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EAN : 9782228898171
365 pages
Payot et Rivages (14/01/2004)
4.07/5   35 notes
Résumé :
Voici l'envers du décor, la face cachée de l'Antiquité gréco-romaine : tripots et lupanars, filles à matelots et petits voyous, médiocres arnaqueurs et assassins au petit pied, grands seigneurs débauchés qui titubent au matin après une nuit d'ivresse et que leurs serviteurs - presque des enfants encore - doivent ramener chez eux... Ici, pas de héros, mais un monde parfois stupéfiant où règnent les proxénètes, les courtisanes misérables et les enfants que l'on vend p... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Catherine Salles a écrit de nombreux livres sur l'Antiquité dont, entre autres, "Lire A Rome", que je chercherai sans doute à me procurer un jour ou l'autre. Elle est d'ailleurs Maître de conférences en civilisation latine dans une grande université de la région parisienne. Elle s'est tout particulièrement intéressée à l'Empereur Tibère, qui désigna Caligula comme son successeur. Or, je lis actuellement un roman sur la jeunesse de l'énigmatique Troisième César qui, selon les auteurs, soit était complètement déséquilibré dès le berceau, soit sombra dans la folie sous l'influence du pouvoir et aussi d'assez mauvais gènes qui se réveillèrent chez lui au cours des années . Caligula étant resté célèbre en partie pour ses folies sexuelles en tous genres, j'ai pensé qu'il me fallait me renseigner avant toute chose sur les milieux qui favorisaient à son époque la prostitution et le proxénétisme avant de passer non seulement au roman sur le futur empereur mais encore à une biographie le concernant et qui doit traîner dans une pile (Suétone n'est pas toujours très juste dans sa "Vie des Douze Empereurs"), puis au "Néropolis" de Monteilhet (qui, on me l'a affirmé, se passe en partie sous Caligula) et quelques autres ouvrages ...

La Petite Bibliothèque Payot, chez qui Salles est éditée, est une collection de références - du moins à mon avis. de fait, je n'ai pas été déçue par cet ouvrage soigneusement divisé en deux parties : les bas-fonds de la Grèce antique tout d'abord et surtout d'Athènes, de Corinthe et d'Alexandrie (oui, je sais qu'Alexandrie est en Egypte mais elle fut tout de même fondée par Alexandre le Grand et la célèbre Cléopâtre, septième du nom, était d'origine certainement plus grecque qu'égyptienne ) et ensuite, les bas-fonds de Rome la Grande, l'Unique.

Un point important à se rappeler pour celles et ceux qui voudront lire ce document : la morale en usage ici est antérieure au christianisme. Il serait donc absolument vain et profondément injuste de juger les personnages que Catherine Salles met en scène, du plus humble au plus fastueux, selon notre morale à nous - pour ceux en tous cas qui en conservent encore un minimum.

On ne poussera donc pas les hauts cris en apprenant que les enfants étaient largement utilisés comme objets sexuels, voire élevés pour ce faire (on retrouve le procédé, mais en beaucoup plus raffiné, dans "le monde des Fleurs" japonnais, par exemple). Mais attention ! En Grèce comme à Rome, il fallait qu'ils fussent nés esclaves. Si un enfant né libre ou d'un esclave affranchi était enlevé et contraint à se prostituer, le châtiment encouru était des plus graves pour le ou les ravisseurs.

Il va de soi que je réprouve sévèrement l'idée que de tout jeunes esclaves se retrouvent livrés à des gens que l'on pourrait qualifier de pédophiles si on ne les voyait en parallèle ici accompagnés d'une hétaïre (courtisane grecque dont le nom, littéralement, signifie d'ailleurs "compagne"), là d'un jeune homme adulte, esclave ou libre. Salles souligne d'ailleurs l'incroyable misogynie des Grecs qui enfermaient les épouses, filles et soeurs dans le gynécée mais estimaient beaucoup plus normal, pour ne pas dire indispensable, l'amour entre un homme d'un âge pour le moins certain et un autre, nettement plus jeune. A force de nous tétaniser d'admiration devant certains écrits des philosophes grecs, nous oublions volontiers que les fameux "banquets" réunissaient certes les prostitués des deux sexes et de tous les âges mais que, à l'issue du repas, les femmes se retiraient le plus souvent, laissant la salle aux seuls êtres mâles.

