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EAN : 9782348041877
224 pages
La Découverte (11/04/2019)
4.41/5   69 notes
Résumé :
À force de le lire et de l’entendre, cela semble admis : la langue française serait en péril. Diverses menaces contribueraient à la dégrader : les argots, les anglicismes, les barbarismes, le langage SMS, le politiquement correct, etc. De fait, défendre la langue est devenu un prétexte facilement recevable pour tempêter contre la société contemporaine (forcément décadente).
Mais qu’est-ce donc qu’aimer la langue française ? C’est passer du temps à lire, parle... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (18) Voir plus Ajouter une critique
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Cela fait longtemps que je dois vous chroniquer cet essai reçu via la plate-forme NetGalley. Peu avant sa sortie en avril de cette année, j'avais déjà repéré ce bouquin quand son éditeur La Découverte en faisait la promotion sur Twitter. La linguistique ainsi que l'histoire et l'évolution de la langue française ont en effet toujours attisé ma curiosité et le titre « le français est à nous ! Petit manuel d'émancipation linguistique » ne pouvait que m'intéresser ! Respectivement docteure en linguistique et docteure en langue et littérature françaises, les deux autrices, Maria Candéa et Laélia Véron, savent de quoi elles parlent et vulgarisent très bien le sujet en abordant de nombreux sujets actuels sur langue et en remettant en question des convictions ancrées chez beaucoup de locuteurs francophones.

Dans cet essai, les deux autrices veulent nous convaincre qu'il faut s'approprier notre langue et ne pas avoir peur de sa prétendue dégradation. de nombreux ouvrages alarmistes sur la langue voudraient nous faire croire qu'il faut absolument lutter contre les menaces que seraient les anglicismes, les barbarismes ou encore le langage SMS. Il faut oser s'interroger sur la langue, la remettre en question, ne pas la voir comme une entité figée appartenant seulement à l'Académie française ou aux équipes de rédaction des dictionnaires comme elles l'expliquent très bien dans le préambule de ce livre.

L'essai se divise en trois parties. La première pose quelques bases de la linguistique de façon claire sans entrer dans les détails en abordant la définition de la langue, la notion de faute, la grammaire ou encore les néologismes. La deuxième partie « Au nom de la langue » traite des aspects politiques et sociétaux qui ont secoué ou secouent la langue encore aujourd'hui comme la masculinisation du français, la diffusion du français dans les colonies ou la notion de francophonie. Enfin, la dernière partie revient sur des périodes clés de l'histoire qui ont forgé le mythe de la langue de l'Âge classique à la révolution numérique.

Dès le début, le ton provocateur des deux autrices et le propos de ce livre m'ont fait penser à un spectacle-conférence que j'ai vu il y a quelques années au théâtre qui s'appelait « La convivialité ». Deux anciens profs de français partaient du postulat simple que la langue française est un dogme. Pour la plupart d'entre nous, elle n'est pas susceptible d'être remise en question sans susciter une levée de boucliers de la part des puristes et pourtant, la liste de ses absurdités dressée par les deux profs pendant le spectacle est longue. Pas mal de mes idées préconçues sur la langue et l'orthographe ont volé en éclat à la sortie de ce spectacle (le texte a d'ailleurs été publie si cela vous intéresse sous le titre La faute de l'orthographe). Cet essai est donc dans la parfaite continuité de cette première approche de la linguistique.

Grâce à la première partie, on comprend facilement des notions de base en linguistique car elles sont expliquées clairement sans termes outrageusement techniques. Les autrices abordent de nombreux concepts sans trop survoler et sans trop rentrer dans les détails. le tout se lit de manière très fluide et elles nous proposent à la fin de nombreuses références pour creuser la question. Ensuite, elles entrent dans quelques sujets polémiques notamment la féminisation de la langue ou l'écriture inclusive. Des anecdotes savoureuses nous éclairent sur l'absurdité de certaines règles établies il y a plusieurs siècles pour des raisons purement arbitraires.

Les autrices procèdent de la même manière pour nous ouvrir les yeux sur l'incohérence de certaines règles orthographiques et tirent à boulets rouges sur l'institution vieillissante et obsolète qu'est aujourd'hui l'Académie Française. Volontairement provocatrices et avec leur rigueur toute scientifique, les deux autrices nous amènent à poser un regard critique sur notre langue qu'on pensait pourtant figée. Pourquoi, par exemple, le recours à l'acronyme CQFD est encouragé alors que l'utilisation de MDR est mal vue ? Elles nous font remarquer de manière rationnelle que tous les deux ont le même statut linguistique mais que l'on va juger le niveau social de la personne qui le dit. Tous ces exemples nous amènent à réfléchir et à prendre du recul sur le fétichisme dont fait parfois l'objet le français. Elles abordent enfin le temps perdu à l'enseignement, par exemple, des règles du participe passé à l'école, des règles qui pourraient être plus logiques et plus simples (sans rendre la langue simpliste pour autant !).

