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3,84

sur 1320 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
"Il est à présent garanti que notre grand pays n'entrera pas dans le conflit d'Europe".

On est en 1940 et Charles Lindbergh devient président républicain des Etats Unis d'Amérique.
Par cette position négociée de neutralité, refusant d'engager le pays dans le conflit, la "démocratie" américaine rentre de facto dans la triple alliance de l'Axe, aux cotés de l'Allemagne et du Japon.

Vous ne rêvez pas...
Philip Roth nous entraine dans un twist historique où la planète se retrouve la tête à l'envers. le fascisme assumé et l'isolationnisme de cette nouvelle présidence conduisent la sarabande de nouveaux comportements humains les plus incongrus dans le pays des libertés individuelles. Et quid de la position gouvernementale envers les juifs? le pire est-il à craindre?
L'Histoire se refait, en miroir...

A travers le quotidien d'une famille juive typiquement américaine, le mécanisme des dérives sectaires est décortiqué avec brio, humour et ironie. La nature humaine s'avère particulièrement créative pour réinventer toutes formes d'antisémitisme, de ségrégation ou d'assimilation. Et la vieille peur ancestrale retrouve dans ce terreau toutes les raisons de ressurgir.

A l'image du pays, la famille va se fragmenter en camps opposés sous l'oeil apeuré du plus jeune, qui va faire, par des interprétations anxieuses de l'attitude des adultes, un apprentissage accéléré de la vie de "bon américain".

Une livre jubilatoire, une uchronie développée au plus prêt du réel, portée par l'écriture généreuse de son auteur.
Démonstration magistrale!
Philip Roth est vraiment un grand Monsieur des lettres américaines.

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Waouh. Quel roman .Une nouvelle fois, Roth nous livre une brillante uchronie à vous glacer les sangs. Partant de la défaite de Roosevelt lors des présidentielles en faveur de Lindberg (antisémite notoire et près à faire allégeance au fuhrer), l'auteur continue de sonder l'Amérique et ces contradictions, et force est de constater que la fiction est assez flippante. L'idée géniale du roman, vient dans le choix de Roth d'imaginer ce qu'aurait pu être la face du monde si cette hypothèse était arrivée, de la regarder à travers le regard d'un enfant juif, le narrateur ( Roth lui-même) dans sa famille, dans sa communauté et plus largement dans cette Amérique si fière de brandir l'étendard de la liberté chez les autres et d'être ultra protectionniste envers elle.
L'auteur de Newark mèle habilement faits historiques avérés et fiction pour donner un regard à la fois passionnant, foisonnant et terrifiant. Rien à dire, Roth fait partie des très grands.
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«Mais personne peut battre Roosevelt, dis-je.
-Lindbergh va le battre. L'Amérique sera fasciste.» (p. 46)
Évidemment, dans la vraie vie, ça ne s'est pas produit. Ça ressemble plus à un scénario de film catastrophe. Mais Philip Roth s'est pris à imaginer le pire : et si c'était arrivé ? Et si Lindbergh avait réussi à gravir les échelons de la convention républicaine et à voler son troisième mandat présidentiel à Roosevelt ? Ce n'est pas si fou. En 1940, Charles Lindbergh est un pionnier de l'aviation, une étoile montante, une vedette. Partout, les foules se dépalcent pour le voir, l'écouter. Et il a beaucoup à dire. Leader du mouvement America First, il est un ardent défenseur de l'isolationnisme, du maintient des Etats-Unis hors de la guerre. Pire, il est germanophile (comme beaucoup d'Américains aux origines allemandes et scandinaves), sympathique au régime nazi. L'avenir de ce grand pays, de ses citoyens juifs et du monde entier aurait été tout autre. C'est le complot contre l'Amérique.

Avec un tel individu comme président, comment l'histoire aurait-elle été modifiée ? Lindbergh signerait plutôt un pacte de non-agression avec Hitler. On oublie la participation directe des Etats-Unis dans la Seconde guerre mondiale, mais on oublie également l'aide matérielle et financière au Royaume-Uni pour soutenir son effort de guerre. Ainsi, l'issue du conflit aurait été très différente sur le Vieux Continent.

