Parce qu'il a vibré d'émotion à la lecture de Moby Dick, un adolescent de 16 ans parvient à être embauché sur un baleinier en partance pour le bout du monde, au-delà du détroit de Magellan. Mais la réalité est loin des images fantasmées des romans.
Plusieurs années plus tard, l'ancien adolescent est devenu adulte et reporter dans un journal lanceur d'alerte sur l'écologie quand lui parvient la rumeur qu'un baleinier japonais aurait disparu au large du détroit de Magellan, emportant avec lui dix-huit membres de son équipage.
Le reporter part alors sur place découvrir les causes de cette disparition.
Le protagoniste du récit pourrait tout aussi bien être l'auteur lui-même tant les ressemblances dans leur biographie respective sont légion.
Du petit garçon rêveur, la tête emplie des récits d'aventures qu'il a lus dans les romans, à la métamorphose en militant écologique,
Luis Sepulveda nous raconte une histoire où la mer et ses habitants occupent la première place.
La vie des marins décrites en premier lieu, est l'occasion de brosser le portrait des baleiniers, ces hommes de l'ancien temps, naviguant sur les mers à la recherche de mammifères marins.
L'auteur oppose les souvenirs de l'adolescent, où les baleiniers respectaient leur proie et la nature, avec une réalité récente dans laquelle l'industrie saccage les fonds marins et les écosystèmes. Les différences entre le savoir-faire du vieux marin argentin, auprès de qui l'adolescent vivait son rêve d'aventure, et l'arrogance de l'énorme navire japonais, soulignent la différence sur l'usage de la mer et de ses richesses.
La rencontre de notre personnage avec le capitaine Nilsenn, sorte d'Achar moderne, engagé dans une lutte non contre Moby Dick, mais contre le navire japonais, est l'occasion pour l'auteur de donner voix à celles et ceux qui combattent ou subissent certaines pratiques.
Il évoque le mode de fonctionnement de Greenpeace, la lutte des indigènes et leur massacre, l'absurdité de la chasse aux baleines et les entorses récurrentes au droit international par de nombreux pays.
L'auteur nous raconte aussi et avant tout une très belle aventure où les navires et les animaux s'affrontent, à armes inégales, loin des regards.
J'ai beaucoup aimé ce récit, notamment la magnifique conclusion.
Luis Sepulveda est un rêveur dont les idées contaminent le lecteur grâce à une très belle plume.
« Les bateaux qui ont connu le goût de l'aventure deviennent amoureux des mers d'encre et ils aiment naviguer sur le papier »
Un bon moment de lecture.