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4,3

sur 2090 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Sur la forme, il n'est pas difficile de s'habituer à l'absence de ponctuation et une présentation du texte saccadé, un peu comme des prises de notes, des réflexions au tout venant. Et quelles reflexions ! Pas seulement sur toutes ces expressions qui ne font pas rêver ("trois-huit" ; travail à la chaîne ; prime de froid et uniforme allant avec ; intérim et travail précaire, etc). C'est la vacuité des missions qui s'enchainent et enchaînent à rien, au vide, à l'inutile. Avoir un travail purement alimentaire dans des usines d'alimentaire (se faire manger pour manger), région sclérosée par des activités d'abattage (au sens propre comme au figuré), bête de somme moderne au profit de la grande consommation. Un roman coup de poing sur le sens de cette vie.. Pas encore commencé sa "journée" qu'on veut la voir finie : du temps définitivement perdu pour une vie cassée. L'agonie. Un boulot "en attendant" (quoi ?). On achève bien... les hommes.On comprend pourquoi ce livre est unique et largement primé : l'écriture alterne entre cynisme, humour, références opportunes, jeux de mots qui claquent, réalisme social abrutissant et poésie. La littérature en soupape. Un livre comme j'aime : on en sort différent. Pour finir une petite définition que je place comme ça : "Usiner = façonner (une pièce) avec une machine outil". Jdcjdr.
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J'arrive à ma septième lecture pour cette sélection des 68 premières Fois : À la ligne de Joseph Ponthus, un roman sous-titré « Feuillets d'usine »…
Avant même de le découvrir et bien que ne lisant jamais les critiques des autres avant d'avoir publié la mienne, je sais que ce livre a reçu, chez les 68 et ailleurs un accueil enthousiaste.

Ce roman est d'inspiration hautement autobiographique. le JE est bien celui de l'auteur qui nous raconte une partie de son histoire quand, par amour, il a quitté sa région et son travail dans le social et, par nécessité, s'est inscrit dans une agence d'intérim pour gagner sa vie comme ouvrier d'usine non qualifié.
Ce qui frappe immédiatement, c'est la mise en page et le style : des vers libres, sans ponctuation.

J'ai ressenti ce livre comme un poème épique, une épopée des temps modernes qui donne la parole aux ouvriers intérimaires et aux sans grade, qui nous rappelle que, malgré les progrès techniques, le travail à la chaine existe toujours, usant, répétitif, avilissant, mortifère…
C'est Joseph Ponthus qui s'exprime, qui a couché sur le papier ses impressions mises en mots, en littéralité, mais il y a dans ce livre une véritable dimension collective ; les exploits ne sont ni légendaires, ni historiques, mais quotidiens, basiques, pratiques, physiques… Il y a des larmes et du sang, du courage et de la douleur… des combats contre soi-même, des victoires et des défaites… Il y a aussi une forme d'humilité, notamment dans la notion de « feuillets », pages volantes réunies et assemblées pour devenir ce texte définitif.

J'ai adoré l'univers référentiel de Joseph Ponthus qui rejoint souvent le mien, univers littéraire et musical… Dans les pires épreuves, se sont souvent les souvenirs de lectures ou de chansons qui aident à tenir.
J'ai retrouvé des détails assez personnels, ne me touchant pas directement mais faisant partie du quotidien d'un proche.
Ce texte est à la fois poétique et réaliste.
J'ajouterai un petit mot pour le bandeau qui entoure le livre, pour ce corps humain découpé, pour les parties manquantes puis retrouvées, pour le talent de Kebba Sanneh qui l'a dessiné et qui illustre si bien l'ambiance de ce livre.