Toutefois, l'attention de Philip Roth porte surtout sur le sort des Juifs américains. En quoi aurait-il été changé ? Évidemment, les Etats-Unis ne sont pas l'Allemagne. Ce dernier pays remplissait certaines conditions qui l'ont transformé en ferreau fertile à l'essor du nazisme. L'auteur n'imaginait pas des ghettos, des chambres à gaz ni la Shoah en Nouvelle-Angleterre. du moins, pas dans les premières années. Plutôt, l'antisémitisme galopant aux Etats-Unis aurait pris une tournure différente… Plus subtile. Plus terrifiante.

Vraisemblablement, tout aurait commencé graduellement. On aurait sollicité, forcé des leaders juifs à se montrer conciliants, coopérants. On aurait envoyé les enfants juifs dans des camps de «vacances» où ils auraient été pris en charge par des bons chrétiens qui leur auraient appris les «bonnes valeurs». On aurait imposé des «promotions» à leurs parents dans des endroits reculés du pays, loin des leurs, où il leur aurait été difficile de continuer à pratiquer leur religion. Petit à petit, leurs droits auraient été restraints, pour leur propre intérêt. Pourquoi s'opposeraient-ils à toute mesure visant leur meilleure intégration dans la société américaine ? Ce serait très peu patriotique de leur part. Bref, ce qui aurait été envisagé, c'est l'assimilation, purement et simplement. Et en dernier recours seulement, les violences et la solution finale.

Tout le génie de Philip Roth et de Complot contre l'Amérique, c'est d'entremêler de façon habile les faits histoires à son intrigue. Les propos fascistes de Lindbergh, ceux antisémistes de Henry Ford, les propos incendiaires de Walter Winchell, etc. À la fin, un post-scriptum d'une quarantaine de pages de références et de biographies ayant servi à rédiger son livre. Ça ajoute à la crédibilité de l'oeuvre qui constitue un véritable coup de poing lancé à la gueule des Etats-Unis. On entend souvent les leaders et les élites américaines ressasser leurs sacro-saints droits fondamentaux, en arbitre du monde libre. Pourtant, on sait qu'ils sont les premiers à renier ces droits et libertés quand cela leur convient. Et c'est bien de leur rappeler qu'ils ne sont pas parfaits et que leur pays aurait pu facilement basculer du côté fasciste. Personne n'est à l'abri du populisme et de ses conséquences.

Un seul aspect m'a moins emballé, et c'est la fin. Toute cette histoire d'enlèvement de l'enfant des Lindbergh (qui s'est réellement produit) a été recyclée pour faire partie d'un complot aux envergures effrayantes. Il s'agit d'une théorie qui existe réellement bien que peu y accordent foi. Certains lecteurs l'apprécieront ; moi, j'ai trouvé que c'était inutilement complexe, que cela provoquait trop de rebondissements qui nous éloignaient de l'essentiel. À vous de voir.
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J'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir le grand Philip Roth grâce à ce roman à la fois uchronique, politique et familial, tout à la fois sérieux et très solidement documenté, et en même temps irrésistiblement sarcastique et auto-dérisoire !
Le jeune Philip Roth de 8 ans nous raconte la vie imaginée de sa famille à Newark, New Jersey au début des années 1940, si le Président Roosevelt avait été battu aux élections par Charles Lindbergh, l'aviateur, isolationniste affirmé et antisémite notoire. Ce courant, porté par le mouvement America First, était assez fort aux É-U au début de la Seconde Guerre Mondiale et Philip Roth «s'amuse» à imaginer comment les événements auraient pu se dérouler s'il avait été porté au pouvoir.
Les chapitres alternent entre la scène politique américaine et mondiale, et ses impacts sur la famille Roth. C'est de loin cet aspect que j'ai préféré, alors que Philip raconte avec un humour noir déstabilisant des faits dramatiques comme le cousin Alvin qui part faire la guerre et en revient amputé d'une jambe (tout un chapitre intitulé «Le Moignon»), son frère aîné qui se fait endoctriner par le mouvement «Des Gens parmi d'autres» qui vise à «déghettoiser» les juifs américains, sa tante qui marie un influent rabbin Juif qui se rallie aux politiques de Lindbergh, et son jeune voisin Seldon et sa mère qui sont envoyés (déportés?) au Kentucky avec des conséquences tragiques, tandis que la violence monte au pays à l'encontre des Juifs... Si comme moi vous n'avez pas une connaissance approfondie des figures politiques américaines de cette époque, vous voudrez peut-être lire d'entrée de jeu le post-scriptum qui relate la vraie biographie des personnages du roman qui ont vraiment existé.
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Une vraie prouesse que ce roman du grand Philip Roth, qui prend comme postulat l'accession au pouvoir de Lindberg, pro-Hitler en 1940... Et si... Et si les Etats-Unis avaient pratiqué la discrimination antisémite ? Et s'ils n'étaient jamais entrés en guerre ? Voilà dans ce contexte le quotidien de la famille juive du petit Philip, en butte à la violence politique.
Un roman assez épatant, passionnant, très bien écrit, auquel je ne reprocherais que la fin, quand on lâche le jeune narrateur pour arriver à une narration journalistique des événements, la rupture de ton m'a gênée.
A part ça, un bon moment de lecture, pas très facile d'accès mais très stimulante !
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Dans cette quasi-uchronie sur le fil du rasoir car ce n'en est pas tout à fait une, Philip Roth propose une réalité inacceptable : celle qu'une famille juive, et par extension tous les Juifs immigrés en Amérique se seraient sentis au début des années 40, au gré d'un balancement politique qui leur serait devenu défavorable, en insécurité sur le sol américain.