A Rome, la préférence pour les hommes n'était pas si marquée. Elle existait, certes, mais les Romains semblent s'être montrés à la fois plus classiques et encore plus fous, lorsqu'ils s'y mettaient, dans leurs goûts sexuels. de cette partie du livre, on gardera longtemps l'image du "leno" et de la "lena" - le maquereau et la maquerelle - qui, comme on s'en doute, étaient hautement méprisés par ceux-là mêmes qui recouraient à leurs services. Les gladiateurs, on l'apprend aussi (ou on se le rappelle si l'on a vu "Quo vadis ?" ou "La Tunique"), avaient droit, la nuit qui précédait les combats, aux services de prostituées quand ce n'étaient pas des grandes dames qui soudoyaient leurs gardiens pour se glisser dans leurs cellules et les combler peut-être pour la dernière fois. Et là se place une différence majeure qui parle sans doute en faveur des Grecs : Rome a, plus qu'Athènes, plus que Corinthe, plus même que Sparte, inextricablement relié le sang, le sexe et la Mort. (Ce qui a d'ailleurs peut-être eu une incidence, soit-dit en passant, sur la démence de nombre de leurs dirigeants.)

Sur ce volume de 311 pages, il y a encore beaucoup à dire (par exemple sur la prostitution sacrée, venue tout droit de Babylone et probablement de civilisations pré-historiques qui se souciaient tant de la fertilité) et, si le sujet vous intéresse, je ne saurais trop vous conseiller de le lire, à tête reposée et, si vous n'êtes pas très férus d'Antiquité, en prenant même des notes. Cela vous aidera sans nul doute à mieux comprendre des civilisations brillantes qui, au sein du pire mépris de l'homme, de la femme et de l'enfant, laissent éclater d'inattendues perles de bonté et le désir réel, chez certains, d'améliorer l'existence de ceux que la société, pour mieux survivre, traitait en parias.

