Avec le succès commencera aussi l'exploitation d'Utrillo : "une gloire de peintre malheureusement toujours accompagnée de l'intérêt, équivoque et indiscret pour son histoire d'homme, pour le côté anecdotique de son histoire de créateur irresponsable, de personnage type d'une époque et d'un milieu facilement entré dans le mythe."
C'est un peintre de la banlieue... Devant un mur qui laisse le passant indifférent, Utrillo s'arrête, contemple le jeu coloré des taches, le note dans son esprit et le peint. Ce mur l'intéresse autant que les nuages, les merveilleux nuages qu'il sème, souvent à peine perceptibles, dans le ciel léger.
En effet, la peinture d'Utrillo se présente au premier abord comme un art simple, voire naïf ; ce n'est qu'en regardant au-delà des thèmes, monotones et banaux, au-delà des façades et des perspectives de rues désertes que nous percevons la vraie signification de l'œuvre de l'artiste et sa valeur. En exprimant avec sa palette ses désirs impossibles, ses angoisses, ses tourments et ses rêves, Utrillo réussit simplement en se servant de moyens picturaux immédiats et directs, à découvrir le vrai visage de sa ville et à en pénétrer le cœur.
Le mur, "motif" par excellence pour Utrillo, est ce que sont pour d'autres peintres les arbres, l'eau ou le ciel. Il les multiplie donc, l'un après l'autre. Porte Saint-Martin est encore une vue frontale cherchant à rendre la "matière" du sujet et le temps qui a transformé cette matière, année après année.
Mon fils a fait des chefs-d'œuvre avec une carte postale alors que beaucoup de peintres ne font, de leur œuvres, que des cartes postales.
Suzanne Valadon