A tort ou à raison, c'est à la lumière de plusieurs incursions romanesques dans des livres abordant la civilisation juive du 20ème siècle (*) que je ressens et interprète a posteriori la portée de ce « Complot contre l'Amérique » lu il y a deux ans.

La proposition faite par Philip Roth, qui me parait avec le recul incroyablement osée, semble mettre en abîme, de façon d'autant plus saisissante que la narration est, comme à l'habitude chez Roth toute en nuances, finesse et intelligence et ce d'autant plus qu'elle est intériorisée à travers les yeux d'une famille à laquelle chacun peut s'identifier, une problématique choquante : celle que les valeurs de liberté et de justice prônées par les Etats-Unis sont nécessairement limitées, notamment par un certain échec du melting pot évoqué à travers le malaise de cette famille juive qui ressent par petites touches délétères la remise en cause de la légitimité de sa citoyenneté américaine.

Un roman subtil et troublant dans lequel Roth développe, sous un nouvel angle de vue par rapport à ceux que j'avais pu découvrir dans la trilogie Pastorale/communiste/ Tâche, un regard amour-haine complexe sur la société américaine.

(*) celle d'avant et pendant la guerre (« Maus » d'Art Spielgermann), celle qui a pu ou du émigrer pour la fuir (« les hérétiques » de L.Padura par exemple, bien que ce soit un mauvais exemple), et avant elles celles qui n'ont cessé de chercher asile (« le problème Spinoza » d'Irvin Yalom), celle qui n'a pas pu (« les Disparus » de Daniel Mendelsohn, « Tout est illuminé » de J.Safran Foer), mais aussi celle qui a réalisé son immigration aux Etats-Unis (« Mémoires d'un bon à rien » de Gary Shteyngart)
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Imaginez que Lindbergh antisemite notoire batte Roosevelt aux élections, les USA ne s'engagent pas dans la deuxième guerre mondiale ; ça c'est pour le tableau général, la focale est posée sur la vie d'une famille juive américaine de Newark c'est un tres beau roman sur la famille, les idéaux, les vindictes populaires et évidemment c'est très très bien écrit
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Et si, en 1940, l'Amérique avait élu un président favorable à Hitler ? C'est (presque) le point de départ de ce roman de Philip Roth. L'auteur imagine que le célèbre aviateur Charles Lindberg, dont la popularité a été renforcée par l'émotion mondiale suscitée par l'enlèvement et l'assassinat de son petit garçon, remporte les élections présidentielles contre le démocrate Roosevelt (alors qu'en réalité Roosevelt l'a emporté haut la main pour un 3ème mandat devant son adversaire républicain et que les Etats-Unis sont entrés en guerre contre les puissances de l'Axe après l'attaque de Pearl Harbour).