Quoi qu'en disent certains, nous sommes les héritiers directs de ces deux grandes civilisations, si imparfaites qu'elles furent. Sachons ne pas l'oublier et, sans excuser les excès qui choquent notre morale, à nous qui tolérons pourtant aujourd'hui l'esclavage, sous toutes ses formes, des enfants, des femmes et des hommes dans certains pays, tout cela au nom de la non-ingérence et pour le plus grand profit de certains, ayons la pudeur de ne pas les juger. S'il est un défaut qu'ils ne pratiquaient pas, c'est bien, semble-t-il, en ce domaine de l'esclavage, surtout sexuel, celui de l'hypocrisie. En d'autres termes, ne donnons pas de leçons, nous qui pourrions en recevoir tant ... ;o)
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Quel plaisir incomparable de redécouvrir l'Antiquité par le biais des fêtards, des prostituées et des bandes de mauvais garçons ! Catherine Salles met à la portée du lecteur, grâce à son érudition sans faille, la ville antique et ses habitants à travers une reconstitution précise de la vie quotidienne du petit peuple. On est loin des envolées lyriques sur les grands esprits du temps mais plutôt au raz des pâquerettes et c'est particulièrement réjouissant car pour une fois, l'historien s'attache à l'homme de la rue ...ou plutôt la femme d'ailleurs en livrant, à travers des extraits littéraires choisis, un témoignage sur la vie des prostituées qu'il s'agisse des brillantes hétaïres de l'Athènes du grand siècle de Périclès ou des esclaves contraintes au plus vieux métier du monde par leur noble propriétaire tirant sa fortune de leur activité .
Même si l'on sourit à l'évocation des banquets arrosés et des débordements d'une jeunesse toujours facétieuse, on ne peut que frémir du sort des enfants donnés en pâture pour satisfaire les envies des plus exigeants ce qui permet de mettre en avant l'envers de la démocratie athénienne.
A travers la vie de la prostituée Nééra, la condition féminine apparait dans toute sa vulnérabilité même si certaines , il faut bien le remarquer, ont su tirer leur épingle du jeu et s'assurer une vie plutôt agréable.
Rome , bien qu'elle ait structuré par son corpus législatif toute une partie de l'occident, ne s'est guère montrée plus exemplaire . Là encore le mépris dans lequel était tenus tous ceux de statut servile avait des conséquences effroyables. Les bandes organisées sévissaient ...et pas seulement nuitamment. Cicéron en a d'ailleurs fait les frais...La justice restait le privilège des puissants et le droit était souvent bafoué.
La violence omniprésente et le peu de cas qui est fait de la vie humaine reste à méditer à notre époque contemporaine que l'on présente sous un jour tellement dangereux ... Et pourtant l'Antiquité garde son attrait irrésistible par l'héritage si précieux qu'elle nous a transmis.
Bien sûr certains de ces grands hommes que nous révérons nous apparaissent sous un jour peu reluisant ,mais il y a des exceptions et toute mon estime va à Aristote qui eut la générosité de transmettre à sa concubine un coquet héritage qui lui a probablement permis de le pleurer sincèrement quand il passa de vie à trépas.
Cet essai qui se lit avec une grande facilité, ne s'adresse pas seulement aux historiens mais peut fournir à tout esprit curieux une magnifique porte d'entrée sur une période qui suscite toujours l'intérêt.
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Le monde moderne n'a pas l'exclusivité du vice.
Catherine Salles nous projette avec ce livre au milieu de la cour des miracles de Rome, avec les assassins, les petits voyous, les filles à matelots et les escrocs minables.
L'auteur est maître de conférences en civilisation et littératures latines à l'université Paris X Nanterre.
Ce livre, écrit d'un façon très vivante, est original et très captivant.
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On nous aurait menti ! Non seulement les marbres immaculés du Parthénon ou du Palatin étaient bariolés mais ils dissimulaient des arrière-cuisines fort peu ragoûtantes ! Blague à part ce court essai bien documenté fait le point sur nos connaissances concernant les basses couches des sociétés antiques et leurs interactions avec les puissants et les riches.Et cela rend ses sociétés beaucoup plus proches des nôtres ,ils avaient aussi leurs Weinstein et leurs DSK , leurs jeux « opium du peuple » etc ! Ce livre rappelle à quel point les inégalités de pouvoir et de richesse pourrissent les sociétés et c'est une bonne chose.
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L'antiquité vue du côté des tripots, des lupanars et des voyous....Un monde souvent ignoré....
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Citations et extraits (25) Voir plus Ajouter une citation
[...] ... Il y a plus imposteurs que les diseurs de bonne aventure, ce sont ceux qui se prétendent les prêtres d'une de ces divinités orientales familières aux Romains depuis le IIème siècle av. J. C., Isis, la grande déesse syrienne servant de "paravent" à des hommes, à des femmes, qui, au nom de la divinité, tirent des profits substantiels de la crédulité et de l'ébahissement des badauds. Tous ces faux prêtres se servent des mêmes artifices : démonstrations bruyantes, hululements, vociférations, danses extatiques, mutilations sanglantes, déguisements spectaculaires, tout est fait pour impressionner les passants :

"Quand un individu secoue un sistre ... quand un cabotin se taillade les muscles des bras et des épaules ... quand une femme glapit en rampant sur les genoux au milieu de la rue ... quand un vieillard vêtu de lin agite une branche de laurier et une lanterne en criant qu'un dieu est irrité, vous vous précipitez tous ensemble."

