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3,96

sur 597 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Philip Roth me scotche et j'adhère, sans Indignation.
Sans même forcer le trait, il nous livre bien la psychologie qui façonne la jeunesse.
Marcus Messner, dix-neuf ans en cette année 1951, période de la guerre de Corée, est un jeune homme réaliste et sérieux. Lucide, et pour échapper à un univers familial pesant, il décide de s'éloigner pour intégrer le Winesburg College dans le New Jersey. Il rompt le cordon ombilical en somme et c'est dans une Amérique pudibonde et conservatrice que va se poursuivre désormais, son évolution mentale et physique.
Le jeune homme s'impose alors une règle de vie quasi ascétique et se ferme à tous pour poursuivre un seul but, réussir ses études. Il veut se soustraire à la guerre ou s'y soumettre, mais avec un diplôme lui valant grade pour ne pas être affecté en première ligne. Il se heurte alors à un questionnement intérieur que favorise son isolement. À savoir : ce qu'on pense de lui ? Ce que tel ou tel disent de lui ? Comment le voient-ils ? Comment le jugent-ils ? Et cette enveloppe que recouvre une personnalité naissance qui croît à vue d'oeil. Suis-je déjà cet autre qui mue et dont la carapace se solidifie, comme un ciment qui durcit ? Un adolescent qui se transforme et s'envole comme il sied à chacun.
Mais quand le directeur le convoque (puisqu'il à demandé à changer de chambre à plusieurs reprises), pour le sonder un peu, le faire cadrer dans quelques rigueurs, Marcus s'enflamme avec fougue. Bien que le doyen ne lui adresse pas, outre mesure, des remarques purement désobligeantes, ces propos retentissent comme autant de reproches et constituent selon le garçon, une intrusion dans sa vie privée. Lui, qui se considère comme étant irréprochable, puisque ses notes sont excellentes, puisqu'il ne fait partie de rien et s'isole de toute communauté. État qui suffit à lui rendre insupportable toute idée de justification.
Adolescent ! Qui dit ‘'oui'' qui dit ‘'non'', mais que son coeur contredit dans un contre qui n'est plus jouable. Cette fille parfaite qui l'enchante, le fascine et le déçoit. Qui, de lui se délie et n'est plus en osmose dans ses rêves. Qui lui donne du plaisir au-delà de ses espérances, tantôt attirante, tantôt repoussante. Attraction d'une force irraisonnée. Sublimation de la beauté et de la sensualité. Une fatalité qui l'égare de ses aspirations premières. Une constante comme une dénégation de la perfection. La laideur d'une destinée impossible à atteindre pour un être au coeur tendre qui chemine à l'inverse, en croisé du passé. Un sentiment de vieillesse, une blessure qui le dénature et lui vole jusqu'au meilleur du souvenir, cette image de son père, un père sombre qui par trop de sagesse le condamne...
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Que fait-on quand on est un jeune homme de dix-sept ans réservé mais courageux et revant d'indépendance, que l'on met tout en oeuvre pour l'obtenir en suivant scrupuleusement les règles familiales et sociales mais avec la raide intransigeance de son age, que cette intransigeance rend cependant réfractaire aux diktats de bienséance induits par une société américaine affreusement corsetée dans des principes hypocrites, que l'on refuse cette hypocrisie qui ne vous accepte sur ce campus universitaire très WASP que si vous en adoptez scrupuleusement les codes, qui vous interdit de fréquenter de trop près les filles et seulement les plus conformes, et qui vous serine des valeurs de droiture, de courage et de patriotisme pour mieux vous envoyer vous faire trouer la peau dans les tranchées de la guerre de Corée?
On crie : Indignation!
Mieux: on l'écrit, avec le talent et l'acuité de regard de Philip Roth qui nous sert ici avec une charge émotionnelle d'une efficacité redoutable un pamphlet indigné habilement maquillé sous la courte, si courte biographie d'une jeunesse débordante de sève mais étouffée par les carcans moraux de ses pères et sacrifiée aux intérets du drapeau. Sublime!
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J'ai beaucoup aimé ce livre qui nous narre les vicissitudes d'un jeune homme juif vivant près de New-York, en proie avec les viccissitudes des appréhensions parentales sur son avenir et qui fuit dans une université de l'Ohio, pour prendre de la distance par rapport à son père mais va être confronté à la mentalité fermée d'une contrée rurale des années cinquante.

