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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
J'aurais pu nommer cette critique avec bien des formules moins ironiques. J'avais pensé à des assemblages de mots, tous plus malsains les uns que les autres, du genre de « Moucherons, Gerbe et Violence » ou encore « Sodomie, Speed et Blue Ribbon » ; puis je me suis dit que même si ces titres rendraient bien justice au bouquin, ils ne donneraient pas envie à quelqu'un de sain de s'y plonger. A juste titre, vous l'aurez bien compris.
Récit de violence, récit de noirceur ? Difficile de caractériser ce recueil de 18 nouvelles, aussi brèves qu'intenses. Je vais tacher de vous donner un avant-goût de ce que vous pourrez trouver dans les instantanés de Donald Ray Pollock.

Instantanés, le terme est bien mieux choisi que « nouvelles ». Car, à l'instar d'un Ellis dans son recueil « Zombies », il n'y a pas vraiment de caractéristiques propres à la nouvelle dans les récits de Pollock. Pas de début, pas de fin, pas vraiment de chutes : ça ne ressemble à la nouvelle que par sa longueur. Je conçois plus le livre comme une sorte d'orchestre, un roman-chorale, où chaque personnage apporte sa note dans cette symphonie malsaine et disharmonieuse, qui ne cesse de gagner en noirceur au fil des pages et des notes qui s'empilent les unes sur les autres.
L'écriture de Pollock est intense et calme à la fois. Elle semble apaisée, et difficile parfois de l'appréhender dans son ensemble, tant elle traite d'horreur avec un calme incroyable. On se laisse balloter tranquillement, sans à-coups, et surtout sans deviner (du moins au départ, car on comprend vite que le bonhomme ne fait pas les choses à moitié) à quel point ce que l'on lit est sans espoir ou dégueulasse.
J'avais au départ acheté ce bouquin sur les conseils d'un libraire, lorsque je lui avais demandé conseil. Je lui avais dit que j'étais friand de « beautiful losers », des écrits à la Fante, Brautigan ou encore Bukowski. Et il m'en a au final glissé deux dans les mains. « Knockemstiff » en faisait donc parti. Et même si je comprends le conseil de ce libraire, je ne peux m'empêcher de penser qu'il n'y a pas grand-chose de comparable entre Fante et Pollock, ou même, allons-y, entre Bukowski et Pollock (même si là, je m'aventure sur un terrain glissant). Car rarement dans un écrit de Buk, j'ai été confronté à une noirceur aussi homogène, aussi étouffante. Cela vient certainement de l'écriture qui se veut implacable dans Knockemstiff. Elle déroule tranquillement des champs de noirceur, cultive le malsain sans sourciller une seconde. Et si elle prend parfois son envol, ce n'est jamais pour décoller et surplomber le malsain, mais bien pour s'y enfoncer encore plus, contrairement à Buk. On a alors le droit à des expressions, des métaphores extrêmement puissantes et évocatrices, traitant de cadavres dans une eau stagnante, de pédophilie, de personnes qui perdent pied comme jamais on ne l'a fait auparavant…
Puisqu'à Knockemstiff, la misère ne fait pas demi-mesure. La ville semble être un catalyseur des pulsions les plus basses, un accélérateur des vices les plus tordus. Tous les personnages sont paumés, et les plus chanceux d'entre eux n'ont pas (encore) franchi la frontière de l'indicible. On a donc des alcoolos, des défoncés au speed, des vagabonds, des violeurs, des voleurs, des assassins, des incestueux, des victimes, des putes, des pervers, des crève-la-dalle, très peu d'innocents (ou en tous cas, s'ils le sont, ne le restent pas longtemps) qui déambulent dans une même ville, et où chaque interaction a des propriétés explosives et exponentielles. le tout se révèle un tableau monstrueux et sans égal : si j'ai cru m'en sortir pendant un temps, ce fut vain. Il n'y a pas d'espoir dans Knockemstiff, je suis formel.
Ne nous mentons pas : il y a lecture plus joyeuse que « Knockemstiff », et surtout, je m'attendais à des choses bien différentes lorsque je pensais aux losers flamboyants et glorieux de John Fante ou Richard Brautigan. Ici, difficile de sourire en pensant à un personnage ou une histoire. T'as plus envie de les reléguer dans un coin de ta tête pour qu'il ne te dérange pas dans ta quête du bonheur (lol).

