Une de mes premières séries. J'avais aux alentours de 14 ans. L'histoire m'échappe, mais je me souviens des émotions ressenties. J'avais adoré ! Peut-être lui trouverais-je plein de clichés aujourd'hui, mais ça fait partie des oeuvres qui ont façonné ma passion pour la lecture. Alors, tout mon respect et merci !
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«À quoi elle sert, ma maison, s’il n’y a personne dedans?» Personne. Pas d’enfants. Pas de femme. Cette dernière pensée le dérangea et, pour y couper court, il s’occupa à fricoter un souper hâtif. Il le trouva indigeste. Pire que celui des autres soirs. De toute façon, ce n’était pas de nourriture qu’il avait faim, ce soir, et il le savait. Pourtant, il se refusait de penser aux exigences de son corps d’homme en pleine force, comme si ces plaisirs n’étaient plus pour lui.
Elle avait réalisé trop tard qu’elle venait de dévoiler le drame qui lui détruisait le cœur depuis dix ans : être pour son mari une façade sociale et non une femme, sa femme, son épouse de cœur et de corps. Et que quelqu’un d’autre le sache dorénavant l’avait humiliée encore davantage, l’avait rendue encore plus misérable, puisqu’elle était privée de l’homme qu’elle avait honnêtement, naïvement aimé et marié, et, ironiquement, était comblée aujourd’hui par un homme qu’elle aimait passionnément et qui ne l’aimerait jamais. Et, surtout, condamnée à vivre avec l’ombre du premier.
La jouissance les avait tellement secoués qu’elle les avait laissés tremblants, coupés du reste du monde. Il y avait eu un temps indéfini. Leurs souffles avaient ralenti peu à peu, puis la réalité avait repris lentement son espace, leur raison avait dominé leur corps. Germaine avait pris conscience de son accueil sans retenue et l’avait jugé indécent. Leur étreinte s’était achevée aussi brusquement qu’elle avait commencé.
Charles n’avait jamais accepté la mort de sa femme, causée par une hémorragie après l’accouchement, et il en voulait inconsciemment à l’enfant innocente qui, il le sentait bien, surmontait difficilement sa timidité envers lui. Il admettait, ce soir encore plus que tant d’autres soirs, que son attitude envers sa fille était injuste. «C’est pas de sa faute. Je devrais être assez grand pour comprendre ça, me semble. »
Elle avait compris. Et elle avait eu peur. Peur d’elle-même. Puis elle avait eu peur qu’il ne profite pas de ce premier et probablement dernier instant de leur vie où ils étaient seuls. Peur de devenir vieille sans jamais avoir été aimée passionnément par un homme, ne serait-ce qu’une fois, une pauvre fois dans toute sa vie. I