Emerson Pass, tome 3 : L'érudit

Ce baiser signifiait-il quelque chose ? Allait-elle le regretter ? Les bonnes manières que m’avaient enseignées papa et maman vinrent à ma rescousse. Je devais la raccompagner chez elle et sortir de cette grange car il était inapproprié que nous soyons seuls ici tous les deux à la nuit tombée. — Il est tard. Puis-je te raccompagner ? demandai-je. — Oui, c’est gentil de ta part. Elle vacilla légèrement avant de s’accrocher à moi. — Théo, je me sens un peu étourdie. — Tu es fatiguée ? — Peut-être. Ou peut-être que tes baisers m’ont empoisonnée. Elle me sourit. La beauté de son sourire me transperça. — J’espère qu’ils ne sont pas empoisonnés. Je l’observai avec soin pour relever le moindre indice. Regrettait-elle de m’avoir embrassé ou en voulait-elle encore ? — Nous devrions recommencer pour nous en assurer, dit-elle sans me regarder. — J’aimerais ça. Je fis un pas vers elle et passai mon bras autour de sa taille pour l’attirer à moi. Même à travers sa robe et ses jupons, j’arrivais à sentir ses courbes. Elle leva le visage vers moi et je posai à nouveau mes lèvres contre les siennes. Bon sang ! me dis-je. Je ne sais pas si j’arriverai à m’arrêter . Je me détachai difficilement d’elle pour la regarder.

Je veux vraiment comprendre ce qui ne va pas avec maman. Elle attend avec tellement d’impatience ce bébé, et je veux qu’elle puisse réellement profiter de son premier petit-enfant.
C’est aussi ce que je veux, me dis-je. Pour le bien de tout le monde.

Aujourd’hui, je devais faire preuve d’autant de courage qu’elle. Je m’étais ramollie en vivant auprès des Lind. Il était temps de prendre mes responsabilités et de me montrer forte. Je devais sauver ma famille. La seule famille que j’avais jamais connue.

La plupart des gens s’adaptent à leurs circonstances. Surtout les enfants. Je voulais vivre, je voulais grandir. Alors j’ai fait tout ce que je pouvais pour y arriver.

C’était le genre de femme qui attirait à la fois l’attention et le respect. Ses filles, avec qui j’avais été à l’école petite, ressemblaient beaucoup à leur mère. Elsa s’était mariée avec le premier dentiste de la ville. Quant à Martha, c’était la femme du Dr Neal. Ils vivaient dans de très belles maisons toutes neuves construites non loin de la propriété des Barnes. Je n’en étais pas fière, mais lorsque je pensais à elles, je ne pouvais m’empêcher de ressentir une pointe de jalousie.