propres oeuvres, qu'elle emmène partout avec elle au point de graver ses strophes sur des rochers kanaks, qu'elle incarne aussi en se rêvant Enjoloras, meneur d'une révolution. Elle écrit donc, des contes pour enfants, des romans, ses mémoires. La prison est ainsi pour elle un moment de calme et de tranquillité pour écrire.
"L'utopie" ensuite, et je pourrais rajouter la fraternité. Louise a des rêves d'avenir radieux, de progrès pour les droits des femmes, de diffusion de l'éducation, d'accès aux droits politiques pour les Kanaks, le recul de la prostitution et de la misère... Elle aime le monde, elle aime tout le monde. C'est un amour universel. En revanche, ses théories ne sont pas abouties, concrètes ; elle rêve et elle aime - et elle aide, ce qui va de pair pour elle, mais elle n'apporte pas de solution précise
La "révolution" enfin. Car, depuis son enfance jusqu'à sa mort, Louise Michel est une révolutionnaire. Il faut combattre l'injustice, sous toutes ses formes, partout où elle se trouve. Elle fait peur parce que c'est une femme, qu'elle vit seule, qu'elle est instruite, qu'elle parle bien et qu'elle séduit. Elle fait peur parce qu'elle est libre et qu'elle est un symbole. Cela se voit par la multitude de rapports de rapports de fonctionnaires de police, des sevices d'ordre, des mouchards, attachés à sa surveillance, même lorsqu'elle est libre, que Judith Perrignon ne reproduit qu'en partie.
C'est donc une biographie de Louise Michel, qui est aussi un portrait de la France de la 2ème moitié du XIX ème siècle où tout se transforme si vite, des idées révolutionnaires aux chemins de fer. Louise Michel nous apparaît par les sources officielles de la police, par ses mémoires qui sont une mise en scène, par les journaux conservateurs de l'époque ou les tracts anarchistes ouvriers. Elle nous apparaît aussi par l'autrice qui nous raconte ses rencontres avec Louise Michel dans les salles d'archive, nous laisse percevoir sa propre émotion.
Toutes ces images successives nous dessinent donc un portrait par petites touches qui se complètent : une poétesse, la fille de sa mère, la bonne Louise, l'institutrice, la combattante, l'anarchiste, la féministe, l'amoureuse... "Louise Michel est de tous les combats. Elle est patrimoine".
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Un livre passionnant qui retrace la vie de Louise Michel au travers des rapports des policiers et des indics chargés de sa surveillance.

Institutrice, révolutionnaire, utopiste, féministe, activiste, indignée, engagée, elle fut de tous les combats, de toutes les luttes jusqu'à les payer par 10 ans de déportation pour son rôle pendant la commune.

Elle incarne la foi en un avenir meilleur et la lutte pour les lendemains qui chantent. Anarchiste opposée au statuquo elle ne cessa jamais de se battre pour ses idées. Elle voulait l'égalité, la justice pour tous, que chacun puisse manger à sa faim, que chacun ait accès à l'instruction - surtout les femmes, que les ouvriers s'organisent et mettent en place une forme d'autogestion. Elle poussa sa passion jusqu'à une attitude que j'ai trouvée ambigüe vis à vis des actions violentes.

En toile de fond de ce livre remarquable, s'étale tout le 19e siècle avec ses grands personnages - Hugo, Valles, Marx, ..., ses crises révolutionnaires, ses guerres civiles, ses luttes sociales, la naissances des grandes utopies, la période au cours de laquelle l'éveil de la conscience politique et l'intensité du débat ont changé les sujets en citoyens.

J'ai donc beaucoup aimé cette fresque historique qui raconte le bouillonnement social et intellectuel de l'époque. Une effervescence qui disparaît peu à peu aujourd'hui et que le livre de Judith Perrignon nous rappelle avec force.

A lire d'urgence…
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Carnet de fouille dans les archives officielles françaises (préfecture de police, archives nationales d'outre-mer) Notre guerre civile de Judith Perrignon est aussi un document de préparation du podcast Grandes Traversée sur Louise Michel, ainsi qu'un livre de réflexions personnelles, enrichi d'extraits de travaux d'historiens et historiennes.