Les amateurs de dystopie seront peut-être déçus par ce roman car il ne s'y passe rien de très spectaculaire. On n'assiste pas à un retournement de la marche de l'Histoire et Roth s'arrangera pour que deux années après la supposée victoire de Lindberg, la grande Histoire reprenne le cours qu'on a connu. Mais ces deux années permettent à l'auteur d'imaginer une fascisation progressive de l'Amérique, décrite non pas tellement au niveau des institutions ou du gouvernement mais au niveau de la vie quotidienne d'une famille juive de Newark, une banlieue de New-York, décrite par le plus jeune des deux fils de cette famille.

Le lecteur se trouve donc plongé au coeur de ce quartier juif autour duquel l'étau de la propagande fasciste, raciste et spécialement anti-juive va se resserrer petit à petit. Et on se sent étouffer et se débattre comme le font les parents du jeune narrateur jusqu'à ce que l'air devienne irrespirable.

J'ai bien aimé ce roman et la vision "au ras du bitume" qu'il nous propose et qui, ici, fait frémir. Toutefois je lui ai trouvé quelques longueurs, des successions de détails qui m'ont paru superflues mais j'imagine que ces détails parlent davantage à un public américain de la génération de Roth. J'avoue m'être moins attaché à ce récit qu'à celui de "La tache" que j'avais lu l'an dernier.
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Que se serait-il passé si Charles Lindbergh, le célèbre aviateur, avait battu Franklin D. Roosevelt aux élections de 1940 ?
C'est à partir de cette hypothèse que, à partir du point de vue d'une famille juive de Newark, l'auteur déroule ce dramatique scénario.
C'est à travers les yeux du petit Philip, cadet de la famille Roth, que l'on assiste à la montée en puissance d'America First, le parti de Lindbergh, proche de la dictature nazie. L'isolationnisme domine, l'antisémitisme s'exprime dans tout ce qu'il a de plus abject et les événements s'enchaînent puis se précipitent pour nous livrer une explication à ce macabre emballement.
C'est un récit très juste, très réaliste et très bien dosé que nous offre ce remarquable auteur.
Le ton est différent de celui habituellement utilisé dans les dystopies. Ces dernières nous transposent généralement dans un futur inquiétant alors qu'ici, nous revenons à l'aube de la seconde guerre mondiale dans une famille américaine ordinaire en butte aux péripéties ordinaires de l'époque qui se trouve soudainement projetée dans un chaos implacable.
Malgré quelques longueurs initiales, l'intrigue accroche le lecteur et l'emmène jusqu'au dénouement.
La lecture des appendices qui nous rappellent comment s'est déroulée la véritable Histoire nous éclaire sur les motivations qui ont pu pousser l'auteur à imaginer ce tableau bien sombre.
Un récit parfois dur, mais particulièrement instructif. A mettre entre toutes les mains.
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Très belle surprise que cette lecture !

Je lis peu de livres américain mais le nom de Philip Roth a une renommée telle que je ne pouvait m'empêcher de passer à côté ! Alors ce n'est peut-être pas le meilleur mais j'ai beaucoup apprécié son écriture, son travail autour des personnages, de l'Histoire.

Je lis encore moins d'uchronie ... et là encore j'ai apprécié ce genre surement parce qu'il reste très concret et réaliste .. malheureusement... Cela m'a fait penser à ma lecture précédente de la part de l'autre où l'objectif était inversé, imaginer un Hitler qui aurait été accepté au conservatoire des Beaux-Arts.

Là, l'histoire est inverse, imaginer Roosevelt non réélu en pleine seconde guerre et y mettre à sa place Lingberg, personnage savamment odieux, mélange de Trump et Hitler, je vous laisse imaginer lorsqu'un tel énergumène arrive au pouvoir de la 1ère force mondiale (j'ai un doute ? l'était-elle déjà à cette période ?...).

Le travail historique de l'auteur est colossal et nous plongeons dans les années 40 de cette Amérique basculant vers l'antisémitisme, le fascisme, ... à travers les yeux d'un enfant. Comme lui, on ne croit pas possible qu'un tel personnage puisse être élu, puis on doit le subir en pensant qu'il ne pourra pas prendre des décisions qui mettent à mal les fameux amendements de la constitution (ce qui m'a permis de découvrir tous ces amendements en parallèle).

On ressent cette adoration qu'à le jeune protagoniste pour son pays, pour cet aviateur extraordinaire au départ, puis cette peur, cette incompréhension, cet étouffement.

Roth envoie un sacré message à ce contemporains. Espérons qu'ils lisent ce livre ...
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