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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Après « le déclin de l'empire Whiting », je poursuis ma découverte des romans de Richard Russo. Et autant le déclarer de suite, « Quatre saisons à Mohawk » confirme que je ne vais pas m'arrêter de sitôt.
Dire que ce roman est une plongée dans l'Amérique profonde fait un brin cliché. Mais, c'est pourtant un peu le cas et ce n'est en rien un jugement négatif. « Quatre saisons à Mohawk » raconte la relation entre un fils et un père, et ce, par les yeux de Ned, le fils.
De retour de la seconde guerre mondiale, le père Sam Hall est un homme différent, en proie aux démons de l'alcool et du jeu. Les parents finissent par se séparer, le père par quitter le domicile familial. La mère, fragile psychologiquement, en perdant ensuite son boulot, finit, elle, peu à peu, par sombrer dans la dépression, se bourrant de cachets. le père récupère alors l'enfant.
Et Ned va mettre le pied dans un autre monde, bien différent de ce qu'il avait vécu auparavant avec sa mère. Pas de règles. Les repas ne se passent plus dans le foyer mais dans des bars alentour où le père est un habitué apprécié ou parfois encore chez Eileen, la nouvelle petite amie de Sam. Pas d'obligation de se laver, de porter des habits propres, de faire ses devoirs, d'aller se coucher à l'heure. Des soirées souvent seul dans l'appartement quasi vide, le paternel étant avec ses potes à faire la tournée des bars. La vie de Sam Hall tourne autour de l'alcool, de cuites, de jeux et de paris en tout genre (poker, billard, etc.) et, de temps en temps, de nuits au poste de police. L'argent va et vient selon les saisons. le père est généreux avec ses amis, ne s'encombre pas de comptabilité ou de remboursement de dettes (qu'il doit ou qu'on lui doit).
Le monde de Sam est sans contrainte, libre et fier aussi. Pas le genre de père responsable ni modèle qu'il faudrait à l'éducation d'un petit garçon. Mais le choix de vie du père est peut-être aussi comme une sorte de bouffée d'air, une façon d'apprécier le quotidien, sans trop de prises de tête parce que la vie est assez compliquée comme ça pour s'imposer trop de règles strictes.
Le « P'tit Sam » est d'abord déstabilisé et intimidé par ce père taiseux, fort en gueule, avec un humour un peu pète-sec ou sarcastique, qui ne semble pas trop s'inquiéter du fils, qui l'emmène dans ses virées avec ses potes piliers de bar, sans vraiment trop s'occuper de lui. Assez rapidement, Ned s'habitue à ce nouvel environnement, faits de cette solitude, de son indépendance, des expériences qu'il fait par lui-même, de ces silences aussi peut-être moins mensongers que les paroles de sa mère, qui tente, elle, de se raconter des histoires ou que cela ne va pas si mal.
Les saisons passent, le fils grandit, apprend, se forge un caractère. Ned n'est pas toujours tendre quand il parle de ses parents, de ces deux mondes bien distincts. C'est cela aussi une famille.
Mais, au fil des mois et des années, sans que les choses soient vraiment dites, sans qu'il n'y ait jamais de vrais gestes tendres mais, à l'inverse, plutôt maladroits, on sent la relation se nouer entre eux. En filigrane, ils s'attachent l'un à l'autre, comme nous, on s'attache à ces deux-là. On reconnaît par de petites touches ce lien qui se fortifie, qui se bonifie. On reconnaît leur besoin l'un de l'autre. Une relation forte, protectrice, vraie. Un amour entre un père et un fils évident. Il suffit de gratter un tout petit peu la surface, de savoir lire les silences ou les plaisanteries faites entre eux, pour le voir apparaître, cet amour éclatant, vibrant.
Russo est de ces auteurs que j'apprécie particulièrement, comme les David Lodge, Paul Auster ou encore Russel Banks. Ces écrivains qui savent raconter des histoires, montrer la vie telle qu'elle est, peindre des portraits d'hommes et de femmes simples, du quotidien, avec parfois ces revers de fortunes, avec toutes ces failles et ces faiblesses, ces relations pas toujours évidentes, un peu brinquebalantes, quelque fois violentes. Mais, ce sont aussi des vies emplies de tout un tas de belles choses : une large dose d'humour (des anecdotes truculentes, dont je me suis régalée avec notamment Wussy, le pote de Sam), des moments de tendresse et de sensibilité, des moments émouvants partagés ensemble qu'on n'oublie pas… Et avec tout cet amour qui fait du bien, qui nous amène la petite larme à l'oeil ou le sourire jusqu'aux oreilles.
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Quatre saisons à Mohawk est le second roman de Richard Russo. Paru en 1985 il est bien antérieur au très mérité prix Pulitzer qui lui sera décerné en 2002. La traduction française du présent The Risk Pool a été publiée dans la foulée de l'obtention du prix.
Je n'en suis pas autrement étonnée.
Comment la chronique d'une ville banale de l'état de New York au cours des années 50 et 60 aurait-elle pu attirer un lecteur étranger ?
On est bien loin du temps où les tanneries faisaient la renommée de la ville et garantissaient le plein emploi. En proie au déclin inexorable les populations se sont tournées vers des emplois précaires. Mohawk est en totale déshérence. Il ne s'y passe rien d'extraordinaire et on se demande un temps quand l'histoire va-t-elle vraiment commencer.
Dans cet univers délétère Ned grandit avec une mère exigeante et dépressive puis avec un père, Sam, ...comment dire...insaisissable, pour rester fidèle au personnage qui n'aurait pas aimé les étiquettes. Après son retour du Débarquement de Normandie plus possible pour lui de renouer avec une vie tranquille.
C'est en partie un roman d'apprentissage. Ned revient sur son passé. Silencieux et gauche, véritable caisse d'enregistrement et d'observation il est doté d'une capacité de résilience et de débrouillardise remarquable.
Roman d'ambiance surtout, assez inclassable. On traîne de grill en taverne, on parie sur les courses de chevaux ou aux jeux de cartes, on s'éternise en interminables palabres de poivrots ou en joutes verbales trop arrosées. L'essentiel est là, dans ces moments de rencontre de gens de presque rien, des arsouilles pour la plupart qui tuent le temps.
Les hommes trouvent leur place, même bancale, dans cet entre soi rassurant.
Les femmes sont serveuses de bar ou mères au foyer, déprimées, rongées par l'échec de leur mariage avec des maris partis ou violents.
Empli d'empathie et de rejet pour ce Mohawk et pour ce père qui semble en être la parfaite incarnation, Ned va faire revivre ce petit peuple et lui donner sa dignité et son humanité. Il va éviter le règlement de comptes avec son passé, privilégiant à l'inverse les silences et les ambiguïtés.
Un passé foutraque, une famille cabossée, un roman sincèrement émouvant. Tout sonne juste, jamais simple.
Richard Russo abordait déjà la question récurrente qui hante son oeuvre : comment faire pour survivre et passer à autre chose quand ce monde s'acharne à broyer ce qui a du sens et fait lien.


