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Alexandre Goy (Traducteur)
EAN : 9782382122488
Akata (22/06/2023)
4/5   14 notes
Résumé :
Naomi, ancienne femme de plaisir, en a vu passer des hommes… Aussi, aujourd’hui, quand la nuit tombe, elle aime conter les histoires de ses anciennes camarades d’infortunes. Dans un Japon en proie aux doutes et aux crises, en plein changements, suivez les vies tragiques de prostituées qui, trop souvent, ont été dupées par les hommes…
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Critiques, Analyses et Avis (7) Voir plus Ajouter une critique
Takao Saitô écrit, dessine une belle déclaration d'amour adressée à ces femmes, à travers leur quotidien, des prostituées dans les maisons du quartier des plaisirs. Des dessins sombres illuminés par le sourire des dames contrebalançant souvent avec l'animalité de misérables hommes. Ô misère, il en est question tout au long de cet ouvrage. Loin d'être de mauvais goût ou de prêter à sourire devant les charmes d'une de ces prostituées, c'est surtout une oeuvre sociale publiée à l'origine dans un magazines en 1972.

Je me retrouve ainsi plongé dans le Japon, sublimes dessins de ces maisons au charme d'antan, et puisque la plupart des histoires se placent dans les années trente, en pleine misère économique. Il n'est pas rare de voir d'ailleurs placarder sur les planches de la ville des messages aussi explicites :

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Autre époque, autres moeurs, vendre ainsi une jeune fille à une maquerelle est souvent l'unique occasion à une famille de subvenir à ses besoins. Triste constat, qui lui ne prête pas à sourire.

Si certaines histoires apportent un peu d'humour et de réconfort, d'autres confidences sont plus marquées dans la tristesse ou la mort. Il est question d'amour et de suicide, d'attente et de vieillesse. La tragédie fait son apparition, autour d'un client, ou d'une de ces jouvencelles, de prix à payer pour libérer cette jeune fille de son devoir…

Je suis donc là, à observer sous les flocons de neige virevoltant cette ravissante femme que son kimono ouvert laisse voir ses seins et ainsi à m'interroger sur le fait qu'elles soient de véritables poulpes dans l'âme…
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Dans sa collection « Héritages », je n'avais lu pour le moment que les titres des autrices cultes qu'Akata avait eu la riche de nous rendre accessible. Avec Confidences d'une prostituée, c'est un auteur culte, celui de Golgo 13 que je rencontre avec un scénario plus proche de mes sensibilités que ses autres oeuvres portées jusqu'à nous. Témoignages de la rude vie de ces femmes trop souvent laissées dans l'ombre, il nous livre des moments intenses et riches en émotion.

Takao Saitô, que je rencontre ici, est effectivement l‘auteur du cultissime Golgo 13, manga le plus long jamais parus au Japon, avec ses 209 tomes toujours en cours depuis 1968, même si l'auteur, lui, nous a quitté en 2021 à l'âge de 84 ans. Mangaka qui compte au Japon, il fut d'abord l'un des chantres du Gekiga et l'un des premiers à mettre en place une division du travail avec la formation d'un de ces fameux studios qu'on connaît si bien désormais, ce qui permet à son titre Golgo de continuer à être publié. Il voulait faire du divertissement, il en a fait, mais il a aussi su proposer autre chose. Et, Confidences d'une prostituée dont nous allons parler aujourd'hui, est un de ces autres chose. Titre travaillé dans les années 70, il met en lumière les préoccupations plus sociétales d'un auteur parfaitement rôdé désormais en tant qu'artiste.

Ce genre de récits âpres sur la vie de femme un peu marginales, j'ai déjà connu avec Kazuo Kamimura, mais là où ce dernier est dans un registre très mélodramatique, Saitô, lui, fait le choix d'être plus formel, plus réaliste. le premier est un artiste qui charme aussi par ses portraits de femmes splendides, parfaits pour faire verser une petite larme sur elles. le second apporte un vernis plus âpre, plus rude, car il résonne avec ce qu'on peut côtoyer. Cela n'a pas la même texture, pas la même intention, pas la même intensité. J'aime les deux et je les trouve assez complémentaires.