C'est très bien écrit et traduit. Il s'agit du deuxième tome d'un quartet intitulé Némésis. Je n'avais pas lu le premier mais cela ne pose aucun problème.

Après avoir découvert cet auteur dans le complot contre l'Amérique, c'est sûr que je ne m'arrêterai pas en si bon chemin et m'en vais acheter un autre opus de cette série.
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Après quelques livres très sombres sur la vieillesse et la mort , Roth retrouve son ton habituel , repars dans une époque qui lui à permis l'élaboration de grands romans et il à bien eu raison.
Cette histoire entre les mains d'un auteur moins talentueux aurait aboutie à peu de chose , Roth en fait un grand roman initiatique .
Ce jeune homme , le lecteur le suis avec un intérêt croissant , qui trouve son apothéose dans un final brillant .
Ici c'est du vrai Roth que l'on retrouve , celui qui pars du quotidien le plus banal pour aboutir à une grande histoire , passionnante , très bien écrite .
Un grand opus d'un auteur majeur .
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Il faut toute l'implacable acuité et tout le savoir faire de Philip Roth pour imaginer et agencer les étapes qui mèneront un jeune homme à la mort. le style est fluide et agréable. Tout s'enchaîne et se suit. La construction d' « Indignation » donne en permanence le sentiment que nous n'avons aucun contrôle sur ce qui arrive. Nous apprenons en effet rapidement que Marcus est décédé et que c'est lui qui d'outre tombe s'adresse à nous. Ce livre est donc un compte à rebours d'actes anodins qui mène vers un trépas certain. C'est la relation des évènements du point de vue de celui qui les a vécus. L'avancée vers une conclusion connue et le récit résigné du mort lui-même donnent ici le sentiment d'une profonde fatalité.

Ces quelques lignes extraites des dernières pages du livre semblent être un bon raccourci de ce bref roman :
« Oui, le bon vieux défi américain, "Allez vous faire foutre", et c'en fut fait du fils de boucher, mort trois mois avant son vingtième anniversaire – Marcus Mesner, 1932-1952 – , le seul de sa promotion à avoir eu la malchance de se faire tuer pendant la guerre de Corée, qui se termina par la signature d'un armistice le 27 juillet 1953, onze mois pleins avant que Marcus, s'il avait été capable d'encaisser les heures d'office et de fermer sa grande gueule, reçoive son diplôme consacrant la fin de ses études à l'université de Winesburg -très probablement comme major de sa promotion -, ce qui aurait repoussé à plus tard la découverte de ce que son père sans instruction avait tâché de lui inculquer dès le début : à savoir la façon terrible, incompréhensible dont nos décisions les plus banales, fortuites, voire comiques, ont les conséquences les plus totalement disproportionnées. »
Tout est dit : l'exaspération et l'intransigeance de Marcus, la morale d'un moment et un conflit lointain vont entrer en résonnance pour broyer un individu.

Marcus, le gentil garçon juif, travailleur, dévoué à sa famille n'aura pas vu sa vie passer. Son court destin le conduira de la boucherie kasher familiale à la guerre de Corée. Il veut échapper à la surveillance maladive d'un père hyper inquiet et il choisit pour ses études une lointaine université du Middle West. Il désire simplement travailler d'arrache-pied et échapper à la guerre de Corée. Sorti de son milieu, Marcus va se révélé inadapté aux conventions sociales de son temps. Chacun de ses gestes va désormais être une réaction d'indignation à la sottise et à l'hypocrisie d'une époque. Il refuse de changer, de faire des compromis, des efforts d'intégration ou d'assimilation. Il ne veux pas suivre les rites étudiants, renier un corps, un amour miraculeusement offert.