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Années 1960. Mohawk est une petite ville comme il en existe tant dans l'Etat de New York et sert de cadre à l'histoire de Ned, dit P'tit Sam, le narrateur.
Les parents de Ned sont séparés. Son père Sam, après avoir fait la guerre dans le Pacifique, est rentré au bercail avec l'intention de profiter de la vie, ce qui se résume à boire des coups avec les copains, courir les filles, jouer aux courses et pêcher. Il se souvient, épisodiquement, qu'il a un fils et lorsque cela lui arrive, il « kidnappe » son garçon de six ans pendant 24 heures. Avant de le ramener et lui faire un petit coucou de temps à autre… A dix ans, la mère de Ned fait une dépression nerveuse et c'est donc son père qui le prend sous sa coupe. Entre Sam et P'tit Sam, c'est une découverte. le jeune garçon découvre une toute autre vie, partagée entre l'école, les bars où l'entraîne son père et les parties de pêche à la truite. Ned garde également ses rêves d'enfant, notamment celui qui lui fait briller les yeux lorsqu'il regarde la « maison de diamants », la plus belle et grande maison de Mohawk, où vit la belle Tria Ward.

Enfance pittoresque et peu banale que celle de Ned, partagée entre un père peu fréquentable et une mère dépressive. Sam Hall, personnage haut en couleur pétri de nombreux défauts, très certainement impossible à vivre pour sa femme Jenny, n'en est pas moins un père généreux et attachant. Il ne sera pas du genre à réclamer à Ned de se laver les mains avant de passer à table mais il lui apprendra les plaisirs de la pêche et autres amusements divers. Entre deux taloches pour remettre les idées en place… Les dialogues entre le père et le fils ne sentent pas la guimauve et c'est tant mieux. Ils sont avant tout savoureux, drôles et naturels.
Entre fresque sociale et chronique familiale, Richard Russo sait avec talent et sensibilité dépeindre la vie de la middle-class et décrire les joies et revers des paumés de la grande Amérique. La vie quotidienne des habitants de cette petite bourgade ne nous ennuie pas un instant et on entre de plain pied à leur côté. Personnages touchants, humains et réalistes, Ned, son père et les autres nous offrent un très bon moment de lecture.
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J'en suis à ma dixième lecture de Richard Russo et pas de déception jusqu'à présent, même si ce roman-ci m'a un peu pesé à cause de la tristesse qui le domine.

Nous retrouvons un univers familier, celui des laissés-pour-compte d'une petite ville américaine imaginaire, Mohawk dont la prospérité est derrière elle. L'histoire est racontée par Ned, surnommé "Ptit Sam" un gamin balloté entre un père et une mère aussi défaillants l'un que l'autre, chacun à leur manière.

Ils l'aiment leur fils, mais les circonstances de la vie les laissent sur le côté, incapables d'affronter leurs responsabilités comme ils le devraient.

Au retour de la guerre, la mère n'a pas retrouvé l'homme qu'elle avait aimé. Il a changé et s'adonne à l'alcool et au jeu. de fil en aiguille elle demande le divorce, que Sam refuse de lui accorder, la harcelant et la menaçant, allant jusqu'à casser la figure à son avocat.