Dans le volume ici présent, sous couvert de 10 histoires différentes, il nous relate le quotidien assez cru de ces lieux qu'étaient les maisons closes japonaises et ce qu'ont vécu leurs occupantes. Ce n'est pas un récit joyeux mais pas non plus misérabiliste. C'est un récit juste. Conté par une ancienne prostituée qui livre ainsi ses souvenirs, cela leur donne un certain cachet. Avec une mélancolie juste, elle retrace ainsi des parcours de vie bien différents, confrontant le lecteur au quotidien de ses femmes et de leurs clients mais aussi de ceux qui gravitent autour. C'est très enrichissant. J'ai aimé découvrir ces différents portraits. J'ai aimé cette plongée, tout sauf voyeuriste, dans ce que les uns et autres avaient vécu, à travers des scènes souvent poignantes de cette intimité mal connue.

Les sentiments sont le coeur de l'histoire. L'auteur ne nous berce pas d'illusions. Il n'y a pas de belles histoires, juste des parcours de vie achoppés. Il nous montre ce quotidien dans toute sa rudesse : des femmes désespérées, des femmes qui ont abandonné, des femmes qui s'y sont habituées… mais aussi des hommes pathétiques, d'autres violents, certains juste paumés. Il n'y a pas d'antagonistes juste des personnes portées par leurs temps, par leurs habitudes et certitudes d'alors, et enfermés dans un schéma qui les coupe du moindre espoir. C'est assez triste. Mais c'est justement ce qui rend cette lecture poignante, ce qui la rend viscérale.

Les portraits sont cependant inégaux et tous les chapitres ne se valent pas, même s'ils sont regroupés ici sous le couvert du récit des souvenirs de cette ancienne prostituée. Cependant certains touchent plus que d'autres à l'image de cet amour impossible avec un troufion dans le deuxième chapitre ou cet amour terriblement patient, peut-être trop d'ailleurs, dans le troisième. le dessin, lui, est égal par contre. On est en plein dans l'esthétique Gekiga avec ce trait semi-réaliste porté par un ton dramatique, dans une profusion de cases richement rythmée mais très sombres et remplies de traits pour apporter ombres et textures. Actuellement, cela a vieilli et même si cela a inspiré nombre d'auteurs depuis, ce n'est plus vraiment au goût du jour, la narration est plus pesante, parfois moins fluide. Mais pour qui aime, les ambiances old school, on est en plein dedans et cela a un charme certain pour plonger dans cette époque révolue dans un ambiance de témoignage un peu journalistique, très cinématographique et classique, avec de très belles scènes intimes émouvantes dans leur malheur.

Après Autant en emporte la brume qui était un texte fort intéressant pour l'histoire du manga et du shojo manga mais qui souffrait d'une histoire trop mélodramatique et remplie de maladresses narratives, Confidences d'une prostituée contre qui j'avais plus de préjugés m'a plus plu scénaristiquement. J'en ai aimé la justesse, la rudesse, la mélancolie et le réalisme. C'est un portrait au plus près de ce que vivaient ces femmes, dans toutes sa complexités et sans voyeurisme. On n'évite pas quelques clichés mais la variété des portraits offre des situations pleines de leçons à tirer sur ces travailleuses du sexe, métier le plus vieux du monde encore en activité sur lequel il y aurait beaucoup à dire. Je regrette juste un gros manque de contextualisation à part la brève page d'introduction de l'auteur, surtout vu la carrière de celui-ci.
Lien : https://lesblablasdetachan.w..
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[critique initialement rédigée pour Manga Sanctuary (voir lien) ]

