Les dernières heures sont un roman signé
Minette Walters, qui traite de la peste noire et de ses ravages en Angleterre. Lady Anne, pragmatique face au danger que représente la pandémie, décide d'isoler le domaine de Develish, et peut compter sur le soutien presque inconditionnel de ses serfs.
Tout d'abord, je remercie les éditions Robert Laffont et Babelio pour l'envoi de ce livre dans le cadre d'une opération « Masse critique ». Malheureusement, j'ai bien peur de ne pas l'avoir apprécié, et ce pour diverses raisons.
En premier lieu vient la platitude de l'histoire. Face à une menace telle que la peste noire, qui a décimé plus d'un tiers de l'Europe en l'espace de quelques années, je m'attendais à lire un roman très sombre, à craindre pour la vie des personnages… Et en fait, pas du tout.
Ce qui nous amène au second point : le manichéisme. D'un côté, il y a Sir Richard, maître de Develish, l'archétype de l'homme ignoble dans toute sa splendeur. Évidemment, il comptera parmi les premiers à succomber à la maladie, pendant que son épouse, la bienveillante et cultivée Lady Anne, prendra les mesures qui s'imposent pour protéger ses gens.
Lady Anne est la bonté incarnée, et pour preuve, elle a appris à lire, à écrire et d'une certaine façon à raisonner aux serfs qui étaient persécutés à la fois par son mari et par sa fille. Grâce à elle, ils sont tous devenus intelligents, débrouillards… Tellement intelligents et débrouillards qu'ils trouvent des solutions à tout.
Même quand Thaddeus, ex-serf-régisseur, quitte le château en compagnie d'un groupe d'adolescents pour aller chercher des vivres, je n'ai quasiment ressenti aucune inquiétude pour eux. Ils se révèlent très vite capables de surmonter toutes les situations et de s'en sortir sans peine, face à des dangers qui les frôlent superficiellement. Pour le suspens, on repassera.
À cause de cela, la lecture m'a paru lente et longue. Certains passages auraient mérité d'être condensés, car j'ai eu à maintes reprises l'impression que l'histoire piétinait, et je finissais par perdre le fil, d'ennui. (Je serais par exemple bien incapable de me rappeler pourquoi il était impératif de faire brûler les villages, et surtout quel impact direct cela avait sur la quête des protagonistes.)
Au final, les rares personnages auxquels j'ai réussi à m'attacher sont les adolescents qui entourent Thaddeus, parce qu'ils doutent, s'interrogent, ont des défauts marqués, des qualités à exploiter… Mais aussi à (attention, je sens que je vais me faire taper sur les doigts) Eleanor !
Comment ? Eleanor qui est aussi garce que Lady Anne est irréprochable ? Eh bien… Pas si irréprochable que cela, en fait, du moins pas à mon goût, et la pensée qui m'a accompagnée tout au long du livre est d'ailleurs formulée par le père Anselm lui-même, dans les derniers chapitres. Comment une femme, qui est somme toute assez manipulatrice pour diriger un domaine au nez et à la barbe de son mari, tout en éduquant des serfs, a-t-elle pu laisser Sir Richard corrompre à ce point une enfant ?
Elle savait ce que son époux valait, c'est-à-dire rien, et même pire encore. Si elle n'a rien pu tenter pour empêcher cet homme de pervertir autant l'esprit de sa propre fille, comment Eleanor, qui a sans doute eu le crâne rempli par son père de tous les vices possibles, et ce dès son plus jeune âge, aurait-elle pu évoluer autrement qu'à son image ? Les serfs sont le reflet de la bienveillance dont Lady Anne a fait montre à leur égard, tout comme Eleanor est le fruit de la monstruosité de Sir Richard.
En définitive, je dirais que ce livre souffre essentiellement de son manichéisme trop marqué, qui se ressent non seulement dans les personnages, mais aussi dans leurs actions. Si je suis la première à songer que le savoir est la réponse à de nombreux maux, il n'est pas non plus la solution miracle à tous les problèmes, au point de rendre presque invulnérable ceux qui le détiennent, or c'est le sentiment que j'ai eu tout au long de ma lecture. Une déception, donc.
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