– Ce que tu es ? Un monstre, crache-t-elle avec plus de férocité que je ne l’en croyais capable.
Je sursaute, malgré moi.
– Je suis une reine, m’entends-je rectifier d’une voix douce.
Mais je suis peut-être les deux. Les chefs, les souverains, ne doivent-ils
pas toujours garder une part monstrueuse, s’ils veulent survivre ?
Mais le temps n’est pas encore venu.
Je n’en ai pas fini avec le monde.
THEODOSIA
Je ne veux pas mourir à genoux.
THEODOSIA
Je ne suis plus une princesse de Cendres, pourtant. Je ne suis pas Lady Thora. Je m’appelle Theodosia Eirene Houzzara, et comme ma mère avant moi et toutes mes aïeules, je suis une reine de feu, et le sang du dieu coule dans mes veines. Même s’il ne coulera plus pour longtemps.
THEODOSIA
Ce qu’il ne sait pas, c’est que je suis déjà condamnée, quoi qu’il fasse.
Il ne peut pas me sauver de ce mauvais pas-là.
THEODOSIA
– Deux centimètres plus bas, chuchote-t-il, tout contre ma bouche.
Et comme je m’exécute, une ombre de sourire flotte sur ses traits, sans pour autant illuminer ses yeux.
– Voilà. Là, c’est bien. Maintenant, frappe sans trembler, Thora.
Je voudrais ne pas contempler son visage au moment de la mort, mais ne peux détourner le regard.
– Je m’appelle…
Je m’interromps pour inspirer, me tranquilliser.
– Je m’appelle Theodosia.
Ma voix est calme.
Un éclair de confusion passe dans ses yeux, puis les abandonne.
– Theodosia.
C’est la première fois que Søren prononce mon vrai nom, avec de surcroît, me semble-t-il, une quasi-révérence. Il appuie son front sur le mien : je ne vois plus que ses yeux, démesurés.
– Tu sais ce que tu dois faire.
Il a raison. Je sais exactement ce que je dois faire.
Pendant un bref instant, nous ne faisons plus qu’un. Je ressens sa tristesse aussi profondément que la mienne.
THEODOSIA
– J’ai enduré les effets de sa fureur à maintes reprises pour des crimes que je n’avais même pas commis. Mais cela m’a appris qui j’étais. Je sais ce qui compte pour moi, je sais ce pour quoi je suis prête à me battre. Tu peux en dire autant ?
Il déglutit.
– Je sais que je suis prêt à me battre pour toi, Thora.
Il réclame mon pardon, il voudrait que je le débarrasse des péchés de son père, mais cette fois-ci, c’est lui qui a du sang sur les mains.
THEODOSIA
- Je t’aime. Je voulaisque tu saches cela, avant toute chose. Je t’aime et je ne ferai jamais rien qui puisse te blesser.
SOREN