C'est donc vrai qu'en vieillissant, on se rapproche de « la blanche ». En opposition aux romans dits « noirs », la littérature « généraliste », qui ne se rattache ni à l'imaginaire, ni à la romance, ni, donc, aux romans noirs. C'est encore plus surprenant de ma part quand on connaît mon allergie aux bad endings. Parce qu'ici, on le sait d'emblée, on est dans du pur drame ; pas de conte de fées pour ces « femmes de compagnie » vendues jeunes adolescentes par leurs villages, leurs familles. « Sakuran », lu et adoré il y a quelques années (et d'ailleurs réédité il y a peu) ne faisait déjà pas dans la dentelle, mais « Confidences d'une prostituée » va encore plus loin. N'espérez évidemment pas de fins heureuses à ces dix histoires courtes : deuils, maladies, morts violentes... Au passage, gros TW suicide. Celle qui s'en sort le mieux, c'est encore Naomi, la narratrice, qui est encore là pour partager ses souvenirs de cet univers désabusé, cynique et dénue d'optimisme à qui veut bien les entendre : journaliste, vieilles connaissances, rencontres de hasard... Des histoires qui, chacune à sa façon, en expliquent également les codes, les mentalités particulières difficiles à comprendre d'un regard extérieur. Presque de la tranche-de-vie, tombant parfois dans le tragi-comique, avec un collecteur de fonds nouvellement débarqué qui justement n'y pige rien, ou cette jeune femme extirpée du bordel, à l'inverse incapable de s'intégrer dans un quotidien normal.
Avec un ton presque documentaire, à travers la voix de Naomi, c'est l'auteur qui s'exprime, lui qui, très jeune, a côtoyé ce milieu et recueilli les confidences de celles qui fréquentaient le salon de coiffure familial, dans ce qui leur constitue un bel hommage.

A ce stade de la critique, normalement, vous avez compris qu'il ne s'agit en rien d'un manga érotique. Les étreintes sont plus suggérées que montrées et la nudité occasionnelle, en plus de n'être que partielle, n'est jamais présentée sous un angle « sexy ».
Publié dans les années 70, « Confidences d'une prostituée » possède donc un trait « rétro » semi-réaliste, qui ne manque pas de charme et convient très bien à ce type de récit. Les faits relatés, eux, remontent tous à une quarantaine d'années plus tôt, entre la fin de l'ère Taishô et le début de l'ère Shôwa, la fin des années 20 et le début des années 30. Difficile, en découvrant l'oeuvre en 2024, de se dire que tout ça remonte déjà à un siècle.

« Confidences d'une prostituée » n'est définitivement pas un livre pour tout le monde, mais si le sujet vous intéresse et que la mélancolie ambiante ne vous fait pas peur, vous ne pourrez qu'adorer.
Lien : https://www.sanctuary.fr/avi..
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Je sais que pour certaines et certains d'entre vous, le titre va vous refroidir. On se dit que ça va être très cru, sans filtre, et pourtant que nenni (oui j'écris très bien français).

𝔻𝕖 𝕝'é𝕣𝕠𝕥𝕚𝕤𝕞𝕖 𝕟𝕠𝕟 𝕖𝕩𝕡𝕝𝕚𝕔𝕚𝕥𝕖
J'aimerais commencer cette chronique par quelque chose qui est très important : non, ce manga n'est pas un concentré de Hentai (manga érotique). Oui, il y a bien-sûr des scènes érotiques, de la nudité ou des conversations très orientées, mais on reste sur des choses non explicites. Il n'est donc pas destiné à un jeune public mais conviendra très bien à de jeunes adultes ou des adultes qui souhaitent découvrir ce qu'était la vie de ces femmes.

𝔻𝕖𝕤 𝕙𝕚𝕤𝕥𝕠𝕚𝕣𝕖𝕤 𝕕𝕖 𝕧𝕚𝕖
Dans ce one-shot, la parole est à Naomie, une personne âgée qui travaillait autrefois dans le quartier des plaisirs. Elle en a vu passer, des hommes, et pourtant ce n'est pas cela qu'elle a retenu mais plutôt les histoires de vie qui se sont déroulées sous ses yeux. Découpé en plusieurs nouvelles, nous découvrons au fur et à mesure les coulisses du « métier » de ces femmes. Jeunes ou non, chacune ont vécu des expériences qui les ont marquées. Et il y en a des choses à dire… Entre les histoires de dettes une fois arrivée au bordel, le désir d'avoir un amant ou même se faire racheter sa liberté, les problèmes de comportement de la gente masculine au lit (ou en dehors)…