Ned et sa mère vivent dans l'angoisse du surgissement du père à tout moment pendant des années. Rien n'est vraiment expliqué à Ned, qui se fait une idée de ce qui se passe dans un certain brouillard. Il voit sa mère dépérir de mois en mois. Jusqu'au moment où elle sombrera dans une profonde dépression et sera hospitalisée pour longtemps.

Par la force des choses, Ned est récupéré par son père. Sa vie va changer du tout au tout. Plus de règles, un appartement précaire, la solitude des soirées, en sachant Sam dans un des bars de la ville, en compagnie de copains plus folkloriques et infréquentables les uns que les autres.

Les saisons passent, Ned se débrouille comme il peut avec ce père atypique, qui peut disparaître du jour au lendemain sans donner de nouvelles. le gamin grandit, se forge une carapace, fait pas mal de bêtises.

J'ai tracé seulement les grandes lignes du roman, qui est foisonnant, plein de personnages hauts en couleurs, truffés d'évènements tragi-comiques relatés par le menu et c'est là que l'auteur nous piège et nous fait tourner les pages avec gourmandise. J'ai évoqué la tristesse, mais il y aussi un humour vache permanent qui fait mouche et allège le reste.

Le coeur du roman est la relation difficile père-fils. Ned ne mâche pas ses mots vis-à-vis de son père, mais on sent au fil du temps la tendresse mutuelle, même s'ils ne peuvent le reconnaître ni l'un ni l'autre.
Lien : http://legoutdeslivres.haute..
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Le 4 Juillet, La fête foraine, Mange-ta-dinde, l'Hiver : voila les "4 saisons de Mohawk" définies par le grand père de Ned Hall pour résumer la vie à Mohawk...

Sam Hall, marié à Jerry Hall, revient de la 2nde guerre mondiale avec la ferme résolution de vivre la vie sans aucune entrave ni contrainte...
Débarqué en Normandie, il arrivera vivant et intact à Berlin. Il reviendra en Amérique, dans l'Etat de New-York, retrouvé sa Jerry, les bars, et les nuits sans fin...

Jerry Hall, en 1947, donne naissance à Ned...Mais la paternité n'apporte aucun équilibre dans la vie de Sam et Jerry décide de rompre la vie commune et éduquera, seule, son fils...

Ned Hall est le narrateur.
Il est élevé par une mère aimante mais angoissée... Sa mère est harcelée quotidiennement par un Sam Hall saoul comme une bourrique mais elle fait toujours appel à la police ce qui donne lieu à un feuilleton quotidien qui amuse les voisins et le jeune Ned...

Et puis un jour, Ned croise son père qui l'emmène pêcher avec son ami Wussy... Ils passeront la nuit dans les bois, au grand air, piqués par les moustiques et ayant des réactions allergiques à certaines plantes... L'état dans lequel rentrera Ned, vaudra quelques balles dans la carrosserie de la Chevrolet jaune de Sam par une Jerry furieuse...
Ned, Sam et Wussy en garderont un souvenir impérissable. La Chevrolet aussi.

Un chagrin d''amour entraînera Jerry Hall dans une profonde dépression...
Ned se voit donc placer sous la responsabilité (et c'est un grand mot) de son père.... Et il connaît alors la tournée des bars de Mohawk, ses piliers, ses barmans, les amis de son père, le billard, un bookmaker, les paris, les bagarres..
Dans ce marécage il rencontrera Eillen l'amie de son père, et son fils ado, Drew, qui entretient une relation permanente conflictuelle avec Sam Hall ; M. Ward, grosse fortune de Mohawk, ancien combattant comme son père, qui alla de Normandie à Berlin mais qui n'a pas connu le même retour, puis qu'il a épousé la fille fortunée du coin.. et Tria Ward, beauté sans égale...

Le livre est composé de 4 parties qui correspondent aux 4 saisons de Mohawk définis par le Grand Père.
Elle correspondent chacune à une partie de la vie de Ned...
De son enfance à son entrée dans la vie d'adulte...

C'est un beau livre car c'est une belle histoire.
L'écriture de Russo est fluide, et il nous entraîne avec compassion à suivre le cours des saisons à Mohawk et on comprends pourquoi le Grand Père de Ned parlait de 'l'Hiver' avec un "H" majuscule....

Vous recevrez, à ce moment là, comme une petite tape derrière la tête, semblable à ce que Sam Hall faisait avec son fils...

"Et ben...? " vous dira alors Sam Hall....

Et ben.....
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Fini ! Premier livre de Russo que je lis. Je suis pas déçu, c'était vraiment vraiment bien. La narration est super, les personnages simplement vivants. J'ai particulièrement adoré les passages avec Drew, qui est aussi insupportable que présent dans la vie de Sam Hall. On s'attend vraiment à la fin, mais c'est pourtant loin d'être une déception; c'est plutôt une impression de "c'est comme ça, il le fallait" qui reste.
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