Ce livre est d'abord l'hommage d'une fille à sa mère. L'offrande de Lydie à Montserrat Monclus Arjonat, cette femme qui a refusé d'être une bonne humiliée, cette espagnole qui a connu l'euphorie des mouvements libertaires de 1936, cette fille-mère qui a éperdument aimé un français mais qui a épousé un autre homme pour sauvegarder l'honneur familial. À ce titre, la narration est tantôt prise en charge par Lydie Salayre, comme au début du roman, puis, sans nette démarcation, c'est Montse qui s'exprime avec son français entremaillé d'espagnol.
Ce roman est aussi une dénonciation des atrocités du franquisme à travers les allusions aux écrits d'un
Bernanos indigné. En effet, à la vision enthousiaste de la Montse de 15 ans,
Lydie Salvayre oppose celle de l'écrivain chrétien scandalisé par le cautionnement de l'Eglise vis-à-vis des horreurs perpétrées par les phalangistes.
«
Pas pleurer » est donc une expression qui renvoie à
la joie de vivre caractéristique de la mère, à son courage quand elle a dû fuir pour échapper aux assassins franquistes mais elle évoque aussi la générosité et l'intégrité de l'auteur des Grands Cimetières sous la lune ayant refusé de ne «
pas pleurer » les pauvres gens victimes des commandos franquistes. Cet ouvrage, par le biais de deux points de vue opposés, donne donc un aperçu assez riche des prémices de la guerre d'Espagne.
Le style est appréciable et le lexique français, écorché par Montse, alterne avec les gros mots prononcés par la grand-mère et les expressions idiotiques espagnoles. le lecteur non hispanisant regrettera toutefois que celles-ci ne soient pas traduites, même si l'auteur a certainement pris cette décision dans le but de préserver leur saveur originale.