La guerre fait rage non seulement sur
Hypérion mais aussi dans tout le Retz. L'Hégémonie est mise à mal qui se heurte aux Extros. La Présidente Gladstone fait tout pour maintenir la cohésion et la survie de ses troupes. Mais un à un les vaisseaux sont décimés par les redoutables Extros. La survie de l'humanité viendra-t-elle de Joseph Severn, « une reconstitution cybride du poète
John Keats », capable de suivre en rêve la progression des pèlerins sur
Hypérion alors que les Tombeaux du Temps se sont ouverts ? Mais le destin de Keats rattrape Severn : atteint de phtisie, il semble condamné à s'éteindre. Parviendra-t-il à incarner Celui qui Précède ?
J'ai lu avec plaisir ce second tome de « La chute d'
Hypérion », avec autant de plaisir que le premier, mais toutefois un peu moins que les deux tomes précédents intitulés «
Hypérion ».
Le monde décrit par
Dan Simmons est résolument apocalyptique et comprend toute une partie ultra-technologique, à travers le TechnoCentre. le livre s'inscrit donc dans le courant cyberpunk qui aime à décrire des sociétés de haute-technologie dominées par l'informatisation à outrance, la présence d'intelligences artificielles (complétées dans le présent tome par des IU ou intelligences ultimes), d'un vaste réseau virtuel appelé Infosphère, Infoplan, Mégasphère et même Métasphère sur lequel on peut se connecter grâce à une dérivation neurale. Cette surenchère de termes techniques et d'explications alambiquées peut décourager le lecteur néophyte. Dans le second tome d'«
Hypérion », j'avais été un peu rebutée par le récit de Brawne Lamia qui portait en elle un jumeau de la personnalité du poète
John Keats. Je n'ai pas cherché à tout comprendre au fil des pages, d'ailleurs est-ce possible ? Je me suis laissée plutôt transporter dans l'imaginaire qu'aime à déployer
Dan Simmons. Nous apprenons quelques grandes vérités sur le TechnoCentre, notamment à travers des dialogues entre le cybride de
John Keats et l'IA Ummon :
« Ainsi, le Centre est vulnérable. Où se trouve-t-il, Ummon ? le TechnoCentre ?
[Je te l'ai déjà dit.]
Répète-le-moi, Ummon.
[Nous habitons la
zone intersticielle/
où nous tissons les singularités
comme un treillis de cristal/
dans lequel nous stockons nos souvenirs et
créons l'illusion de nous-mêmes
à l'intention de nous-mêmes.] » (p. 215)
La typographie est originale et accentue l'artificialité de l'IA. Cette vérité quant à l'emplacement du TechnoCentre nous est révélée de manière codée et assez poétique. D'ailleurs la dimension cyberpunk du présent tome n'empêche pas l'auteur d'adopter un ton poétique, en témoigne l'extrait suivant :
« Lamia avait vu dans le Centre une biosphère active peuplée d'IA, plongeant ses racines dans l'intellect, ancrée dans un sol riche de données, baignée d'océans de connexions, de couches atmosphériques de conscience, et du bourdonnement incessant des échanges. » (p. 211)
Même si l'auteur décrit des technologies pointues qui pourraient sembler dépourvues d'affect, le ton reste assez poétique.
L'auteur cite souvent des poèmes de
John Keats, l'écrivain central de toute son oeuvre :
« Je lui parle du poète
John Keats, né en 1795, de sa brève existence, souvent malheureuse, de sa mort à la suite d'une « phtisie » en 1821 à Rome, loin de ses amis et de son unique amour. » (p. 176)
Voici un de ses poèmes repris par l'IA Ummon, ce qui donne donc lieu à une mise en forme particulière :
Me faudra-t-il quitter ce havre de repos/
Ce berceau de ma splendeur / ce climat/
Le luxe calme d'un bonheur de lumière/
Les pavillons cristallins / les temples purs/
De tout mon lumineux empire ?
Le voici désert et vide / inhabité de moi \\
Les flammes / la splendeur et la symétrie
Se dérobent à mes yeux /// Je ne vois que du noir / la mort / et puis du noir.] (p. 220)
Dans ce monde de haute-technologie que
Dan Simmons se plaît à décrire de manière poétique, les émotions sont toujours proches, en témoigne l'extrait suivant :
« Brawne sentit la caresse de la brise tiède sur ses cheveux. Levant la tête vers le ciel, elle agita la main, sans plus essayer de cacher ses larmes ou de les essuyer. Ses deux bras s'agitèrent bientôt frénétiquement pour dire adieu au splendide vaisseau qui grimpait vers l'espace sur sa traîne bleutée, en les saluant d'un bang sonique qui, comme un cri lointain, se répercuta sur les dunes du désert et sur les lointains sommets. » (p. 345)
Une belle oeuvre, bien écrite, entre poésie et technologie, mais qui reste difficile d'accès et peut parfois rebuter. Je vais d'ailleurs arrêter ma lecture à ce tome, ne souhaitant pas poursuivre dans l'immédiat avec « Endymion ».