Alors que je referme tout juste ce livre, une question me titille : est-ce que l'écrivain choisi vraiment son sujet ou est-ce qu'il vient à lui ?Sabolo débute son roman en toute transparence dans un long prologue. Elle était à la recherche d'un sujet. Les pages restaient blanches, les cigarettes s'entassaient dans le cendrier. Elle voulait traiter un sujet loin, très loin de son histoire personnelle. Et c'est tout le contraire qui va se produire.Je l'avoue, je n'avais pas compris le succès de "
Summer" en 2017. Je ne l'avais même pas terminé.Avec "
La vie clandestine" j'ai "reconnecté avec l'autrice" et j'en suis bien contente.Sabolo ne pourra pas nous livrer plus intime. Elle a tout mis dans ces 300 pages. Ca se sent, ça se respire, on sent la lutte, la résignation un peu et tout le courage qu'il lui a fallu."𝘑'𝘦𝘯 𝘢𝘪 𝘧𝘪𝘯𝘪 𝘢𝘷𝘦𝘤 𝘭𝘦 𝘤𝘢𝘤𝘩𝘦́ 𝘦𝘵 𝘢𝘷𝘦𝘤 𝘭𝘦 𝘴𝘪𝘭𝘦𝘯𝘤𝘦. 𝘑𝘦 𝘯𝘦 𝘷𝘦𝘶𝘹 𝘱𝘭𝘶𝘴 𝘦̂𝘵𝘳𝘦 𝘤𝘰𝘶𝘱𝘢𝘣𝘭𝘦 𝘯𝘪 𝘢𝘷𝘰𝘪𝘳 𝘩𝘰𝘯𝘵𝘦".Son sujet, elle le trouve en écoutant un épisode d'Affaires sensibles. Elle va nous parler d'Action Directe. Un groupe terroriste d'ultra-gauche qui a sévi en France entre 1979 et 1987 et qui a revendiqué plus de 80 attentats. A travers le détricotage du mouvement, ses fondateurs, ses activistes, Sabolo va tenter de comprendre sans justifier, de nous informer sur un évènement en particulier : l'assassinat de Georges Besse en 1986, alors PDG de Renault.Ce mouvement, ils visent les symboles de l'Etat et du grand patronnât, les ministères, les ambassades, il a fait trembler la France et Sabolo n'en connaît pas grand chose.C'est un travail phénoménal de recherche que l'autrice nous présente.Plus son enquête avance, plus elle se rend compte qu'elle ne peut pas juste exposer des faits. Elle a besoin de creuser et petit à petit, les deux histoires se mêlent. Comme elle l'annonce, c'est un témoin défectueux. Elle ne peut s'empêcher de ressentir et d'y placer de l'affect. Ces personnes qui ont tués, ne sont pas inhumaines. Elles ont brisé des familles, causé des pertes inestimables, mais ne sont-elles pas aussi des êtres chargés d'émotions qui ont en elles des failles, des blessures, comme tout le monde ?On découvre que notre autrice aussi a en partie vécu
la vie clandestine. Elle mettra des années à panser les blessures et à cesser de ruminer les questionnements de son enfance. Ce livre c'est aussi une forme de deuil, de thérapie et de lâcher prise. Sabolo a l'écriture timide. Autant pour parler d'elle que pour retranscrire. Même dans ses recherches, elle n'ose pas. Et on ne peut ressortir de cette lecture sans un certain attachement pour l'autrice. J'ai plusieurs fois été perdue dans les parties liées à Action Directe car je m'y interressait moins qu'à l'histoire personnelle de Sabolo. le sujet peut déranger mais l'écriture est de toute beauté. On entre dans de l'émotion pure, dans des coupures vives que l'autrice mettra toute une vie à panser.