Vous l'aurez compris, j'ai apprécié cette lecture qui m'a fait voyager dans le Japon d'autre fois, avec une dernière anecdote dans notre monde actuel qui clôt parfaitement ce recueil de témoignages tantôt bouleversants, tantôt offensants. Il est capital de se souvenir que les droits des femmes n'est pas tombé du ciel et qu'il faut, même encore aujourd'hui, se battre pour des libertés fondamentales.
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Bien que j'ai trouvé les graphismes peu attrayants, ce manga vaut la peine d'être lu pour le sujet qu'il évoque. On dit beaucoup de choses sur la prostitution, chacun y va de son avis, de son positionnement, souvent sans jamais se soucier de poser des questions aux premières concernées. Ça m'avait déjà frappée à l'époque où j'ai lu "La maison" d'Emma Becker et ça m'a émue encore plus en lisant ces différents témoignages. C'est un monde à part, violent, qu'on ne peut pas comprendre vraiment, jamais même si on a la chance d'avoir toute notre vie échappé à ce genre d'asservissement. Il n'y a pas de plaisir, pas de fins heureuses, pour aucune d'entre elles. Mais ce que j'aimerais aujourd'hui c'est qu'on s'intéresse à ceux qui viennent à elles, qui abusent de leur pouvoir, de leur argent, de leur position de force. Parce que c'est eux que je juge moi.
Quoi qu'il en soit, c'est poignant, ça m'a fait de la peine à plus d'une reprise et parfois interloquée. Ça interroge et c'est là, à mon sens, la qualité première d'un bon ouvrage.
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Citations et extraits (3) Ajouter une citation
Au printemps 1932, la crise économique faisait toujours rage et dans le Nord-Est du pays, la famine gagnait du terrain. Dans es villes et les villages, il y avait partout cette année-là des annonces de ce genre signées par l'administration locale, affichées publiquement :

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COMMUNE DE SONKÔ
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Se mettre dans une colère aussi candide, c'est plutôt l'apanage de la jeunesse. En prenant de l'âge, on se détache de ces choses-là. Votre récit me rappelle l'époque où, moi aussi, il m'arrivait de bouillir de l'intérieur. En vieillissant, tout cela nous semble puéril, et on a plutôt tendance à encaisser sans réagir.
(p. 133)
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- Ce ne sont pas vos sentiments qui guident votre désir, uniquement vos sens. C'est ainsi que vous fonctionnez, n'est-ce pas ? Vous ne raisonnez pas avec votre tête, mais avec vos parties intimes. C'est ça être une femme !
- Ce ne sont là que des idées reçues, des mensonges, des fabulations colportées par des gratte-papier dans votre genre !
(p. 82)
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Videos de Saitô Takao (7) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Saitô Takao
En juillet 2022, Doki-Doki vous propose une découverte originale du Japon... et du monde d'après dans LES PROMENEUSES DE L'APOCALYPSE.
+ d'infos & extrait : https://bit.ly/3zl5qOe
Résumé Le monde est anéanti... Partons le visiter à moto !
Elles visitent les endroits les plus célèbres du Japon avec leur moto tout terrain. Admirer le mont Fuji depuis Hakone, pêcher sur le pont de la baie de Yokohama, sans oublier d'aller au Tokyo Big Sight. Voilà le voyage qui attend nos deux jeunes filles à moto. Hélas, le monde s'est effondré… Malgré son contexte post-apocalyptique, "Les Promeneuses de l'apocalypse" est une véritable bouffée d'air frais dans le paysage manga actuel. Les deux héroïnes ne se départissent jamais de leur bonne humeur alors qu'elles parcourent un Japon ravagé, où les animaux sauvages ont pris possession des villes. Partez avec elle pour une visite touristique inoubliable du Japon, où les surprises ne manquent pas !
Informations complémentaires - Auteur : Sakae SAITO - Type : Seinen - Éditeur original : KADOKAWA CORPORATION - 200 pages – 7,50 € - Série en cours, 3 volumes au Japon Sortie du volume 1 le 6 juillet 2022
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