..Il y avait chez elle, Diane, une intuition toujours en éveil, une sorte de divination qui ne lui avait jamais fait défaut : elle remarquait tout. Le moindre petit détail qui clochait, hop ! Elle l’attrapait au vol. C’était même épuisant, parfois, cette perméabilité et cette sensibilité excessives et permanentes dont on la félicitait sans cesse. Elle aurait bien aimé, elle aussi, Diane, de temps en temps ne rien voir et ne rien entendre. Elle eût bien aimé rester impavide comme une grosse bête ruminante, les yeux écarquillés, à l’instar de tant d’autres.
L’idée de quitter cet homme sans l’avoir connu – au sens biblique – lui paraissait d’une affreuse injustice.
Ces messieurs-dames ont-ils soif ? demanda Arlette (à qui ce prénom de fille légère allait aussi mal que possible avec son visage à la Memling, songea Diane). Car les visages austères étaient toujours des Memling, dans son monde, de même que Botticelli désignait de jolies femmes, Bosch les scènes d’horreur, Breughel les banquets et la neige, Renoir les femmes dodues, Modigliani les maigres et Van Gogh la géniale et malheureuse rencontre d’une oreille, d’un pont et d’une chaise….
Oui... ils feraient une jolie équipe ! Ils seraient invités partout mais ré-invités nulle part...
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C’est pour leurs amies que les femmes ont des amants, ce n’est pas pour elles-mêmes ! C’est parce que l’amour physique est à la mode et supposé nécessaire à l’équilibre du corps ou de l’ego….Que sais-je ? Non, je vous le demande : n’est-ce-pas grâce à Freud que les gigolos existent.
- Où est mon jambon ? Siffla-t-elle sévèrement.
- Mon Dieu ! Vous le vouliez ?... Je croyais que vous l’aviez laissé !... Je suis désolé ! dit l’Attaché d’ambassade, Chevalier de la Légion d’Honneur, abonné à l’Opéra et reçu partout comme le meilleur ami des Sévigné, entre autres.
Ce qu'il y avait de bien à la campagne, c'est qu'on avait le temps de se faire un peu de conversation à soi-même ; c'était assez rigolo et sûrement très bon pour l'esprit. Très sain. A Paris, elle tâcherait de continuer.
Monsieur Loïc... c'est lui qui s'occupe maintenant de la moissonneuse, dit-elle avec un respect comminatoire.
Et Loïc comprit qu'il était, grâce à son engin, parvenu à un statut que le quai d'Orsay ne lui avait jamais procuré.
Pour provoquer le chagrin et les larmes ,il faut des circonstances précises, un décor,des détails que ne demandent pas ,Dieu merci ,le plaisir et le bonheur,lesquels s'accomodent d'un canevas plus flou.
La Chenard et Walker resplendissait sous ce beau soleil de juin 40 et ce d'autant plus qu'elle était entourée d'une nuée d'engins poussiéreux et bruyants qui la prėcėdaient ou la suivaient et,parfois ,la doublaient sur une autre file.Tout ce convoi se traînait sur une nationale devenue trop étroite, ponctuée de quelques arbres maigrichons et grisâtres : une nationale déchiquetée de temps en temps par les rafales forcenėes et orageuses des Stukas et,d'une manière permanente,par celles tout aussi violentes d'un soleil de saison