Alors que conclure de « Knockemstiff » ? Franchement, c'est vraiment difficile d'aller foutre une note à un livre comme ça. Car sur la forme, le recueil de Donald Ray Pollock est impeccable : l'écriture es sensationnelle, travaillée, et bosse dans en synergie avec sa misère qu'elle déploie. le problème, à mes yeux, vient en fait du fond, de ce que traite Pollock au gré des pages. Je trouve cela très dur, et le malsain qui s'immisce dans les différents récits est parfois très, trop dérangeant. Et j'ai eu un peu de mal à trouver la motivation nécessaire pour finir une oeuvre aussi désespérante (et j'emploie le terme ici au sens propre).
Si vous aimez les secoués du ciboulot, les fendus du casque, les gars qui ont des pulsions si basses que ça ferait tourner les yeux Bukowski, si vous aimez les histoires de dégoût, où les glaviots et les moucherons ont toute leur place, vous vous éclaterez certainement à la lecture de « Knockemstiff », d'autant plus que l'auteur s'en sort avec maestria.
Mais ce n'est pas dit, qu'au tournant d'un récit, vous ne perdiez pas un peu espoir, quand même.
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Au fond du trou

Je ne suis pas d'habitude, grand amateur de nouvelles, mais j'ai tellement aimé le précédent roman de Pollock, " le Diable, tout le temps " que j'ai volontiers sauté le pas (en plus, la traduction est assurée par Philippe Garnier, qui m'a fait découvrir John Fante).

Déception.
Je n'ai pas retrouvé dans ces nouvelles, répétitives, la maîtrise du récit qui transcendait l'histoire assez désespérante de "Le Diable...".

Le style du roman était cru, rugueux, mais jamais outrancier. J'avais d'ailleurs écrit à son sujet : "Là où une écriture "hallucinée", baroque, excessive aurait fini par lasser, celle de Pollock nous conduit vers le dénouement, sans sacrifier à la pénible complaisance pour le sordide et le cruel qui entache tant de romans policiers d'aujourd'hui."

Et bien, ces nouvelles justement, ont oublié tout sens de la mesure et semblent n'avoir qu'une logique : s'enfoncer toujours plus avant dans le sordide.

Les 18 nouvelles se déroulent toutes dans l'Ohio, aux alentours de Knockemstiff.
Coincés dans leur bled immonde, incapable d'y vivre mais aussi de le quitter, les personnages se croisent parfois, se frôlent sans vraiment se rencontrer au fil des histoires.

Mais les Bobby, Bill, Jake, Daniel, Wanda, Teddy, Frankie, Todd, Mapel, Geraldine, Sharon...ont pour point commun de patauger en permanence dans la m.....e, le sperme, le sang, l'alcool et les barbituriques sur fond de taudis, bagnoles déglinguées, viols, incestes...Solitaires, rejetés, asociaux, demeurés, handicapés...Ils ne sont même pas forcément violents ou en colère, ils sont indifférents à tout. Tous victimes, tous coupables.

Ce n'est plus seulement le traditionnel monde White Trash (qui finit par tourner à la redite), c'est le noir artificiel à force d'outrances.

Là où "Le Diable ..." pouvait encore évoquer O'Connor, Thompson et Mccarthy, voire Faulkner, Mailer ou Egolf... "Knockemstiff" ressemble à du carver perverti et défoncé au crack ou du Harry Crews dément.

Bien sûr, certaines histoires font encore ressortir le talent de Pollock ("La vie en vrai", Knockemstiff", "On achève bien les cheveux" (sic), "Pluie continue"...) et chacune contient des passages admirables. Les fins notamment, sont souvent très réussies.

