Voici un roman féministe, humaniste et progressiste : un roman qui donne du baume au coeur !
C'est un ouvrage qui se lit vite, presque 600 pages dévorées en quelques jours.
Martin Winckler a une écriture fluide et le sens du rythme. Son récit alterne habilement entre les monologues des patientes, les comptes rendus de consultations, les réflexions des personnages, les joutes verbales entre l'interne et le docteur et les scènes de la vie quotidienne de Jean Atwood.
C'est l'histoire d'une rencontre entre deux personnes, Jean Atwood, jeune interne spécialisée en gynécologie chirurgicale envoyée dans l'unité 77 « Médecine de la femme », et le docteur Franz Karma, même pas gynécologue mais généraliste !, responsable de l'unité.
Une rencontre qui est d'abord une confrontation. Jean Atwood est sûre d'elle, condescendante, formatée par la faculté dont elle sort et très remontée : contre le service dans lequel on l'envoie, contre le médecin qui va la former, contre les hommes et surtout contre les patientes qui viennent consulter. le deuxième, Franz Karma, est un docteur expérimenté, patient, à l'écoute de ses patientes et plein de bienveillance à leur égard.
Dès le début, on ne peut s'empêcher d'aimer Franz Karma.
Pour Franz Karma, le soignant, c'est celui à qui le patient prend la main. Ce n'est pas un docteur, c'est un soignant, un soignant patient* (expression de l'auteur), qui ne se sent pas supérieur, qui n'a ni a priori ni préjugés, qui donne la parole aux femmes qu'il reçoit et les écoute sans les interrompre.
Le Choeur des femmes est d'abord un roman polyphonique, où résonnent les voix de femmes de tous âges et de toutes conditions, qui se content avec leurs problèmes, leur tempo, leurs mots et leur mélodie propre.
C'est un roman de formation pour Jean Atwood. Sa mauvaise humeur et sa mauvaise volonté durant les premières consultations, confrontées à la patience et au sens de l'écoute de Franz Karma, font des étincelles. Mais, peu à peu, avec douceur et intelligence, Franz Karma va l'amener à se remettre en question et va lui apprendre à soigner.
C'est un roman documentaire : on y trouve une mine de renseignements sur les différents moyens de contraception, les maladies qui peuvent toucher les femmes, etc. En effet,
Martin Winckler est lui-même médecin généraliste expert dans le domaine de la contraception et, comme il le stipule dans l'avertissement en exergue de l'ouvrage : Ce livre est un roman : les personnages, l'Unité 77, la ville de Tourmens, son CHU et les évènements qui s'y déroulent sont imaginaires. Mais presque tout le reste est vrai.
Mais c'est aussi un roman du secret, celui de Jean Atwood, un secret bien caché sous une carapace qui se fendille au fur et à mesure de son séjour à l'unité 77, avec des indices disséminés habilement au fur et à mesure du récit.
Et, enfin, c'est un roman féministe. En effet, comment ne pas s'indigner, au regard de sa propre expérience peut-être et de tous les témoignages relatés par les amies, les parentes ou encore les sites internet, de tous les épisodes choquants, voire traumatisants, de visites chez le gynécologue ? Grossophobes, homophobes, infantilisants, brutes, juges, méprisants, opérant sans consentement, etc. les qualificatifs et les exemples sont malheureusement nombreux. Dans ce roman,
Martin Winckler redonne sa place à la patiente comme être pensant, se questionnant, réfléchissant, parlant… et méritant d'être écouté. Parce qu'il faut pouvoir parler pour se faire comprendre, laisser la place aux mots des femmes avant les ordonnances des médecins. Et il donne la possibilité de concevoir une médecine plus moderne et plus humaine.
Évidemment, on ne peut que conseiller la lecture de ce roman à toutes les femmes, aux adolescentes avant leur première consultation (parce que ça peut servir de connaître ses droits !), mais aussi aux hommes et à tous ceux qui ont envie de lire ce livre passionnant, instructif, révoltant parfois, comme dans la vraie vie. Et bien sûr aux gynécologues, surtout aux gynécologues, comme un livre salutaire à plusieurs titres. Parce qu'il n'y a pas que dans la rue ou le foyer conjugal que les droits des femmes sont bafoués et doivent cesser de l'être.
Donc, pour ce livre, pour toute l'empathie à l'égard des patientes qu'il contient, pour les idées progressistes et humanistes qu'il véhicule, pour son engagement, merci infiniment monsieur Winckler !
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