Deuxième lecture pour ce chef-d'oeuvre de
Donna Tartt, qui maitrise à la perfection son style, et dont l'histoire se montre digne de Dickens, comme le souligne le 4ème de couverture.
Bon sang, mais que de platitudes déjà… et c'est ma deuxième critique. Comment, avec quels mots, rendre ce qu'on peut ressentir à la lecture de
Donna Tartt… ?
Déjà, ces 2 précédents romans,
le maitre des illusions, et surtout,
le petit copain, étaient terribles, aboutis, denses, intelligents, et me faisaient me demander pourquoi aucun réalisateur n'avait encore eu le génie d'adapter correctement l'un des deux.
Avec
le chardonneret, elle signe là son roman le plus abouti ; une quête de l'impossible, avec son personnage en perpétuelle déraison, vivant dans un constant mensonge, s'aveuglant, se berçant d'illusions, rejoint incontestablement la ligne directrice des précédentes histoires, à savoir, les choses sont-elles bien ce qu'elles semblent être ? Ne se raconte-t-on pas en permanence des histoires, auxquelles on croit sans y croire… ? Nos vies ne sont-elles pas que le reflet de ce qu'on veut bien montrer, et c'est peut-être une des raisons qui fait qu'on se retrouve toujours seul à la fin, face à nos mensonges, nos illusions ?
Le chardonneret, ou la perte de repères après un grave traumatisme… (Ce livre résonne d'ailleurs d'autant plus curieusement en ces moments de troubles intenses.) Un conte dense et intemporel, une histoire à la Huckleberry Finn, ou peut-être L'idiot de Dostoïevsky…
Que dire d'ailleurs de l'histoire sans trop dévoiler l'intrigue ? Car je trouve vraiment terrible de spoiler le début, je vous conseille vivement de ne pas lire d'autres critiques, car les autres n'ont pas ces scrupules, et il vous faut arriver le plus vierge possible sur ce roman, pour le vivre pleinement.
Mais voici en quelques mots le propos : un jeune garçon, Théo, se retrouve orphelin et voit sa vie basculer le jour où il se retrouve en possession d'un tableau de maitre,
le Chardonneret. Il va être balloté d'une famille de remplacement à Manhattan, à son père, escroc à la petite semaine à Las Vegas, pour revenir des années plus tard vivre à New-York, toujours accompagné de son petit tableau qui se trouve être recherché par le FBI…
Une histoire à tiroirs, où les faux-semblants éclatent au grand jour, comme des bulles d'eau de vaisselle sale.
Du grand, du très grand
Donna Tartt.
J'attends maintenant avec impatience le prochain, allez, plus que huit ans…
Challenge pavés 2015-16
Première critique - juin 2014
Ce livre est incroyable. On se retrouve pris en quelques pages, dans la vie étrange de ce jeune garçon. L'histoire en surface, c'est celle de Théo, jeune ado, qui perd tous ses repères, suite à un terrible évènement, et se retrouve ballotté, emporté sans rien à quoi se raccrocher pour ne pas sombrer; à part un objet (et quel objet !). le garçon va grandir, toujours aussi perdu, et cet objet va devenir un poids insupportable.
A tel point que cela va le paralyser. Dans ses émotions, dans l'avancée de sa vie d'adulte, dans ses relations avec les autres. Il va s'enliser, rester bloquer sur ce traumatisme de son enfance, avec cet objet qu'il garde comme une relique, et trainera sa misère, comme un zombie.
Mais la chape de plomb qui l'enserre est en train de se fendiller. Et si tout n'était qu'illusions...? le poids du lourd secret de Théo est pulvérisé par Boris, son chien-fou d'ami, Boris l'électron libre. de fait Théo n'a plus rien à quoi se raccrocher... Il dérive.
Donna Tartt excelle dans l'art de nous faire ressentir les émotions qui animent Théo. Comme lui j'ai tremblé, pleuré, ris, et angoissé. Beaucoup angoissé... Et j'étais aussi énervée par son inactivité, sa paralysie... Mais je le comprenais.
J'aime la lecture pour ça, pour vivre les vies que je ne vivrais jamais. Mais il est dur parfois de trouver des auteurs qui ont ce don, de nous faire vraiment entrer dans la peau du personnage principale, et de nous faire oublier tout le reste.
Donna Tartt a ce don, car elle sait nous rendre empathique, elle réussit parfaitement son job : nous faire vivre une autre vie.