Ce livre procède d'une urgence, d'une nécessité de dire la réalité ouvrière et intérimaire, de mettre en lumière le monde de l'usine.
Une belle réussite. Un succès mérité.
Cependant, je suis davantage conquise par l'esthétique du propos que par une véritable émotion.
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Quelle claque! Ce livre est presque un ovni, ce n'est pas un roman mais il raconte bien une histoire, ce n'est pas de la poésie mais cela se lit comme des strophes, c'est un témoignage autobiographique, un peu un documentaire un peu pamphlet parfois, avec des héros ordinaires. La vie quoi!
Je ne savais pas à quoi m'attendre en lisant "A la ligne: Feuillets d'usine", je ne suis pas déçue.
L'auteur raconte son expérience à l'usine, en tant qu'intérimaire, il découvre un univers, une vie difficile qui ne trouve son sens qu'à la fin du mois au moment de la paye.
C'est un texte fort, avec des partis pris, de l'humanité, de la fraternité, beaucoup de bon sens, parfois du découragement, du réalisme, de jolies références littéraires et une très belle écriture. Il n'y a pas de ponctuation et pourtant tout est clair et fluide.
Cette lecture a marqué mon esprit pour un moment.
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Une claque ce livre ! Je savais qu'en ouvrant ce livre, la lecture ne serait pas facile mais là... la condition ouvrière, les conditions de travail dans les usines, et que dire de celles de l'abattoir... On relativise après une telle lecture. L'auteur nous raconte sa vie d'ouvrier, obligé de travailler à l usine pour suivre sa femme, en attendant un meilleur boulot qui correspond à ses compétences, qu'il ne trouvera pas. Il atterrit dans une usine agroalimentaire de poisson. L''odeur, les horaires décalés, le froid, le rythme de travail, les conditions y sont rudes. Mais moins quand même que celles de l'abattoir. C'est terrible! Il faut tout de meme être armé pour supporter ca. Meme s'il n'y a pas le choix, il faut de l'argent pour se nourrir.
J'ai aimé la franchise de l'auteur, son style direct. C'est tellement bien écrit, percutant. Un livre à lire absolument!
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Mais pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour découvrir ce texte iconoclaste, terriblement humain et si bien écrit ?
Il a fait Hypokhâgne et il travaille dans une usine. Il vend sa force de travail car il faut bien manger. Parce que sa culture classique et populaire ne lui assure pas un emploi digne des sacrifices de sa mère pour qu'il fasse des études.
Son acuité et son esprit d'analyse rendent ce témoignage d'autant plus pertinent et incontestable. Bien sûr, l'auteur était un homme engagé. On pourrait l'accuser d'orienter son récit. Mais tout est factuel : les cadences de travail, la rationalisation des processus de production, l'exploitation des intérimaires, les petits arrangements avec le Code du travail, etc.
Charlie Chaplin et Les Temps modernes sont constamment en filigrane.
Le narrateur évoque aussi les plaintes du corps, les douleurs qui surgissent sans pause possible, souvent en rapport avec des outils mal adaptés, des machines qui dysfonctionnent et qu'il faut remplacer.
S'il ressort du récit l'entraide et la solidarité entre les camarades d'infortune, le narrateur ne cache pas l'anxiété intense qui le gagne lorsque son binôme n'est pas à la hauteur. La peur de perdre cet emploi, qui pourtant le perd lui-même, répond à un instinct de survie.
Les courts chapitres pourraient s'apparenter à des anecdotes mais chaque entrée s'inscrit dans un tout dont les contours définissent une forme d'esclavage moderne.
L'humour n'est pas absent de ce récit mais il prend souvent la voie du sarcasme ou du cynisme. On peut sans doute rire de tout mais la lassitude ne permet pas la légèreté.
Le style de vers en prose est très bien rendu par Jacques Bonnafé qui assure la lecture de l'édition audio. Sa voix bourrue semble faite pour épouser le ton de la narration et scande le texte à merveille.
Et comme le poète, ce qui sauve le narrateur, c'est l'amour qui l'unit à celle qui l'accompagne dans son coeur.


