J'arrive à ma septième lecture pour cette sélection des 68 premières Fois : À la ligne de
Joseph Ponthus, un roman sous-titré « Feuillets d'usine »…
Avant même de le découvrir et bien que ne lisant jamais les critiques des autres avant d'avoir publié la mienne, je sais que ce livre a reçu, chez les 68 et ailleurs un accueil enthousiaste.
Ce roman est d'inspiration hautement autobiographique. le JE est bien celui de l'auteur qui nous raconte une partie de son histoire quand, par amour, il a quitté sa région et son travail dans le social et, par nécessité, s'est inscrit dans une agence d'intérim pour gagner sa vie comme ouvrier d'usine non qualifié.
Ce qui frappe immédiatement, c'est la mise en page et le style : des vers libres, sans ponctuation.
J'ai ressenti ce livre comme un poème épique, une épopée des temps modernes qui donne la parole aux ouvriers intérimaires et aux sans grade, qui nous rappelle que, malgré les progrès techniques, le travail à la chaine existe toujours, usant, répétitif, avilissant, mortifère…
C'est
Joseph Ponthus qui s'exprime, qui a couché sur le papier ses impressions mises en mots, en littéralité, mais il y a dans ce livre une véritable dimension collective ; les exploits ne sont ni légendaires, ni historiques, mais quotidiens, basiques, pratiques, physiques… Il y a des larmes et du sang, du courage et de la douleur… des combats contre soi-même, des victoires et des défaites… Il y a aussi une forme d'humilité, notamment dans la notion de « feuillets », pages volantes réunies et assemblées pour devenir ce texte définitif.
J'ai adoré l'univers référentiel de
Joseph Ponthus qui rejoint souvent le mien, univers littéraire et musical… Dans les pires épreuves, se sont souvent les souvenirs de lectures ou de chansons qui aident à tenir.
J'ai retrouvé des détails assez personnels, ne me touchant pas directement mais faisant partie du quotidien d'un proche.
Ce texte est à la fois poétique et réaliste.
J'ajouterai un petit mot pour le bandeau qui entoure le livre, pour ce corps humain découpé, pour les parties manquantes puis retrouvées, pour le talent de Kebba Sanneh qui l'a dessiné et qui illustre si bien l'ambiance de ce livre.
Ce livre procède d'une urgence, d'une nécessité de dire la réalité ouvrière et intérimaire, de mettre en lumière le monde de l'usine.
Une belle réussite. Un succès mérité.
Cependant, je suis davantage conquise par l'esthétique du propos que par une véritable émotion.