« Indignation » est un roman extraordinairement humain. Il est le miroir d'une époque et d'un milieu. Il dévoile un pan de l'histoire des Etats-Unis peu connu. Une période de frustration sexuelle sur les campus des années cinquante et de boucherie guerrière en Corée. L'Amérique est vorace. Elle dévorera ses enfants qui ne sont, quoiqu'en disent les parents, amis ou doyens, ni rebelles, ni coupables.
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A l'instar de ses autres romans tels que L'écrivain des ombres, La leçon d'anatomie et La contrevie, Philip Roth (prix Pullitzer-fiction 1998 pour Pastorale américaine) aborde dans Indignation le thème de l'impuissance et de la frustration.
"Oh merde à la fin" s'indigne Markie, fils unique brillant, harcelé par son père boucher kasher, sans instruction, obsédé par la peur de le perdre.
"C'est toi qui pue" s'indigne Markus, devenu étudiant (au collège universitaire de Newark) en droit et préparation militaire, alors que son "coturne" Flusser "l'emmerdeur" lui fait mille misères qui l'empêchent d'étudier et lui reproche d'être un être humain "qui pue".
"Va te faire foutre" lance le puceau Marc (déstabilisé par la conduite d'Olivia Hutton "qui l'a sucé" avec dextérité) au mutique Elwyn, son deuxième "coturne" après changement de chambre, alors que ce dernier, pour une fois en verve, traîte son "héroïne" de "pouffe".
"Allez vous faire foutre" crache Marcus, étudiant modèle convoqué par le doyen et poussé dans ses retranchements par un discours sur son intolérance, son caractère asocial,son inanaptation,sa non appartenance à des fraternités,son non respect de sa judaïté...bref son intimité.
"Allez vous faire foutre" explose-t-il à nouveau, "incapable de fermer sa grande gueule", re-convoqué par le doyen qui fouille plus profondément sa relation avec Olivia repartie chez elle pour dépression nerveuse.
Alors c'est lui Markie,Markus,Marc,Marcus, le major, pris d' IN-DI-GNA-TION, qui, soldat en Corée, enrôlé dans le "bon vieux défi américain" ira se faire foutre par la mort en 1952.
Indignation, fort et émouvant, est (je trouve) l'un des meilleurs ouvrages de Philip Roth (dont j'ai chroniqué dernièrement La bête qui meurt et le rabaissement) car il s'indigne contre l'intolérance et l'intrusion. Il ouvre le débat sur l'individualisme par rapport au groupe qui noie ou peut détruire (comme dans le cas d'Olivia dite "la reine de la fellation 1951"), le respect d'autrui, l'autorité toute puissante. Il aborde le cocon familial trop possessif et la vie communautaire sur un campus, ses dérives, ses fantasmes, ses violences inhérentes et les angoisses engendrées.
Il dénonce enfin l'absurdité de la guerre (ici de Corée) et les massacres d'innocents.
Un excellent livre, avec toujours ce petit grivois et pimenté qui signe la pâte de Philip Roth!
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Un de mes préférés avec la tâche et le sublime ' Pastorale américaine' , P. Roth nous décrit de façon minutieuse la vie d'un jeune homme dans les années 60 , les bons côtés et aussi le politiquement correct qu'il faut absolument suivre pour survivre à cette époque , l'hypocrisie des sixties est ici décortiquée.
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Roman sur l'Amérique du début des années 50, sur fond de guerre de Corée. C'est le premier ouvrage que je lis de cet auteur, et je découvre une écriture et un style qui me plaisent beaucoup.
Il faut voir la façon magistrale dont il amène la condition dans laquelle se trouve le héros à la fin du roman!!

Marcus est un garçon bien sous tout rapport, très sérieux, travailleur. Après des années de bonne entente avec son père, celui-ci devient paranoïaque en ce qui concerne la sécurité de son fils, la confiance le quitte. Pour retrouver sa sérénité, il part étudier à 800 km de chez lui. Rien ne le perturbe, il a un objectif bien précis. Si la guerre de Corée doit se poursuivre, son option d'enseignant militaire sur plusieurs semestres devrait lui permettre d'échapper à la mobilisation comme soldat de première classe. Il serait alors affecté comme sous-officier...
Travailleur, sérieux, ...jusqu'à ce que ce bel engrenage s'enraye, une rencontre, puis une autre, et le destin bascule.