En conclusion, on peut aimer le français tout en acceptant ses évolutions et en étant pas réfractaire aux tentatives de réforme de la langue. Tout en combattant l'insécurité linguistique, les deux autrices dressent un portrait succinct de la langue, de ses évolutions et nous placent devant nos contradictions. On peut ne pas être d'accord avec tout ce qu'elles disent dans cet essai mais force est de constater qu'en refermant ce livre, nombre de vos certitudes sur la langue pourraient bien être ébranlées. Vous pourriez bien vous dire : « Et finalement, pourquoi pas ? » quant à la dernière réforme de l'orthographe qui finalement ne va peut-être pas assez loin et que vous aviez toujours dénigrée car, après tout, le français est à nous !
Lien : https://thetwinbooks.wordpre..
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Un grand merci à Net Galley et aux deux autrices pour ce bijou !
Deux autrices (qui d'ailleurs nous expliquent l'origine de ce mot) passionnantes et passionnées, deux maîtresses de conférences qui sont spécialisées dans la langue mais qui ont su écrire (très bien) un ouvrage simple que tout un chacun peut lire/dévorer, s'il est amoureux de la langue française.
Le texte est concis mais très complet et comprend l'Histoire de la langue, l'Histoire tout court, une réflexion sur la définition de la langue, sur la faute, la francophonie, les débats qu'ont suscités notre belle langue, la révolution numérique…
Un ouvrage fascinant qui nous pousse parfois dans nos retranchements (de façon très saine) et qui partage avec nous cet amour de la langue.
Un livre à lire de toute urgence !
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Jamais un livre n'aura bousculé à ce point et aussi rapidement mes préjugés, jusqu'à (peut-être) me faire devenir un ardent défenseur de l'évolution de la langue.
Quel découverte que s'apercevoir qu'il est vain de vouloir enfermer notre langue dans des règles désuètes, illogiques (pourquoi "donner" et "donateur", pourquoi l'accord du participe passé et parfois non, pourquoi le phonème "ph"), savoir accepter les néologismes comme un enrichissement normal de toute langue vivante (un anglicisme, une fois qu'il est admis et utilisé couramment, devient un mot français et dire courriel plutôt que mail ne change finalement pas grand'chose).
Oui, vivante est ce qu'il faut retenir : le français est vivant, et n'est absolument pas en danger, même si "aller au coiffeur" fini par s'imposer, car il a belle-lurette que le coiffeur ne reçoit plus ses clients chez lui.
La grammaire, compliquée, sert à maintenir l'élitisme, et son apprentissage, qui monopolise tant d'énergie en primaire, est une perte de temps au détriment des véritables finesses de la langue, de l'éloquence, etc...
Dit comme ça, l'ouvrage semble va-t-en-guerre, mais rassurez-vous, il est accessible, parfois drôle et surtout très instructif.
Tout un chapitre est écrit en orthografe revisitée, c'est assez surprenant et... pourquoi pas ?
Les amoureux de la langue française, et nul doute qu'il sont nombreux sur Babelio, devraient lire ce petit ouvrage, histoire de malmener nos certitudes.
Je recommande chaudement et n'hésitez pas à laisser vos commentaires !
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Ce n'est pas un secret, j'aime beaucoup la langue française, je crois la manier de façon plutôt correcte, en général. Pour autant, je n'adhère pas aux discours passéistes, qui sont surtout l'occasion, pour un trop grand nombre de personnes de mon âge, de chouiner (en ligne) sur "l'horrible décadence des jeunes, leur inculture et leur addiction à internet, le wokisme et la société du tout-fout-l'camp, ma pov' Lucette".