La plupart de ces "dévots" ne sont en fait que des charlatans, profitant de la crédulité populaire pour s'enrichir. Ils impressionnent le bon peuple par leurs oripeaux voyants, leur maquillage outrancier :

"Vêtus de tuniques bariolées, ils se barbouillent hideusement le visage d'un fard plâtreux et cernent leurs yeux d'un trait de crayon charbonneux. Ils sortent accoutrés de turbans, de robes jaune safran et de voiles de soie ou de lin très fin. Certains ont des tuniques blanches, peintes en tous sens de motifs triangulaires de couleur pourpre et resserrées dans une large ceinture. Ils portent aux pieds des chaussures jaunes." ... [...]
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Les prostituées ont l'habitude d'envoyer au port leurs petits esclaves, leurs jeunes servantes. Si un bateau étranger entre dans le port, elles demandent de quel pays il vient et à qui il appartient. Aussitôt elles abordent le patron du bateau, elles se collent à lui et, si elles parviennent à le faire tomber dans leurs filets, elles le renvoient chez lui complètement à sec.
Ce sont de véritables navires pirate qui sont à l'affût dans le port.
(commentaire de "Plaute" inséré dans le chapitre 3 "Hetaïres, gigolos et voyous")
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[Néron] est accompagné de gardes du corps déguisés comme lui et qui l'aident dans ses forfaits.
La « bande à Néron » est redoutable : elle fracture les portes des boutiques et des maisons, pille les marchandises, les biens des particuliers ; l'empereur a le front d'installer dans son palais une « cantine », où il fait vendre aux enchères le produit de ses vols [...].
Le jeu semble d'autant plus drôle à Néron qu'il est sûr de s'amuser ainsi incognito. Pure illusion : tout le monde, dans la ville, connaît les traits de l'empereur dont l'effigie orne les monnaies que l'on utilise quotidiennement ; les Romains identifient aussi sans peine les acolytes de Néron : ce sont eux que l'on voit, au cirque, au théâtre, dans les cérémonies officielles, former la garde d'honneur de l'empereur. Cela explique d'ailleurs que les malheureuses victimes ne se défendent pas avec une extrême vigueur, lorsqu'elles reconnaissent en leurs agresseurs la bande impériale. Ces amusements de Néron donnent d'ailleurs des idées aux véritables truands : ils attaquent et dépouillent les Romains en se faisant passer pour Néron et ses gardes du corps.
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Un cas particulièrement remarquable de la précocité de certains adolescents ou enfants nous est fourni par le fils du fameux Alcibiade. Cet enfant, séparé dès sa naissance de son père condamné à l'exil, n'attend pas l'âge d'homme pour en imiter très tôt les pires débauches. Dès l'âge de onze ans à peu près, il scandalise tous les Athéniens en participant des banquets avec les individus les plus dépravés de la ville [...].
Ce charmant enfant ne se borne d'ailleurs pas à participer activement aux orgies athéniennes. Il monte une machination pour trahir son père toujours en exil ; à douze ans, il perd toute sa fortune aux dés ; il élimine des compagnons gênants en les jetant à la mer ; et, pour couronner ses exploits de jeunesse, il viole sa sœur !
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Voici pourquoi la servante d'un leno se croit obligée de faire ces recommandations aux autres esclaves de la maison :

Faites le guet à la porte et surveillez bien la maison, afin qu'aucun client ne reparte plus chargé qu'il ne l'était en entrant et qu'arrivé chez nous les mains vides, ils n'en sortent les mains pleines. Je les connais bien leurs manières, à nos petits jeunes gens d'aujourd'hui. Ils arrivent à cinq ou six chez les catins pour s'amuser. Ils ont dressés leurs plans. Dès qu'ils ont pu entrer dans la maison, l'un couvre la fille de baisers, tandis que les autres agissent. S'ils voient qu'on les regarde, ils font des plaisanteries et des blagues pour tromper notre surveillance. Ils mangent souvent notre repas et se bourrent comme des boudins... C'est pour eux une vraie bataille, un vrai acte de courage que de piller des pirates.
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CATHERINE SALLES - SPÉCIALISTE DE L'ANTIQUITÉ
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