Un livre que je n'aurais probablement jamais lu si je n'avais pris connaissance de la polémique du parrainage de
Sylvain Tesson au printemps des poètes. Tesson ayant préfacé
Jean Raspail (pas ce livre ci) et les 1200 signataires le condamnant unanimement, un certain esprit de contradiction m'a poussé vers le brûlot.
Alors, par curiosité, parce qu'il est d'après moi toujours préférable de se heurter à ce que l'on craint ou ce avec quoi on est éduqué à être en désaccord, j'ai lu le camp de saints.
Eh bien, mes aïeux, quelle aventure.
Si la littérature est un voyage, celui-ci est mémorable.
Raspail est très probablement d'extrême droite (je ne sais s'il le revendiquait) mais cela suffit t'il pour se draper derrière des certitudes et ne pas tenter de comprendre ?
Au risque de déplaire immédiatement, ce livre me fait douter de l'influence de la littérature sur le monde mais me fait réaliser l'influence de la gauche politique sur l'essentiel de la littérature tant celle « de droite » n'apparaît pas vraiment sur les étals des librairies.
Disant cela, je n'ai pas de regret de ne pas en avoir plus lu mais je regrette que des livres comme
le camp des saints aient été systématiquement éloignés et ce faisant, sont devenus des objets cultes d'art contestataires alors qu'il aurait fallu en discuter bien avant que l'extrême droite le considère comme prophétique.
Peu importe mon opinion personnelle de l'auteur, de ses opinions ou des opinions politiques de ses adorateurs ou de ses détracteurs.
La seule et unique chose qu'il me semble essentielle de dire est qu'il s'agit bien d'un livre et de littérature. Une fiction.
Si l'extrême droite pense sincèrement que ce livre est prophétique, elle se trompe.
Si la gauche pense que le livre n'est qu'un prétexte au racisme de son auteur, elle se trompe.
Si on considère que la littérature doit dire les choses doucement, évitez ce livre à tout prix.
Raspail n'épargne rien ni personne.
Tout y passe. L'étranger qui est sale, l'Occident qui se suicide, l'Eglise qui pervertit son message, la droite qui n'est rien, la gauche qui se prend pour tout mais surtout la France républicaine et ses habitants dont il dresse des portraits d'une rare violence et à laquelle il préfère la France des églises, des villages et de la chrétienté (est-ce condamnable ?)
Raspail est mort et son monde aussi.
Il reste le livre d'un fervent chrétien royaliste qui savait très bien écrire.
Raspail est mort, sa rage est stupéfiante et parfois aveugle mais si la littérature est une aventure inconfortable, il a tapé fort.
Fin de sa civilisation : il ne l'a pas supporté et l'a écrit avec talent.