Je craignais un peu, en ouvrant cet essai, de tomber sur un nouveau torchon conservateur (oui, sous ma plume, c'est un pléonasme); j'ai donc eu une très agréable surprise en trouvant un texte, bien argumenté, en faveur de l'évolution de la langue. Parce que le français est vivant, que je n'aime les cadavres que dans les polars, que l'orthographe et la grammaire française sont bourrées d'incohérences et d'absurdités qui devraient disparaître, j'aime vraiment le point de vue des autrices et je recommande vraiment cette réjouissante lecture.
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Les deux autrices, spécialistes de la langue Française, en délivrent l'histoire, la géographie, l'évolution, ses aspects sociaux et politiques de manière très documentée et très claire. Elles tentent, avec de nombreux exemples de prôner une grande tolérance sur ses évolutions, souvent jugées déplorables par des puristes souhaitant la figer sous des aspects élitistes qu'ils maîtrisent. Les membres éminents de notre académie Française en prennent pour leur grade, car leur dictionnaire très en retard par rapport aux autres est insignifiant et rétrograde. Très beau panorama de toutes les problématiques langagières.
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critiques presse (1)
Lexpress
16 mai 2019
Sans jamais tomber dans la démagogie ni le laxisme, Le français est à nous, petit ouvrage formidable, dynamique et pédagogique, bouscule nos certitudes sur notre langue et nous instruit. Revigorant !
Lire la critique sur le site : Lexpress
Citations et extraits (13) Voir plus Ajouter une citation
L'anglais pourrait-il menacer le français ? De fait, l'anglais se développe comme langue internationale et langue des échanges scientifiques, comme ce fut le cas jadis pour le latin. Il est devenu ce qu'on appelle, à la suite de Jean-Louis Calvet, une 'langue hypercentrale', avec un statut international tout à fait particulier. Or ni le latin médiéval ni le latin scientifique des siècles dits classiques n'ont remplacé aucune des langues de culture européenne. Le plurilinguisme ne menace pas la diversité linguistique. La seule pratique qui pourrait représenter une réelle menace, ce serait l'abandon de l'usage du français dans un domaine entier de la vie en société. Par exemple, l'abandon de toute création musicale ou cinématographique en français serait incomparablement plus nocif pour la vitalité du français que l'adoption de 3000 néologismes à base d'anglais. Ainsi, le soutien public à la création en langue française est incomparablement plus utile à la vitalité du français que les croisades de l'Académie pour remplacer 'podcast' par 'balladodiffusion'.
(p. 59)
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Geofroy Tory de Bourges dans Champ fleury (1529) et Jean (John) Palsgrave dans L’Esclarcissement de la langue françoise (1530) tempêtent déjà contre la dégradation et la décadence du français envahi par des latinismes et italianismes prétentieux, et par des mots venus du jargon du bas peuple et adoptés par les gens de la Cour… Geofroy Tory s’élève contre le danger des « inventeurs et forgeurs de mots » qui pervertissent et corrompent le français et appelle déjà (en 1529…) à purifier la langue pour la sauver ! Contre ces corrupteurs, il appelle à prendre comme modèles les auteurs incontournables qui ont su donner au français un style de « grande majesté » : Chrestien de Troyes, Jehan-li-Nevelois, Hugon Mery, Arnoul Graban… Si ses références peuvent aujourd’hui sembler bien désuètes, l’idéologie puriste appliquée à la langue française n’a pas pris une ride et se retrouve dans les discours conservateurs actuels. Ce qui a radicalement changé, c’est le public visé : Geofroy Tory et John Palsgrave s’adressaient à une minuscule élite et n’avaient cure de l’ensemble des gens qui parlaient français ; les discours conservateurs actuels ont progressé au moins sur ce point : leur élitisme est rarement explicite. Et pourtant, de fait, l’élitisme reste un moteur qui alimente beaucoup de discours sur la langue : il s’agit toujours de se distinguer des autres, de celles et ceux qui parlent et écrivent mal. Mais quel but poursuit-on exactement en attirant l’attention sur les fautes ? S’agit-il vraiment de diffuser des connaissances… ou de s’assurer de rester entre soi en repoussant les souillures venues de l’extérieur ?
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Qu'est-ce qu'une faute ?

... souvent, on ne sait pas que :
Le français standard n'a aucune existence empirique, c'est une idéologie qui ne se maintient que parce qu'elle est partagée par un grand nombre de gens.
Ce qui est considéré comme correct ou incorrect se renégocie sans cesse selon un grand nombre de critères en concurrence ; de nombreuses tournures naguère fautives sont considérées comme correctes aujourd'hui, et vice versa.
L'orthographe française n'est pas toujours fondée sur des critères logiques ou étymologiques. Bien souvent, elle est surtout un outil de distinction sociale.
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Pour résumer le match entre 'au coiffeur' et 'chez le coiffeur', on peut retenir qu'il s'agit d'une opposition entre une logique linguistique et une logique sociale. Sans ce processus de stigmatisation sociale, on aurait pu simplement garder 'chez' pour désigner, en accord avec l'étymologie, des endroits où quelqu'un habite et dire ainsi 'Je vais chez moi, chez une amie' et 'je vais au coiffeur, au Carrefour, à Leclerc, à la SNCF'. Dire 'chez le coiffeur' n'apporte aucun apport de sens par rapport 'au coiffeur', au contraire. Est-ce bien raisonnable de maintenir cette hiérarchie entre les deux tournures alors qu'elle n'a rien à voir avec la grammaire ?
(p. 55)
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La notion de "niveaux de langue" ou de "registres" a commencé à se répondre dans les années 1950. Elles est, de nos jours, bien intégrée dans les manuels scolaires : nous avons appris qu'il y avait trois niveaux de langue : familier, courant et soutenu. Or cette tripartition, a priori évidente, pose problème dès qu'on l'observe de plus près...
En effet, les énoncés que nous produisons sont souvent hétérogènes et peuvent mêler des caractéristiques attribuées au registre familier - par exemple le fait d'omettre le "ne" de la négation et de n'employer que le "pas" - et des caractéristiques attribuées au registre soutenu - par exemple un vocabulaire précis, technique, littéraire, archaïque... Un énoncé comme " Je vois pas pourquoi tu t'emportes de cette manière " est à la fois familier et soutenu.
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Vidéo de Maria Candea
Laélia Véron et Maria Candea vous répondent !
Le sens originel des mots.
"Est-ce qu'il existe beaucoup de mots pour lesquels un sens "originel" a été abandonné au profit d'autres sens ? Par exemple chafouin qui veut dire pour la plupart des gens "grognon" alors qu'il voulait dire à la base "vil, rusé" tout ça ?"
Parler comme jamais, 2021, Éditions le Robert.
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