Terry Pratchett est un monument de la fantasy qu'on m'a souvent cité et recommandé. Il faut dire qu'avec sa vaste saga des Annales du Disqu-Monde il est devenu culte et a inspiré bien des auteurs ensuite. Cependant quand j'avais essayé d'y entrer, il y a bien longtemps, par le tome 1, logique !, j'étais restée sur le pallier. C'était avant qu'une collègue, fan, me dise : « Attends, prends cette anthologie sur La Mort, c'est la meilleure ! ». Ni une, ni deux, j'ai écouté et quelle bonne idée !
Décédé en 2015,
Pratchett a laissé derrière lui une oeuvre considérable avec ses 35 tomes et 12 hors séries parus entre 1983 et 2014 rien que pour l'univers du Disque-Monde. Il a ainsi laissé tout un public orphelin. Je le connaissais de nom, forcément, comment passer à côté quand on s'intéresse à la Fantasy depuis aussi longtemps que moi. Mais je pensais que son registre : l'humour et la light fantasy, ne me correspondraient et je suis bêtement passé à côté pendant des décennies. Erreur ! Si on s'attaque au Disque-Monde par la bonne porte, on peut en sortir comblé. C'est ce qui m'est arrivé ici.
En débutant autrefois avec la Huitième couleur, j'avais peut-être pris un texte trop aride pour moi. En reprenant avec La Mort, j'ai de suite été plus séduite par la plume légère et virevoltante de l'auteur qui m'a rappelé les ambiances ô combien sarcastiques, caustiques et amusantes de Princess Bride et Good Omens dont j'ai vu les adaptations depuis. C'est simple,
Pratchett, et son traducteur que je salue haut la main !, sont hautement irrévérencieux, barrés et inarrêtables ! A chaque qu'on imagine qu'ils n'iront pas sur cette fois parce que non, c'est trop gros, ils y vont et qu'est-ce que c'est drôle !
Je me suis ainsi régalée à vitesse grand V tout au long de ces courtes 240 pages à suivre le jeune Morty, embauché comme apprenti après de la Mort, oui oui La Mort, La Faucheuse, qui souhaite prendre des vacances parce qu'IL en a un peu marre quand même, ce qu'il ne dit à personne et qui cause bien des dérèglements. Suivre Morty, c'est comme suivre cet archétype du jeune héros de fantasy, bouseux à décrotter au début et prince ou quasi à la fin. Et
Pratchett appuie justement et avec malice là-dessus, il brode un récit détonnant et dépolissant sur tous ces codes de la high fantasy qu'on connaît si bien pour en faire un récit tordant à base de princesse à sauver, mais ou bien sûr rien ne se passe comme prévu. Il suffit d'ailleurs pour ça de voir le personnage de la Mort sorte de portrait, à la
Pratchett, de l'employé de bureau londonien qui un jour pète une durite à force d'en faire trop. Cette allégorie qu'il porte autour de la valeur travail, on ne s'y attend clairement pas, et qu'est-ce qu'elle nous amuse en étant aussi décapante !
Tout l'art de l'auteur est dans sa science du rebondissement incessant et de la petite phrase qui fait toujours mouche. C'est pour cela que je salue le traducteur qui a dû vaillamment suivre l'auteur dans ses délires. Chapeau l'artiste ! Je me suis régalée avec cette verve, cet humour simple et partout si efficace.
Pratchett en rajoute en plus en s'adressant directement à nous avec des notes en bas de pages, elles aussi fort amusantes où il tort et décortique tout ce qui fait la physique et la métaphysique de son univers.
Jay Kristoff,
Jenn Lyons et consoeurs qui aiment bien jouer de ce procédé, n'ont qu'à bien se tenir face au maître, qui est bien plus efficace et moins lourd qu'eux !
Alors tant pis si l'histoire est prévisible à souhait, limite on s'en moque, on se plaît surtout à suivre les échanges savoureux entre les personnages, à les voir tomber dans des pièges plus gros qu'eux, à voir bourdes sur bourdes. Juste ça, c'est tordant, prenant et savoureux. On ne se lasse pas de la plume si habile et virevoltante de l'auteur dans chaque situation avec des personnages tellement improbables derrière leur masque d'archétypes.
Alors vraiment aucun, aucun regret d'avoir écouté cette collègue et de lui avoir emprunté son anthologie sur La Mort pour enfin plonger et me régaler avec l'univers et surtout la plume folle de
Terry Pratchett. Cette science de la langue, du calembours, de la calembredaine, qu'est-ce que c'est jouissif. Je ne pensais pas aimer la light fantasy, je découvre que ça me divertit incroyablement et que je savoure encore plus la plume de l'auteur, sa science de la mise en scène comique et de la petite phrase, grâce à cette histoire pauvre en enjeu. Je ne suis pas prête de lâcher
Pratchett !
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