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Un livre écrit à la chaîne par un intérimaire qui décrit la beauté (oui il y en a une part) et l'horreur du travail dans les usines en Bretagne. Un livre truffé de références littéraires, écrit sans pudeur avec une plume parfois acerbe et qui ne connaît ni point ni virgule.
Merci Joseph Ponthus de décrire le quotidien des premiers de corvées ! Vous appartenez à ceux qui par leur littérature savent leur donner les lettres de noblesse qu'ils méritent, à l'instar de Upton Sinclair et sa Jungle ou de Robert Linhart et de son Etabli.
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Titulaire d'un diplôme d'éducateur spécialisé, Joseph suit son épouse en Bretagne. Devant l'impossibilité de trouver un travail stable dans son domaine aux alentours de sa nouvelle région, il se dirige vers le monde merveilleux de l'interim, qui l'amène à découvrir les usines de poissons et les chaînes d'abattage.

Et quelle claque pour moi ! Je reconnais que j'avais une très mauvaise vision du travail à chaîne, et du travail précaire en général. J'imaginais bien que ce n'était pas joyeux, mais je pensais tout de même les ouvriers un peu mieux protégés que ça : un travail journalier, des horaires donnés le jour même, des douleurs physiques qui ne peuvent que se régler qu'à coup d'anti-inflammatoires, le week-end qui permet à peine de recharger ses batteries… Lire ce témoignage quelques jours après avoir lu du Zola donne une impression particulière.

Ce qui marque également, c'est l'ambiance : malgré la difficulté du travail, on sent des équipes soudées et solidaires, prêtes à relever le défi des quotas quotidiens, et qui commencent même le travail de la prochaine pause s'ils terminent en avance pour faciliter la vie des suivants. Je m'attendais honnêtement au contraire : que chacun cherche à se préserver au maximum quand une occasion se présente. Cette solidarité à toute épreuve ferait presque envie, si l'auteur ne parlait pas de la pénibilité de ses tâches entre-temps.

Le style du texte correspond parfaitement au propos : une phrase par ligne, sans ponctuation, comme des notes prises à la va-vite avant de s'effondrer dans son lit.

Quand on a toujours travaillé dans un bureau, ce livre nous donne un sacré coup de poing.
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C'est d'abord sa présence et ses échanges avec François Busnel à La Grande Librairie qui m'ont incitée à lire le récit de son passage comme employé dans des usines agroalimentaires en Bretagne.
Un grand jeune homme posé, aux allures d'intellectuel né pour manier le stylo et non pour se décarcasser sur des lignes de production, du travail à la chaîne qui n'offre pas beaucoup de répit, même pour penser. C'est son ton calme et son sourire désarmant que j'ai retrouvés dans la lecture de cet ouvrage hors norme, sans ponctuation, dont les phrases sont alignées comme des poèmes sans en être. « En avant, Marx », Joseph Ponthus, se transforme en chantre du prolétaire dans ce « road-tripes » où l'harassant boulot se voit magnifié par la grande littérature, conviée à envahir l'espace abrutissant des abattoirs.
Un récit émouvant et sincère sur la vie ordinaire des travailleurs de ce monde.
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Sans fin. Sans limite. Perpétuité. Un sens giratoire sans issue. L'usine a quitté la ville, puis les faubourgs. On ne les voit plus. ni bras, ni corps. Sans cul, ni têtes. le ventre de Paris n'est plus.
A peine voit on le long de nationales ou quelques départementales, des cubes à perdre l'horizon. Plus de fumées, de fracas, plus de sirènes. Mais les entrailles mécaniques de l'enfer se dévident encore à l'infini. Adieu Vaugirard, adieu les halles, adieu Javel, adieu rue des Frigos. Mais il reste toujours en corps Craonne sur un plateau...
Travailleurs de l'ombre, abattoirs, entrepôts, en tôles et sous néons, un peuple remplit le ventre du monde.
Beauté sur enfer, on lit poésie. Mais " Ne pas parler de poésie, ne pas parler de poésie, en écrasant les fleurs sauvages
Et voir jouer la transparence au fond d'une cour aux murs gris, où l'aube n'a jamais sa chance", fredonne Barbara.
Joseph Ponthus parle des enfers, écrit comme paradis, c'est peut -être là que commence l'infini.

Astrid Shriqui Garain

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Sublime écrit sur la vie en usine : tâches répétitives, horaires décalées, fatigue...
Et la littérature qui sauve l'auteur.

Très beau roman
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