Mais j'avoue que l'excès continu et le format de la nouvelle qui empêche les histoires de vraiment décoller, m'ont lassé.

En plus, le langage argotique est trop caricatural à mon goût. Comme je ne doute pas de la traduction de Garnier, j'en conclus que le texte original est de cette teneur. Mais c'est vrai qu'on se croirait revenu aux temps héroïques des traductions à l'emporte-pièces des débuts de la Série Noire*

A réserver aux amateurs.
Sans moi.

*dont l'extraordinaire "C'était une jeune femme, vêtue d'un tailleur bleu" de Hammet, devenu traduit en français :"C'était une poulette, le châssis moulé dans un tailleur bleu.")
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Ce livre, c'est Affreux, Sales et Méchants dans l'Ohio. Une plongée dans le monde des petits blancs déshérités (quasiment aucun noir dans ces nouvelles), végétant en marge de la prospérité américaine. C'est presque un témoignage littéraire doublé d'une étude sociologique de terrain sur cette catégorie sociale que l'on peut assimiler à des 'Hillbillies'. Les personnages sont ravagés par l'alcool, la malbouffe, les drogues, la crasse et la bêtise. Néanmoins Pollock leur confère généralement une certaine lucidité sur leur situation faite de déchéance, de misère, d'absence de perspectives, de découragement. Une voie toute 'trashée' vers l'échec. Comme le dit un des personnages dans une des nouvelles 'la vie est une torture'.
Les relations parents-enfants et en particulier père-fils reviennent de façon récurrente dans les récits de Pollock. Elles sont empreintes de violence et d'incompréhension totale. Les personnages de Pollock n'ont personne à qui ils peuvent accorder leur confiance.
L'Amérique prospère est quasi absente de ces nouvelles. Dans l'une d'entre elles seulement apparaît un couple de touristes californiens venus faire du tourisme social chez les péquenauds.
Je trouve que ce livre n'est pas aidé par la traduction. Pollock utilise une langue crue mais la traduction de Philippe Garnier n'est pas toujours à la hauteur. La langue de Garnier est celle d'un sexagénaire qui ne vit manifestement pas dans la marginalité française et n'en connaît pas la langue en tous cas. J'ai parfois eu l'impression de lire un roman des débuts de la Série Noire. Il serait intéressant de lire ce livre dans sa version originale parce que je reste circonspect devant certains choix comme par exemple l'usage du verbe 'chaparder' (quand on pense aux auteurs du chapardage, cela fait sourire...) ou encore l'expression 'les gaz d'échappement plein la hure'.
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Encore de la misère noire, aucune façon de fuir, je devrais dire aucun goût pour fuir ce village . On n'a connu que cela et on va mourir comme cela. Ces nouvelles sont encore plus noires que dans le roman " le diable tout le temps". Beaucoup de personnages sont présents dans plusieurs nouvelles . Rien de réjouissant dans tout cela. Résultat: Après avoir lu ces 2 livres je vais me tourner vers quelque chose de plus positif. Ca me changera. P.S. Pour les Québecois, la traduction française est vraiment difficile d'accès. Il y a trop d'argot.
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Je viens de terminer Knockemstiff, le troisième livre de Donald Ray Pollock que j'ai lu est en réalité son premier. Il est composé de 18 nouvelles qui se déroulent au sud de l'Ohio, dans un milieu marginal, sordide rongé par la pauvreté et la déchéance et peuplé de personnages tellement déguelasses qu'il est difficile à comprendre comment l'auteut a pu les inventer. J'espère qu'il ne s'est pas laissé inspirer par de vraies gens. Une mort qui en vaut la peine est son roman le plus récent. C'est grâce à ce roman que j'ai découvert Donald Ray Pollock. Je vous conseille de lire d'abord ce roman magistral avant d'entamer Knockemstiff, qui est à mon avis plutôt une curiosité à lire si on a été impressionné par Une mort qui en vaut la peine.
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