Texte court mais extrêmement vivant, ponctué de documents authentiques, il s'ouvre sur le procès de la Commune de Paris, à une époque où la femme est"objet d'affection et de respect" quand "elle est toute entière aux soins de la famille", et maintient "l'homme dans la ligne de ses devoirs sociaux", "mais si désertant cette sainte mission, son influence changeant de caractère ne sert que le démon du mal, elle devient une monstruosité morale. Alors, la femme est plus dangereuse que l'homme le plus dangereux." (discours du capitaine Jouenne, Commissaire du gouvernement au procès des insurgés de la Commune de Paris).

Dans ce contexte, si Louise Michel, enfant illégitime ayant reçu une bonne éducation puis institutrice célibataire meneuse des « pétroleuses », n'est pas condamnée à mort, c'est parce que certaines de ses compagnes sont enceintes ou mères de famille.
En tuer une c'est devoir les tuer toutes, ce sera donc la déportation.

A son retour de Guyane, les traces laissées par ceux qui l'ont surveillée (police, indics), enfermée, déportée, enterrée, démontrent qu'elle avait une vitalité et une bonté pour les indigents et les indigentes hors du commun, qu'elle plaçait la connaissance et ses idéaux humanistes au dessus de sa vie même.

Prenant la parole en public, écrivant, s'exposant souvent, elle constituait un exemple d'émancipation et de revendications menaçant pour l'État français à une époque où les femmes existaient rarement pour elles-mêmes. D'ailleurs il frappant de constater que ses compagnes de lutte et de bagne restent encore aujourd'hui fort méconnues.

Impossible à faire taire, il devient impératif d'abîmer son image. On lui prête une liaison avec Victor Hugo (avec qui elle a longtemps correspondu) et un enfant caché dont il n'existe aucune preuve, on la dit lesbienne aussi puisque jamais mariée mais vivant avec une femme (toujours utile de ramener une femme à son utérus, hier comme aujourd'hui). On l'empêche de prendre soin de sa mère mourante. On la dit folle. Elle est victime d'un attentat. Tient à être jugée avec ses camarades anarchistes, malgré l'accident.

Inlassablement elle poursuit la lutte révolutionnaire, de meeting en prison, refusant tout traitement de faveur. Traquée, surveillée, son enterrement même fera l'objet d'un dispositif policier spécial.

Les livres ne manquent pas sur Louise Michel, qui a également écrit ses mémoires, pendant son incarcération.
Mais Judith Perrignon, en partageant ses découvertes archivistiques, nous emmène sur le chemin de la curiosité. Que peut-on déduire de telle ou telle trace ? Ce qui est vraisemblable, ce qui est certain, ce qui est notable… Qu'en disent les spécialiste ? Et aujourd'hui ?
C'est un grand plaisir de lecture de pouvoir cheminer à ses côtés, et partager un peu de sa démarche et de ses réflexions.
Et une joie toujours renouvelée d'en apprendre plus sur Louise Michel, car comme écrit l'autrice :
« Et l'on enseignera jamais aux enfants des innombrables écoles Louise Michel, combien d'années la république de Jules Ferry la traqua et l'emprisonna. C'est qu'il faudrait en plus leur expliquer qu'elle ne voulait pas en sortir. Qu'elle voyait un certain honneur à être une reprise de justice d'un monde qui ne lui convenait pas. Il faudrait donc leur expliquer le monde. le sien. le leur.
Les prévenir. »

Merci à Babelio, Judith Perrignon et les éditions Grasset, pour ce livre fort attendu, reçu en masse critique.
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Un livre qui me permet de valider un titre commençant par N que je ne regrette pas d'avoir.
J'apprécie Perrignon ce roman s'inscrit dans la lignee de ceux de Julie Perrignon(v Hugo n'est pas mort j'avais adoré).
Même si l'on connait la vie de Louise Michel ce livre permet de concrétiser nos connaissances.
Un livre sur fond historique , une femme qui combat surtout pour les femmes je ne pouvais qu.'aimer
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