Tadasu a deux mères : celle qui l'a mis au monde et qui meurt quelques années plus tard, et sa belle-mère avec qui se remarie son père. Avec elle, il entretient une relation ambiguë, entre amour filial et désir. Ses deux mamans s'appellent Chinu et leurs images se confondent dans les souvenirs de Tadasu. À partir d'un poème écrit par l'une ou l'autre de ses mères, il retrace l'histoire de son enfance et l'arrivée de sa deuxième mère à l'Ermitage aux Hérons, belle propriété typiquement japonaise.
Si
le pont flottant des songes a été publié en 1959, l'intrigue se déroule au début du 20e siècle et offre au lecteur l'image d'un Japon assez traditionnel : longuement décrit, l'Ermitage aux Hérons est une magnifique demeure entouré d'un jardin paysager, qui contient un étang où les carpes et les gardons se réfugient volontiers, et où la vie est rythmée par le bruit du sôzu ("On avait installé sur son parcours un de ces dispositifs en bambou que l'on connaît sous le nom de sôzu, où l'eau, s'étant accumulée dans un tube, le fait soudain basculer pour s'écouler de l'autre côté, dans le claquement sonore du tube qui reprend sa place") et le son du koto joué par les deux mères de Tadasu. À l'intérieur, fusuma et tatami viennent compléter la description.
C'est donc un véritable paradis terrestre que décrit
Junichirô Tanizaki, paradis au sein duquel va grandir Tadasu, enfant unique et chéri par ses deux mères, et surtout sa belle-mère, qui en plus de se faire appeler Chinu, comme la première maman, se comporte à l'identique, à tel point que Tadasu ne parviendra plus à les distinguer dans ses tout premiers souvenirs. Mais, en grandissant, l'amour filial s'accompagne également d'un désir plus sensuel pour sa belle-mère et, à l'éloge de la mère, s'ajoute l'éloge de la femme. Petit à petit, on découvre avec Tadasu, le passé de Chinu, ancienne maiko (apprentie geisha) et l'on comprend les choix, parfois difficiles, qui ont été faits par son père et Chinu.
Je ne connaissais pas du tout
Junichirô Tanizaki et j'ai été ravie de cette découverte et de la très belle, mais traditionnelle, image du Japon. Les relations mère/fils sont ambiguës, et je pense notamment à la scène dans laquelle Tadasu, jeune homme, tête les seins de sa belle-mère. Mais cela n'apparaît pas glauque, ou répréhensible, mais j'y ai plutôt vu l'éloge de la féminité que fait l'auteur.
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