Ma première lecture de
Mohamed Mbougar Sarr fut "
De Purs Hommes", dont j'ai apprécié l'audace, l'écriture ample et précise, l'érotisme partout présent, le constat serré de notre société, tant européenne qu'africaine.
J'attendais que "
La Plus Secrète Mémoire Des Hommes" parût en poche avec beaucoup d'impatience, lisant ici les critiques et prédisant de m'en régaler, bien que le thème en semblât plus aride et exigeant.
Du point de vue de l'exigence, j'ai été servi. Un usage de la langue jouissif, alternant la fluidité, la sécheresse, à des passages très longs, très coïtaux de littérature pure. Des termes de moi inconnus, que je n'ai pas pris le temps de chercher dans un dictionnaire, craignant de casser ma lecture. Une relecture s'imposera sûrement.
Mais à découvrir les critiques que j'ai lues ici, il m'apparaît qu'une dimension essentielle du livre, prudement ou prudemment tenue à l'écart, sa dimension érotique, semble n'avoir retenu l'attention de pas grand monde.
Il n'est pas impossible que je sois un obsédé. Allez, je le suis sûrement. Alors allons-y cash, du plus superficiel au plus sensible : ça passe son temps à baiser, et pas n'importe comment. le roman explore avec la même décontraction et habileté le complexe de castration et les parties fines. La taille du pénis et la baise en toute amitié. L'érotisme marchand et la polygamie. Et disons-le définitivement, tout cela m'a ému, voire émoustillé.
Sarr traite le lien entre littérature et désir, celui d'écrire bien sûr, dont il est question jusqu'à la dernière phrase. Mais le désir charnel n'est pas en reste et infuse tout le roman. le parallèle entre parler littérature et faire l'amour apparaît avec constance, comme si les deux avaient partie liée, mêlant intimité, émotion, extase.
Ainsi, Elimane est très grand (de partout semble-t-il), magnétique, hypnotisant. Tous ceux qui l'ont croisé au fil du récit ont couché avec lui, inévitablement. Ceux qui ne le firent pas en rêvèrent, à commencer par le narrateur, dont la quête, quoiqu'il en dise, s'intéresse tout de même beaucoup à la matérialité de son existence. Comme si le lien littéraire prenait chaque fois une dimension physique, excusez-moi, un coup de bite.
L'une des prouesses de "
La Plus Secrète Mémoire Des Hommes" consiste sûrement à évoquer la polygamie de Koumakh en termes simples et directs, et d'obtenir néanmoins dans notre société passablement verrouillée le Goncourt en toute impunité.
J'ai dévoré l'enquête, j'ai savouré la richesse des récits, j'ai adoré me perdre dans ce labyrinthe, j'ai savouré la langue et ses variations, mais décidément, je rêve de savoir si l'érotisme de
Mohamed Mbougar Sarr n'est que littérature.