Un indice, cependant, page 65, qui ne laisse pas de surprendre le lecteur, avant que le récit ne reprenne à la première personne. Je comprenais que ce passage devait m'aider à comprendre quelque chose, sans encore saisir réellement.
Il faut attendre les dernières pages du roman pour comprendre la situation du narrateur. Tout s'éclaire alors. Il s'agit d'une remémoration dans un contexte particulier.
Magistralement amené.
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"Indignation" est un roman où se mêlent le tragique et la mort. Très vite, le lecteur comprend que Marcus Messner, âgé de 19 ans en cette année 1951, est une voix d'outre-tombe. le héros et narrateur meurt à la guerre en Corée un an plus tard. La vie de Marcus est peut-être brève,mais elle condense tout ce qui fait une vie d'homme :
le sang, le sperme et la poussière.
Le sang : celui de son père, boucher kasher de Newark dont l'amour pour son fils unique vire à la parano. C'est pour lui échapper que Marcus s'exile dans une université du Middle West.
le sperme : celui qui coule dans la gorge d'Olivia, jeune fille au poignet tailladé. Une pipe culpabilisante, symbole de la frustration sexuelle de l'Amérique de ces années-là. Quant à la poussière, c'est l'issue qui attend Marcus à la guerre, pour avoir été incapable d'«encaisser les heures d'office et de fermer sa grande gueule » sur le campus…
En moins de deux cent pages, Roth fait du destin de Marcus une plongée terrifiante dans la psyché de son pays. Brillant.
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Jeune homme de dix-neuf ans, fils d'un boucher kasher du New Jersey, Marcus concrétise les rêves de sa famille en devenant le premier à poursuivre des études supérieures, échappant pour un temps au service militaire en Corée. Il se montre particulièrement sérieux et assidu, et donne le temps que lui laissent ses études à aider à la boucherie paternelle. Toutefois, malgré ce fils idéal, le père devient de plus en plus étouffant, souffrant de peurs irrationnelles le concernant, imaginant toujours les pires choses qui pourraient lui arriver, ne le laissant pas vivre. Petit à petit, le jeune homme se laisse gagner par ces craintes, mais finit par les fuir en se trouvant une autre université dans un coin perdu de l'Ohio. Il n'imagine pas à quel point les deux établissements peuvent différer l'un de l'autre et l'adaptation au College de Winesburg va s'avérer délicate, pour ne pas dire difficile.
Voici donc que Philip Roth, après avoir évoqué l'âge mûr, dans La tache par exemple, ou la vieillesse dans Exit le fantôme, revient aux années 50, au roman d'apprentissage, quelle excellente idée ! On croit tout savoir des facs américaines, de leurs rites et de leurs faiblesses, et pourtant on découvre encore. Marcus aussi qui s'étonne d'être obligé d'assister chaque semaine à un office religieux, certes multiconfessionnel, ou de se voir presque contraint d'intégrer une fraternité. Il explore aussi le monde, quasiment neuf pour lui, de la sexualité, en la personne un peu trouble d'Olivia Hutton. Rien de bien extraordinaire à tout cela, à part un tournant au bout d'une cinquantaine de pages qui change la vision que l'on a de la vie de Marcus, et que je trouverais dommage de vous révéler… Il continue pourtant de raconter, avec un mélange de maturité et de candeur, sa jeunesse, et ses démêlés avec le doyen de son université, qui s'ingère de façon choquante dans la sphère privée des étudiants. Comment une indignation en apparence anodine a pu changer entièrement le cours des choses, c'est ce que Philip Roth montre d'une manière magistrale. J'ai trouvé ce roman, qui contient tout ce que j'aime chez les romanciers américains, très bien écrit, et l'ai dévoré d'une traite !
Lien : http://lettresexpres.wordpre..
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