Annihilation est le premier tome du rempart sud, une trilogie d'un auteur que je découvre :
Jeff Vandermeer. Je trouve personnellement qu'il se suffit à lui-même, ce qui ne m'empêchera pas de lire la suite sitôt que j'aurai mis la main dessus !
Quatre femmes scientifiques ont pour mission d'étudier et de cartographier la Zone X. On devine d'emblée qu'il y aura un carnage, mais où, quand et comment ?
Ce petit roman fantastique à la tonalité horrifique m'a happé dès les premières lignes. En effet, l'écriture y est particulièrement soignée. Rien de percutant ou de poétique. Rien de très littéraire non plus. Simplement les mots sont toujours bien choisis, et les phrases sonnent joliment.
Rapidement aussi, l'ambiance m'a rappelé
IF 837, de
Jean-Michel Calvez, dont les nombreux points communs m'ont placé en terrain conquis : exploration de l'inconnu par une équipe de scientifiques complémentaires, tension permanente, et puis cette façon d'expliciter les raisonnements et les hypothèses de manière très logique, très psychologique. On aime ou on n'aime pas, moi j'aime ! Un petit exemple : dès le début, nos exploratrices tombent sur une sorte de large puit en pierre, avec à l'intérieur des marches qui s'enfoncent dans les profondeurs. Seule la narratrice nomme cette structure une « tour », les autres lui préférant la désignation de « tunnel ». Alors que ce désaccord devrait rester anodin, il génère au contraire une tension palpable, et devient un noeud de clivage mystérieux et récurrent. le récit est bourré de petits détails comme celui-ci qui contribuent à l'ambiance.
Les différences proviennent du genre : autant
IF 837 est de la pure SF, autant
Annihilation est du pur fantastique. Cela se voit dans les thèmes abordés, dans la réalisation et dans le dénouement.
Une autre référence m'est venue après ma lecture : la série bien connue Lost. On y retrouve en effet cette ambiance de mystère typique. La structure narrative est également la même, avec un récit d'exploration principal entrecoupé de flashbacks dont le but est d'étoffer petit à petit le background des personnages ou d'apporter un peu de contexte. Et la règle d'or : dévoiler le mystère au compte-gouttes.
En y réfléchissant bien, je n'étais pas le meilleur client pour ce roman.
Annihilation joue à fond sur la corde du fantastique et, comme dans Lost, l'auteur s'est complètement lâché pour créer un univers… inexplicable. Je déteste ça, la facilité du fantastique pour laisser le lecteur face à ses questions. Mais ici, cet aspect ne m'a pas rebuté. Peut-être grâce à la tonalité scientifique omniprésente. le regard particulier de la narratrice (une biologiste) est en effet précieux pour entrapercevoir le début d'une explication. Ce qui est sûr, c'est que ce roman donne à réfléchir sur les organismes, les cellules, et plus généralement le vivant.
J'imagine bien que le dénouement en décevra beaucoup. Exit la chute vertigineuse, logique et parfaitement maitrisée de
IF 837. À la fin, d'une certaine façon, on n'en sait pas beaucoup plus qu'au début, mais si entretemps on n'a pas vu le temps passer, c'est bon quand même, non ?
Les quelques défauts que j'ai pu relever concernent la crédibilité. Par exemple, les exploratrices portent à leur ceinture un boitier qui émet une lumière rouge en cas de danger. Concrètement, elles doivent jeter un coup d'oeil dessus régulièrement pour vérifier que « tout va bien ». Je suis sûr que vous voyez le problème… Et puis, comment expliquer qu'à aucun moment elles ne songent à renoncer, merde ! Comment expliquer qu'elles aient accepté ce suicide en premier lieu ? Mais le roman tente d'expliquer cela un peu aussi.
Dernière référence, adressée aux anciennes lectrices et lecteurs du
Projet oXatan, de
Fabrice Colin, un roman SF de littérature jeunesse que j'ai lu récemment. On y retrouve, pêle-mêle : quatre personnages principaux ; un récit tourné vers l'exploration d'un site enclavé ; un petit nombre de lieux d'intérêt sur ce site ; de nombreux mystères à élucider ; un suspense entretenu ; un aspect gore avec un massacre à la clé ; le thème de la transformation psychique, celui de la transformation du corps humain ; enfin la technique narrative du journal.