PANIQUE AU PALAIS.
Le naufrage du palais de Versailles les 14, 15 et 16 juillet 1789 est raconté à sa manière par Agathe-Sidonie, lectrice adjointe de
Marie Antoinette qui rédige ses mémoires 21 ans plus tard à Vienne. Elle ne témoigne dans cette page d'histoire que de ce qu'elle a observé à travers le prisme de sa fascination pour la Reine, en toute subjectivité. La vie trépidante de la cour est d'abord admirablement dépeinte : « Accumulation de sons rituels, militaires, religieux, de la relève de la garde et de la sonnerie des cloches, d'un fond continu d'aboiements, de hennissement, de roulements de voitures, d'ordres criés, d'éclats de voix en fin de journée, dans la nuit, de musique un peu partout jouée, et du va-et-vient infini des pas des serviteurs sur le parquet » Ce train fastueux, égoïste et aveugle de la cour dans une France affamée va se transformer en 3 jours en un sauve-qui-peut généralisé... sauf pour le Roi, qui, en bon capitaine de navire, décide de rester malgré les supplications de la Reine. Ce pauvre Louis est en effet resté complètement à côté de la plaque : il a pourtant eu l'exemple de la monarchie parlementaire anglaise, déjà équilibrée entre les trois pouvoirs, admirée par
Voltaire et
Montesquieu, et qualifiée par eux de « chef d'oeuvre de l'esprit humain ». Louis tombe de haut : « J'ai appris que le peuple ne veux pas seulement du pain, mais il veut aussi le pouvoir. À ce point d'insanités, j'avoue, je suis confondu». (Nous aussi !) En trois jours le palais passe du batifolage à un silence mort ; uniquement interrompu par la revanche des serviteurs, hier serviles, aujourd'hui insolents.
Du grand style, prix Femina 2002, dont Benoît Jacquot a fait un film.