La récente réouverture du Musée royal de l'Afrique centrale (Tervuren) s'est doublée d'une polémique. Que faire des objets spoliés au début du siècle précédent et de l'image colonialiste inscrite dans le marbre du bâtiment ? La question se pose également un peu partout en Europe et nous renvoie au temps du colonialisme, époque où il était coutumier de s'emparer des richesses du Sud afin de les rapatrier dans les pays industrialisés. Aujourd'hui, plus aucun historien sérieux ne nie cette évidence, même si de nombreux états préfèrent éluder le débat. Comme la Belgique, la France s'est emparé de matières premières pour alimenter ses usines et d'oeuvres d'art pour étoffer ses collections. Malgré maintes protestations, il n'a jamais été jugé bon d'évaluer la situation autrement qu'en affirmant l'inaliénabilité de ce patrimoine, jusqu'à ce qu'
Emmanuel Macron ose lever le tabou dans le cadre d'un discours survenu en novembre 2017 à Ouagadougou et évoque la possible restitution de certains biens.
Felwine Sarr et
Bénédicte Savoy savent que les palabres n'ont aucun effet constructif et préfèrent saisir le problème à ses origines, en dressant le récit de deux siècles de conquête et en racontant de quelle manière les Européens se sont servis au-delà de toute décence. Ce livre dresse un inventaire des pièces volées, narre les efforts des pays africains pour se réapproprier leur dû et analyse les points juridiques permettant peut-être un jour de rendre une justice attendue avec impatience. Aujourd'hui, les pourparlers dégagent quelques espoirs, même si rien de tangible ne semble acquis. Néanmoins, on le sait, il s'agirait d'un geste fort qui ferait date dans l'histoire des deux continents et qui relancerait une dynamique attendue tant chez nous que de l'autre côté de la Méditerranée.